Après plusieurs années de parcours PMA et puisqu’elle ne souhaite ni adopter ni faire de don d’ovocytes, Sabrina doit faire son deuil de la maternité. Elle ne sera jamais maman. Une épreuve difficile à encaisser. Voici son témoignage.
{Témoignage} Notre parcours PMA est un échec
Il y a des témoignages que l’on ne veut pas lire, qui dérangent, parce qu’on espère de tout son cœur ne jamais être cette fille-là, ne jamais être dans cette situation, ne jamais vivre l’impensable.
On pense que cela n’arrive qu’aux autres, que la vie s’est déjà suffisamment acharnée sur vous, que vous aussi vous avez droit au bonheur et que le contraire serait d’une injustice incommensurable… et pourtant, aujourd’hui je suis cette fille, la fille. Celle pour qui la médecine n’a rien pu faire, pour qui pourtant rien ne prédisait un tel dénouement, pour qui l’impensable s’est produit, pour qui la vie bascule en un appel. Hier, a pris fin un combat de 7 longues années pour avoir un enfant, combat dont nous ne sortons malheureusement pas vainqueur. Il faut garder espoir lorsque l’on entre dans un parcours PMA, mais personne ne peut en prédire l’issue et malheureusement, tout ne se termine pas toujours bien.
Il y a 7 ans pourtant, nous n’avions besoin que d’un petit coup de pouce de la médecine : j’ai un utérus, qui plus est normal, 2 ovaires qui fonctionnent, des trompes pas bouchées, pas de polype, pas d’endométriose, pas d’infection ou de maladie, des cycles réguliers, et même une réserve ovarienne à peupler la lune … mais un SOPK, considéré comme atypique car j’ovule tous les mois. A priori donc, un simple petit coup de pouce …
Commencent alors les cycles de stimulation, 6 ; puis face à l’échec, c’est parti pour les inséminations artificielles, 6 également, car il n’y a pas de raison que cela échoue donc poussons la technique jusqu’au bout. Re-échec, on passe à l’étape supérieure, la FIV. Chaque mois, la claque, les pleurs, la colère, le sentiment d’injustice et un mari génial qui me relève, encore et encore.
La 1ère tentative a eu lieu il y a un an et demi, pleine d’espoir, sans aucun doute. C’est obligé que ça fonctionne, la plupart de mes amies sont passées par là et ça a marché, et même du 1er coup, donc pourquoi pas moi ? Cette fois c’est la bonne c’est sûr ! S’en suivront 2 autres ponctions, 1 hospitalisation d’une semaine pour hyperstimulation, 48h eux urgences pour suspicion d’embolie pulmonaire liée au protocole, sans jamais aucun transfert car mes ovocytes ne maturent pas : il ne peut donc pas y avoir de fécondation.
Ça y est, on a enfin l’explication de pourquoi je ne suis jamais tombée enceinte naturellement en 7 ans d’essais. C’est le début de la fin … mon spécialiste décide de tout stopper car il y a un souci d’immaturité ovocytaire, inexpliqué, que la FIV ne peut traiter et commence à me parler don d’ovocyte. Ce fut un choc, réellement. Comment avait-on pu passer d’un petit coup de pouce à un don d’ovocyte ? Avant d’en arriver là, il me parle de la MIV (Maturation In Vitro), je n’en avais jamais entendu parler. C’est une technique encore expérimentale, qui n’est pas pratiquée dans tous les centres PMA. Il a donc fallu que mon autre médecin en clinique trouve une bonne fée, une biologiste formidable et humaine, attentive, bienveillante et volontaire qui m’a permis de ne pas sombrer d’un coup après cette annonce, de maintenir l’espoir quelques mois tout en cheminant vers le renoncement, en toute lucidité.
Nous ne souhaitons pas adopter, ni avoir recours au don d’ovocyte.
Elle a accepté de tenter l’expérience là ou d’autres hôpitaux ont refusé car je ne rentrais pas dans les applications thérapeutiques traditionnelles.
Nous partons donc sur Paris (nous sommes à Bordeaux) pour le protocole de la dernière chance, plein d’espoirs et de peur, entre rêve et lucidité, mais épuisés par ces derniers mois de prise de conscience d’un échec potentiel.
La ponction a eu lieu la semaine dernière, et n’a pas fonctionné. Nous l’avons appris avant-hier soir, et depuis je sombre, je suis dans un état bizarre, vide. J’ai l’impression d’être dans un cauchemar et que je vais me réveiller, que tout cela n’est pas possible. C’est une sensation étrange. Je pleure depuis cette annonce, mon mari est merveilleux. Il est lui aussi effondré par cette nouvelle, mais ne le vit pas de la même façon. Lui, il est déjà père. Moi, on ne m’appellera jamais maman, je n’assisterai pas aux 1ers pas, aux 1ers mots, à la 1ère rentrée, je ne stresserai pas au passage du bac, ne verserai pas mes larmes de joie à son mariage ou à la naissance de mes petits-enfants, ne compterai sur personne quand je serai une vieille dame pour prendre soin de moi, un peu. Je ne réalise pas encore tout à fait.
L’annoncer à ma famille et mes amis fut une épreuve de plus hier pour moi, car en l’officialisant, cela a rendu la situation réelle et immuable, sans retour en arrière possible, sans réveil possible. Et puis il y a cette grande maison et ses 1500m² de jardin que nous avons acheté il y a 4 ans, dans laquelle nous avons fait beaucoup de travaux et créé 4 chambres pour accueillir notre famille. Cette maison me paraît désormais trop grande, trop vide.
Qu’allons-nous en faire ? Quelle direction prendre désormais ?
Il y a cette certitude, que personne autour de moi ne peut comprendre ce que je ressens aujourd’hui. J’ai le soutien de mes proches, mais aucun d’entre eux ne peut comprendre. Je suis seule, avec mon ventre vide, mon utérus vide, mes ovocytes vides, je suis vide et il va maintenant falloir que je trouve de quoi me remplir, remplir ma vie autrement et lui donner un sens.
Il faudra du temps…
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juliette dit
Bonjour,
Je comprends parfaitement votre situation. Cela fait 6 ans que j’essaie d’avoir un enfant. J’ai une anomalie génétique (que personne n’a dans ma famille). En 6 ans, j’ai fait 9 fausses couches. J’ai été en PMA durant 3 ans. Les deux transferts se sont soldés par des échecs.
Quand je suis entrée en PMA, on ne m’a pas alertée sur le fait que cela puisse être échec. C’est une erreur car la chute est d’autant plus difficile. Le médecin qui m’a accompagnée était au final bien trop sûre d’elle.
Nous essayons encore naturellement en croyant au miracle sans se faire d’illusions.
C’est très difficile. Je prends les jours comme ils viennent. Je n’attends plus rien de la vie. J’ai la chance d’avoir un mari merveilleux. Je suis là pour lui.
J’essaie de me dire que je ne suis pas la seule, qu’il y a pire que moi mais cela ne me console pas du tout car le chagrin est bien là, accroché et tout me rappelle chaque jour que je ne serai jamais maman, que je n’ai pas le droit à une vie normale alors que je ne demande pas la lune.
Nous n’avons pas voulu non plus recourir au don car je n’aurais pas aimé avoir été conçue comme cela.
Quant à l’adoption, j’estime que cela ne doit pas être un pis-aller.
J’ai donc une pensée particulière pour vous, Sabfina, et pour toutes celles qui sont dans le même cas.
Justine dit
Ne pas pouvoir enfanter quand on a tant désiré cet enfant est un deuil, et dans pareil cas, il est impossible de réconforter pleinement celle ou celui qui le vit. Je ne chercherai pas à te dire que tu pourras compenser car, soyons sérieux, on ne compense pas un enfant par des cours de yoga, des vacances ou un chaton. On apprend à vivre sans. Un vide pourtant bien lourd à porter.
Je ne parviens pas à tomber enceinte non plus, et je sais que je ne serai pas prête à tout tenter pour y parvenir car pas capable de supporter ce qui me semble frôler l’acharnement médical. L’impact physique, psychologique et logistique de la PMA est énorme, et j’en viens à m’interroger si la fin justifie vraiment tous les moyens. Si l’accomplissement d’un projet, certes primordial, fout en l’air tout le reste (son couple, ses relations sociales, sa santé, ses passions…), on est en droit de se demander si tout accepter est la meilleure option.
Je comprends parfaitement ton refus de dons d’ovocyte ou d’adoption. Il est naturel de souhaiter un enfant qui nous ressemble et que l’on a senti grandir en soi. L’adoption est un projet très noble, admirable, mais qui implique un autre type d’engagement ; mon meilleur ami a été adopté, je sais de quoi je parle. Par ailleurs, le processus d’adoption peut s’avérer tout aussi long et complexe que le processus de PMA.
Quand on voit le nombre de femmes qui tombent enceintes par négligence, il y a de quoi s’estimer injustement punie. Ta colère et ta déprime sont donc légitimes. En matière de procréation, je pense que le hasard est finalement plus fort que le destin. Certaines interprètent les échecs comme un signe… je n’en suis pas convaincue… mais si cela peut nous aider à mieux nous relever, c’est toujours bon à prendre.
Le vrai défi, c’est d’accepter de ne pas avoir le contrôle sur l’essentiel. Je n’y parviens pas pour le moment. Tu es maintenant contrainte d’y parvenir afin de pouvoir accueillir les belles surprises (sans doute moins essentielles mais belles malgré tout) que le hasard ou ta volonté mettra sur ton chemin dans les mois et années qui viennent.
Je te soutiens sincèrement. De tout coeur, bon courage.
savonnette dit
han c’est tellement triste cette façon d’en parler et pourtant si réel malheureusement.
quel courage d’avoir été jusque-là pour finir comme on a commencé.
on ne pense pas à tout ça c’est vrai les 1ere fois.
je comprends le refus d’adoption et de don si tu ne le sens pas ne le fait pas. il ne faut pas le faire par dépit pour que cet enfant en souffre toute sa vie. MAIS laisse les choses se tasser, passer,… et repense au don car ca sera bien ton sang qui coulera dans ses veines et l’adoption c’est un peu un sauvetage pour l’enfant mais pourquoi pas pour toi aussi.
bon courage pour la suite
Céline dit
Je n’ai pas de mots parce que je pense qu’aucun mot n’attenuera ce que tu vis maintenant. Je te souhaite que le temps fasse son œuvre et que le vide que tu ressens aujourd’hui se comble d’une autre manière qui te rendra heureuse, sereine et épanouie. Je dirai juste que pour ce début de projet vous étiez deux et vous avez traversé tout ça ensemble main dans la main. On sent l’amour que vous vous portez, alors continuez à vous aimer, à vous découvrir autrement, et à profiter l’un de l’autre.
Laurence dit
En lisant ton témoignage, je me revois un an en arrière. Moi aussi j’ai cherché des gens dans notre cas, pour qui la médecine a échoué et il y en très peu. On se sent très seul. Même revoir mes amies rencontrées en PMA me fait de la peine car elles, ont réussi…
Comme toi, cela devait être simple pour nous, le soucis vient de mon mari. Qu’a cela ne tienne, avec la fiv icsi tout devrait fonctionner. Malheureusement après 2 ponctions, toujours pas de bébé. Il nous faudra pousser un plus la technique et passer à l’imsi. Nous changeons de centre car peu de centres la pratique et là nous revivons 2 autres fiv d’echec.
Alors je sombre tout doucement mais sûrement. Je pense à l’avenir et me voit vieillir sans personne pour venir me voir dans ma maison de retraite. J’erre dans ma maison avec ses 4 chambres qui ne serviront jamais, je pleure à chaque annonce de grossesse. Ma dépression atteint le stade où j’ai des idées suicidaires qui s’installent. Et puis un jour je craque littéralement au boulot, sans pouvoir m’arreter de pleurer. Ça a été le déclic pour me faire aider. S’ensuit des semaines et des semaines de psy a parfois 2 séances par semaine.
Et puis des fois la vie fait des cadeaux, pas ceux que l’on espère mais de jolis coups de pousse quand même. Nous profitons d’un changement d’employeur de mon mari pour décider de tout changer !
Nous quittons la région, mettons en vente notre maison, changeons de boulot et décidons de vivre, juste de profiter de chaque jour qui passe.
Ma vie ne tourne plus autour de la PMA, j’ai retrouvé un sens à ma vie grâce à mon nouveau boulot. Je me sens épanouie ! Nous allons acheter une jolie maison pas du tout adaptée pour des enfants et en profiter.
Aujourd’hui mon désir d’enfant est toujours là mais en sourdine.
Il va falloir du temps mais toi aussi tu vas te reconstruire et trouver un sens à ta vie. Je te le souhaite de tout cœur. Nous sommes des battantes avec ce que l’on a pu endurer et c’est pas maintenant que ça va s’arreter. Courage à toi.
Sandrine dit
Quel courage de venir en parler. Je ne peux pas comprendre, je ne comprendrai jamais votre sentiment, je peux juste dire que je vous soutiens, que j’espère que vous trouverez ce qui vous remplira et vous souhaite encore du courage et surtout du bonheur.
Féedesbulles dit
Je suis curieuse du pourquoi pas le don d’ovocyte ou d’adoption ? Un enfant « à soi » n’est pas forcément un « enfant de soi ». Et la maternité ne se résume pas au fait de porter un enfant et d’accoucher. D’ailleurs c’est même quelques mois contre toute une vie. Cela doit être très difficile d’accepter que l’on aura jamais d’enfant de son sang, mais pourquoi renoncer à élever un enfant à cause de cela ? Je te souhaite en tout cas beaucoup beaucoup de courage.
Somadeup dit
Bon jour Féedesbulles. Je poussoir ton commentaire. Je peux comprendre que lorsqu’on s’est imaginé donner la vie depuis toute petite, ce soit être très très dur d’y renoncer. Ce deuil est normal et compréhensible.
Mais en effet la maternité peut être atteinte par d’autres moyens ! Via l’adoption tu ne pourras pas porter d’enfant, mais tu vivrais toutes les autres étapes !
miocene dit
merci pour ce partage. Nous n’entendons parler que de ces gens qui finalement y arrivent, ou bien des progrès de la médecine… il arrive aussi que ça ne marche tout simplement pas mais …. c’est presque un tabou…
Néanmoins, il y a quelques jours je suis tombée sur cet article https://leberceauvide.wordpress.com/renoncer-a-la-maternite/ et sur ce blog https://jeneseraipasmaman.wordpress.com/ j’espère que cela vous aidera. Vous n’êtes pas seule !
je vous souhaite beaucoup de courage
lafouineinfertile dit
Il faut beaucoup de courage pour témoigner comme tu le fais. On entend beaucoup de témoignages de parcours PMA qui ont fonctionné mais très peu des autres. Prends du temps pour te reconstruire, c’est normal d’être effondrée. Mais une vie sans enfants ne veut pas dire une vie ratée, je suis sûre que tu a beaucoup à donner et des belles choses à vivre et que tu trouveras un moyen, quel qu’il soit, pour remplir ce vide même si cela restera toujours une blessure. Au sujet de la vieillesse, vieillir sans enfants ne veut pas dire vieillir seule. Et puis les maisons de retraite sont pleines de parents dont les enfants ne viennent presque jamais. Je te souhaite beaucoup de courage pour surmonter ce choc et une vie heureuse et bien remplie !