Marion m’a envoyé ce témoignage et a eu quelques jours plus tard une bonne nouvelle : elle est enceinte (et naturellement !). Alors mes chères lectrices, ne perdez pas espoir ! Voici le récit qu’elle avait écrit pendant sa longue attente.
{Témoignage} On n’est pas des champions de la fertilité
Il y a des jours sans… Aujourd’hui je mouline. C’est en cherchant à combler le vide que je tombe sur les témoignages publiés sur la mariée en colère. Je me reconnais presque dans chaque histoire. Mais je ne connais pas encore l’issue de la mienne. J’ai 29 ans, mon amoureux aussi, nous sommes jeunes, vaillants et jusqu’ici tout va bien. J’ai quand même toujours eu ce sentiment que quelque chose clochait côté utérus. Mes cycles sont plus longs, plus irréguliers que la « normale », j’ai toujours de l’acné etc… Au fond de moi, je me disais : « si ça se trouve, t’es stérile« . Régulièrement chez les différents gynécos que j’ai rencontré entre 13 et 29 ans, j’ai formulé cette interrogation. Pour seule réponse, on me prescrit une pillule maousse-costaud très jeune : plus de symptômes, plus de problèmes, non ? Et ça n’a jamais été plus loin.
Un jour je consulte internet armée de mes drôles de symptômes en guise de mots-clés et je tombe sur cette pathologie : Syndrome des ovaires polykystiques. Je me reconnais dans quasiment tous les symptômes typiques. J’en parle à ma gynéco de l’époque qui balaye mes inquiétudes d’un revers de la main. Bref, j’attends, sans y penser, que l’envie d’enfant se pointe (comme une envie de pipi venue de nulle part d’ailleurs), qu’elle soit partagée un an plus tard, et puis l’angoisse de l’infertilité revient. Après quelques mois « d’essai sans résultat », je n’y tiens plus, il me faut des réponses. J’habite à Barcelone depuis 1 an, je me mets donc en quête d’une gynéco francophone. Quand nous nous rencontrons, je vais droit au but : je soupçonne d’avoir le SOPK, je veux une écho, un bilan sanguin et de l’aide. Échographie dans le quart d’heure : OMPK (ovaires micropolykystiques), autrement dit, « j’ai de la chance » car c’est une version light de la pathologie, me dit la gynéco. Voila, je suis quand même bouleversée, mais j’ai enfin des réponses. Dans mon malheur, je suis tombée par hasard sur cette gynéco spécialisée dans le traitement de l’infertilité. Elle est douce, compétente, à l’écoute, me dit que je suis jeune et qu’elle y croit. Elle me prescrit des analyses hormonales de routine et un spermogramme pour mon amoureux.
Et là, on va se prendre 2 claques monumentales supplémentaires. Eh oui, « quand on cherche, on trouve » a dit mon frère un jour.
1, mes analyses hormonales sont problématiques, on m’envoie chez un endocrinologue. Verdict : Hypothyroïdie (maladie auto-immune de la thyroïde) dont les symptômes sont assez similaires à ceux du SOPK, entre autres, propension à prendre du poids ET infertilité (encore celle-là). Une maladie à vie, qui, si elle est soignée tôt, est plutôt bénigne.
2, les résultats du spermogramme que nous découvrons un soir le cœur léger, finissent de nous achever… les petites gamètes ont la tête cabossée pour 90% d’entre elles. Inexplicable. Incurable. On lui prescrit des vitamines pour la grossesse…
Là je perds tout espoir. La gynéco commence à parler de FIV. De mon côté, je commence par retejer l’idée de la PMA, dont je sais qu’il s’agit d’un parcours difficile où le corps et l’esprit trinquent parfois jusqu’à la séparation du couple. Les gens extérieurs à tout ça croient que c’est une solution miracle, facile, rapide. Moi je regarde « les Maternelles » depuis quelques mois… Évidemment, entre le début des essais et les dernières annonces catastrophiques, l’envie de bébé est devenue obsessionnelle. Faux symptômes à chaque cycle ; on a l’impression que dés qu’on pointe le nez dehors, toutes les poussettes et les femmes enceintes du quartier se sont données rendez-vous à notre passage… Je deviens jalouse, intolérante (dans la rue, je ne supporte pas les jeunes parents rivés sur leur smartphones quand ils promènent leur bébé, ni les amies jeunes maman qui se vantent naïvement d’être devenues enceintes dés le premier mois d’essai…) et pour finir, assez dépressive.
Parce qu’il faut le dire.
Quand tu te retrouves du jour au lendemain le nez écrasé contre le mur de l’infertilité, ce mur qui va probablement t’empêcher de continuer de vivre ta vie d’imbécile heureux fécond, ça fait mal.
J’ai eu le vertige. Une sensation de vide physique : mon ventre ne sera -peut-être- jamais plein comme celui de toutes ces bienheureuses. De vide psychique : d’un coup tu fais face à ta finitude. Qu’est-ce qu’on va faire ? Qu’est-ce qu’on fout là ? À quoi on sert ? Je n’ai jamais voulu prendre le parti de l’optimisme. Je me suis dit qu’il valait mieux s’attendre à vivre une vie sans enfants et apprendre tout de suite à construire son bonheur malgré tout, plutôt que de s’user à les attendre en vain. Je me suis dit aussi, et cette pensée m’a beaucoup apaisée, qu’au fond donner la vie c’était comme mourir : on ne sait ni quand, ni comment, la justice et le mérite n’ont rien à voir avec cette affaire là, et encore moins la culpabilité. Assez sombre, on est d’accord, mais ça m’a soulagé. C’est dans cette période hardcore qu’on retrouve la gynéco pleine d’optimisme, elle. Elle nous propose une IAC dés le mois suivant. Je n’y crois pas du tout mais (contradiction avec mon humeur à ce moment là) on décide de le faire quand même, pour voir, pour se familiariser avec les protocoles. Un coup pour du beurre.
C’est moins terrible que ce que j’imaginais. Je suis en pilote automatique. Piqûres, PDS, échographies, vitamines, médoc. On est de bons élèves. J’arrive même à me faire les deux dernières injections toute seule avant l’IAC.
Résultat négatif. Bon.
Résolution : se recentrer sur l’observation et l’écoute de mon/nos corps, nous faire confiance de nouveau pour mieux lâcher prise (ce fameux graal) ; et surtout retrouver notre légèreté, faire d’autres projets de vie, continuer à avancer. Et advienne que pourra. Moi qui n’ai jamais rêvé de robe blanche, je demande mon amoureux en mariage (oui oui) parce que pour ça, je n’ai pas besoin de l’assentiment de Môdame Nature, non mais ! On programme des vacances. Les baisses de morale s’espacent.
Aujourd’hui je me sens mieux, même si je ne connais toujours pas l’issue de cette tranche de notre vie. Je ne regrette pas d’être allée consulter si vite et de « baisser les bras » si vite. Nous avons fait un chemin que nous aurions dû faire tôt ou tard. Il valait mieux tôt. Dans un an quand nous reviendrons en France, nous nous tournerons de nouveau vers la PMA, tranquillement, en connaissance de cause, sauf si d’ici là on est 3.
Et comme dit mon frère : « Vous ne voulez pas faire une colonie ? -Non- Vous n’avez donc pas besoin d’être des champions de la fertilité« . CQFD
Bisous
Marion
Vous souhaitez publier votre histoire sur le blog ? C’est ici que ça se passe.
Charlotte dit
Oh mais je n’avais pas vu l’introduction : c’est merveilleux! Toutes mes félicitations pour ta grossesse!
Charlotte dit
Chère Marion,
Je lis ton témoignage, et je crois halluciner. Aurais-je changé de nom et écrit un article à mon insu ici?
Chéri et moi sommes EXACTEMENT dans la même situation que toi et ton amoureux. Comme toi, je me doutais que j’étais atteinte du syndrome OPK. Mais comme toi, je me suis pris une énorme claque quand j’ai appris que c’était doublé d’une hypothyroïdie (c’est une maladie dont souffre ma maman donc ça ne m’est pas complètement étranger, mais ça a été un vrai coup de massue). Et comme vous, Chéri a beaucoup de spermatozoïdes tordus. Eh oui, quand on cherche on trouve. Comme toi, j’ai fait une grosse déprime (dont je ne suis pas tout à fait sure d’être sortie)
Mais mon gynéco (un spécialiste) n’avait pas l’air inquiet. Il nous a expliqué que pour Monsieur, ce n’était pas si préoccupant, et que pour moi, eh bien on va traiter tout ça. Que dans tous les cas, il pourra nous aider. J’ai décidé d’y croire. Comme m’a dit une amie, on ne sait de toute façon jamais de quoi le futur sera fait… Et pareil, on ne veut pas 6 enfants, on a pas besoin d’être les meilleurs dans le domaine. Ni vous ni nous ne serons des champions. Mais, au fond, on en a pas besoin. 🙂
Sandrine dit
Chère Marion,
Ton témoignage retentit en moi. Comme toi, j’ai toujours eu la sensation que j’aurai des difficultés pour avoir un enfant. Je suis une poisseuse, je n’ai jamais de chance, je dois toujours batailler dans la vie.
J’ai eu la chance d’être diagnostiquée OPK très rapidement, je n’avais simplement pas mes règles après l’arrêt de ma pilule. J’ai la chance, comme toi, d’avoir un médecin qui nous suit de prêt et qui s’y connait!
On a fait tous les tests qui nous donnent bon espoir pour la suite, heureusement, même si je ne crie pas victoire trop rapidement.
Comme toi, on a fait le choix d’organiser notre mariage, on prévoit nos vacances aussi… On essaie de ne pas y penser, on se dit que ça viendra ou pas.
Ta phrase: « Je me suis dit aussi, et cette pensée m’a beaucoup apaisée, qu’au fond donner la vie c’était comme mourir : on ne sait ni quand, ni comment, la justice et le mérite n’ont rien à voir avec cette affaire là, et encore moins la culpabilité. », même si elle est extrêmement dure, elle est tellement juste.
Je te souhaite une belle grossesse, un charmant enfant à cajoler et beaucoup de bonheur!