Clara vient d’apprendre qu’elle est enceinte. Et comme beaucoup de futures maman, son premier réflexe est de… paniquer ! Pour se rassurer, elle a décidé d’écrire une lettre à son bébé. Voici son témoignage.
{Témoignage} Panique, je suis enceinte !
Bonjour la Mariée en Colère !
Je suis ce blog depuis mon mariage et je n’avais jamais ressentie le besoin de me confier aux lectrices…
Jusqu’à aujourd’hui, maintenant que je suis enceinte ! Et oui, hier, gros coup de panique… « qu’est ce qu’on a fait ? Mon dieu… on est fous, on peut pas devenir parents ! Et quid de ma liberté, et de ma vie d’avant ? »
Alors je me suis reprise et j’ai bien réfléchi et j’ai décidé d’écrire une (longue) lettre à mon bébé pour essayer de me déculpabiliser, et parce que j’en avais besoin, et pour mettre les choses au clair, au cas où ça me reprendrait. Je ne sais pas si elle fera partie de son journal ou pas, mais elle m’a fait du bien, et j’espère que cette question de la panique des futurs parents et la réponse que j’ai essayé d’y apporter pourra aider d’autres personnes qui passent par le même cap !
Merci pour votre soutien !
Bisous bisous
Lettre à mon bébé
Salut petit bébé,
Quand tu liras cette lettre tu seras grand, et tu vas bien rigoler de ta maman qui en ce jour s’est soudain mise à paniquer pour son avenir.
Tu es dans mon ventre et cette petite remise en question, en partie due aux hormones (j’en suis sûre !), pourrait presque me faire penser que je vais être une horrible mère, pas certaine avant l’heure de savoir si elle va aimer son enfant, si elle sera capable de gérer sa nouvelle vie, si elle a fait la plus grosse bêtise de sa vie en se mariant et fondant une famille plutôt que de vivre sac au dos à découvrir le monde et à ouvrir des bars sur les plages du monde entier, etc, etc…
Pour ma défense, je voudrais te dire tout d’abord que je n’ai jamais été maman.
Du coup, j’ai un peu peur que quand tu débarqueras parmi nous, je ne sache pas tout à fait quoi faire de toi, ou avec toi.
T’imagines ? On se connait même pas.
T’as beau être dans mon ventre, pour l’instant tu restes le résultat d’une équation à 3 inconnues dont une est invisible à l’œil nue, l’autre est au travail et la dernière s’est transformée en estomac sur patte en manque de bière et de cigarettes, tourmentée par des ouragans d’hormones.
Tu vois le tableau ?
D’ailleurs, peut-être que tu ne m’aimeras pas, et que tu pleureras tout le temps !
Et ton papa ne sera pas toujours là pour me sauver…
Ni toi d’ailleurs, autant te prévenir.
Et je serai peut-être une mauvaise mère, du genre à non seulement pas savoir m’occuper de toi correctement mais à ne pas non plus savoir comment faire pour m’améliorer, et à ne pas avoir envie de faire mieux, parce que j’aurai envie de regarder la télé ou de sortir boire un verre. Déjà maintenant que tu es dans mon ventre, je ne fais pas trop attention à ce que je mange, alors… Bon, passons.
J’ai paniqué.
Et cela risque bien de m’arriver encore plus d’une fois, de me dire que ma vie va complètement changer, que ça me fait peur, que je vais perdre ma liberté de princesse, bref, que ma vie est foutue (malgré un mari incroyable, un passeport rempli de tampons du monde entier, une famille soudée, un diplôme universitaire, un job à responsabilité à temps partiel dans une super boîte, une sécurité financière digne d’un conte de fée, une gueule pas si moche… tout ce qu’il faut pour être malheureux quoi).
Ben oui, parce que par exemple, si je veux partir demain 3 semaines sac à dos au Guatemala (je n’ai pas du tout envie d’aller au Guatemala, mais disons…), ben je peux. Et si j’ai envie de sortir avec mes copines danser, de trop boire et de rentrer beaucoup trop tard et de finalement dormir jusqu’à midi, hein ? (Bon t’inquiètes, j’ai arrêté l’alcool depuis toi chéri !) Mais quand tu seras là, comment je pourrai faire tout ça ? Qui va s’occuper de toi ?
Et dis-moi… est-ce qu’après tout ça, je vais redevenir moi ? Non, parce que sérieusement… Non seulement mon corps change, mais en plus je me sens plus du tout moi ! J’ai même pas envie de boire un verre de rouge ! Un bordeaux ? Avec du fromage ? RIEN ! R.A.S. Où est passée la femme que j’étais ? Est-ce que mon mari aime cette nouvelle personne, qui va entamer un gonflage par étape en 6 mois ? (Oui, je tiens la balance en otage pour l’instant). De toute manière il a intérêt, sinon je pars avec toi (facile, t’es dans mon ventre !).
J’ai peur de perdre ma liberté géographique, physique et psychique après ton arrivée.
Alors j’ai un peu paniqué. Un peu, c’est sympa.
J’ai dû dormir avec mon doudou, j’ai pleuré toutes les larmes de mon corps et j’ai maudit ton papa parce qu’il n’était pas rentré dormir et je me répétais « voilà, ça commence comme ça, et quand j’aurai besoin de lui il ne sera pas là non plus ». Il a fallu que je reprenne mes esprits et que je me force à redevenir pragmatique (j’ai cette capacité encore 5 minutes par jours depuis que tu es dans mon ventre… merci !).
Et voici donc les conclusions de ma réflexion :
Premièrement, moi j’ai peur d’une chose que je ne connais pas (la maternité), mais c’est une chose concernant laquelle je peux m’informer ! Il y a plein de livres sur le sujet, et j’ai plein de mamans autour de moi pour me raconter, m’expliquer, me guider.
Te préciser que j’étais prévenue ! Ah oui, ça quand on t’a fabriqué, on savait bien que faire un bébé ça impliquait « aussi » de devenir parents, même si ce n’était que dans notre inconscient romantique.
Me réjouir ! Parce que ton papa et moi, on s’aime (oui c’est un peu niai… je sais), et que ce n’est pas le cas de tous les papas et les mamans. Nous, on sera tous les 3 dans ce bateau, ce qui assure une partie de liberté à chacun (un qui tend la voile et un qui tourne le gouvernail, et le troisième ben, il s’occupe !).
Donc si je synthétise, moi j’ai peur d’une chose que je ne connais pas mais par rapport à laquelle je possède toutes les informations nécessaires et les aides pour me débrouiller. Et ça ne peut pas être pire qu’un premier job, un diplôme universitaire à passer, etc…
Tandis que toi ! toi, mon pauvre ami, tu as de sacrées raisons de te faire du souci !
Oui je sais, c’est pas très sympa de mettre le poids du monde sur un pauvre bébé même pas encore né. Mais crois-moi, à ce stade de la grossesse, c’est très rassurant de savoir que je ne suis pas celle qui est dans la pire des positions, surtout si celui qui est dans la pire ne s’en rend pas compte et ne peut donc pas demander pitié. Donc tu m’en voudras pas trop. Je t’explique…
Toi, tu n’as rien demandé à personne pour être là où tu es maintenant, alors que nous, on savait ce qu’on faisait ! Toi, tu es en train de devenir un être humain à partir de deux cellules qu’on a fabriquées nous-même, et tu n’y peux rien ! Tu ne peux pas influencer ce processus, ni le modifier, ni le stopper. Tu es victime de nous pour l’instant ! De ce que je mange, de ce que je bois, de ce que je respire…
Et bonne nouvelle, ça va durer jusqu’à tes 18 ans !
En plus, tu grandis dans un espace restreint (les sales langues diront qu’il y a bien assez de place…), t’es tout coincé. Il fait tout nuit là où tu es, tu ne sais rien du monde qui t’entoure, tu n’as pas conscience de toi-même ! Tu ne sais pas quelle forme tu as, tu ne vois pas où tu es, tu entends des sons et tu distingues des lumières, mais tu ne sais pas si tu es dans quelque chose (si tu pouvais comprendre le concept de « chose ») ou si tu es dans quelqu’un (si tu pouvais comprendre le concept de « quelqu’un »). Ton cerveau ne te permet pas de te poser des questions. Tu n’as rien choisi, et tu ne maîtrises absolument rien. En fait, on t’a fabriqué à partir de rien (les nunuches te diront qu’il faut beaucoup d’amour, mais laisse-moi te dire mon enfant que si l’amour était une condition sine qua non pour faire des bébés, la terre tournerait mieux !).
Ah oui, et ce n’est pas tout ! Tu vas naître dans un monde sens dessus dessous ! Les gens y ont perdu le sens même de la nature… alors même que nous sommes (accroches-toi c’est un scoop !) nous-même des animaux ! Et oui, des mammifères, comme un chat ou une vache, un cochon, un ornithorynque (qui est le seul mammifère à pondre des œufs, j’espère que ça ne sera pas ton cas). Bref ce que je veux dire, c’est qu’ici tout est contrôlé. Ta conception a en quelque sorte été contrôlée. Après des années de contrôle on s’est dit « et si on faisait un enfant ? ». Bon, ça ne s’est pas passé comme ça, tu penses bien qu’avec moi, ça a pris beaucoup de réflexions pendant de longues années et de préparation mentale… Mais pour dire ! Dans le temps, tu aurais été le 10ème enfant de la famille… Mais là, tout est contrôlé. Il faut que la situation soit bonne, que le moment soit bon, que la santé soit bonne. D’ailleurs, depuis que tu es dans mon ventre, toi aussi tu es contrôlé ! Le médecin t’a déjà vu plein de fois, et a contrôlé plein de choses te concernant, et ce n’est pas encore terminé ! Avant même que tu aies conscience de toi-même, nous on sait déjà presque tout sur toi ! Et attends ! Quand tu seras grand, d’autres personnes vont te contrôler, pour savoir si tu as payé tes impôts, si tu n’es pas allé à l’école, avec qui tu traînes, si tes dents sont saines…
Alors que soyons clairs. Toi, tu n’as rien demandé de tout ça. Tu es là juste parce que ton papa et moi on avait envie d’un enfant. Désolé ! Trop tard ! C’est l’instinct « naturel »,… ou ce qu’il en reste.
Et c’est pas fini ! Parlons du jour où tu vas sortir de mon ventre (par la grande porte)
Là aussi je préfère être honnête. Pour l’instant, pour toi, c’est l’allégorie de la caverne de Platon pour toi. Tu sais qu’il y a un extérieur, mais tu n’as jamais vu personne s’y rendre, ni encore moins en revenir (tant mieux pour moi !). Qu’est-ce qu’il y a là dehors ? Est-ce que les bruits que tu entends viennent de là-bas ? Et la lumière ? Tu es bien ici en sécurité, alors pourquoi prendre le risque de sortir à part par curiosité ? Laisse-moi te dire pourquoi…
Et bien parce qu’un jour, quelque chose (la nature ?) va provoquer un effondrement total de ta caverne magique, et il va falloir que tu en sortes pour survivre (déjà un premier instinct naturel, de survie !) Et s’il te plait, la tête la première, comme les preux ! Et là alors, le pire t’attend mon petit. Toi qui n’a même pas conscience de ton existence, tu vas être attrapé par des mains inconnues recouvertes de gants en latex pleins de sang, et tu vas probablement (même si j’espère pas) voir pleins de gens autour de toi (oui ce sont d’autres personnes de ton espèce) avec des masques chirurgicaux. Ces gens vont te secouer jusqu’à ce que tu craches l’eau que tu as dans les poumons et que tu te mettes à respirer de l’air (oh oui, ça non plus tu ne connais pas) et que tu te mettes à pleurer (je pense que cette fois-ci on sera heureux de t’entendre pleurer, mais je te préviens, c’est la seule !). Ensuite, ils vont te poser sur moi, que tu ne connais pas, et tu vas-tu demande pourquoi tu as froid, qu’est-ce que c’est que tout ce tintouin autour de toi beaucoup plus fort qu’avant quand tu étais dans la caverne. Et ça, c’est dans le cas où tout se passe bien ! Si toi ou moi on est en danger pendant cette sortie de piste spectaculaire, il se peut que ça tourne au cauchemar.
D’autant plus que je veux pas te faire peur, mais pour sortir il faut passer par un tout petit trou (j’entends les voix qui me disent « plus pour longtemps » avec un rire de vieille sorcière juste après…). Et si tu es naturellement claustrophobe (comme ta mère), tu vas avoir mega peur. Mais rappelles-toi, ta caverne sera en train de s’effondrer, et il faudra choisir entre l’inconnu, ou la mort !
Après tout ça, tu penseras peut-être que tu seras sorti d’affaire. Ahah ! Mais ton papa et moi, on te couvrira de becs et on te dira plein de choses incompréhensibles en langue plus ou moins humaine, et toi, la seule chose que tu te demanderas, c’est pourquoi tu n’es plus relié à cette chose qui te donnait à manger constamment (en fait je me le demande moi aussi en ce moment, ça serait une invention géniale !). Tu connaîtras donc la faim, la soif, les maux de ventre, les désagréments du corps (ça gratte, ça pique, c’est quoi ce truc sur ma tête ?), la solitude, le sommeil,… bref, la vie sera moins cool que dans la caverne.
En conclusion à ces cinq points certes non exhaustifs mais dont je pense avoir relevé l’essentiel, je dirais que si tu n’es pas en harmonie avec toi-même (quel poids sur les épaules déjà si jeune, frappé par la dictature du bonheur), et que tu n’es pas de nature à aimer sortir de ta zone de confort, tu auras peur de tout dans ta vie, tout le temps, chaque fois que tu découvriras une nouvelle personne, un nouveau sentiment, une nouvelle sensation, une nouvelle forme, chose, etc…
Tu pleureras pour te plaindre, et on te collera un biberon dans le bec en pensant que tu as faim, alors que non, tu seras juste terrorisé par le monde qui t’entoure. En plus, on essaiera de te faire des grimaces pour te faire rire et toi, à moitié aveugle, tu n’y comprendras rien, et par la suite tu auras peur des clowns au cirque (comme ta maman).
Bref, tu vas avoir les boules.
Alors bon… ma conclusion est la suivante :
Après cette analyse, je n’ai pas trop le droit d’avoir peur de ce qui va m’arriver. Si tu avais à ta disposition des ouvrages tels que « Qu’est-ce qui m’attend dehors ? : guide de la vie en images » ou encore « comment naître sans douleur ? préparation à la sortie rapide et sûre », on serait sur un pied d’égalité. Mais ce n’est pas le cas et même si je te racontes toutes ces choses à travers mon ventre, force est de constater que tu n’y comprendrais rien, désolé !
Alors j’ai décidé de dire à ton papa qu’on n’était pas des poules mouillées.
On a décidé de te fabriquer et maintenant il faut qu’on assume !
On va passer le cap de ta naissance en se disant que celui qui a le plus besoin de soutien, c’est toi. Qu’il faut qu’on t’accueille dans le bonheur et la joie et l’amour de notre famille et qu’on soit là pour te rassurer chaque moments et jours de ta vie. Après tout, on sera la base de toutes tes souffrances et peines futures, parce qu’on a décidé de te fabriquer. E
t on l’a fait uniquement par instinct naturel.
Alors ne t’inquiètes pas, on va te donner toutes les cartes pour qu’on soit aussi pour toi une source de joie, d’amour et de plaisir dans la vie malgré toutes ces souffrances et ces inconnues, parce que au final, ça en vaut la peine ! Et tu sais quoi ? Tu finiras même par aimer !
Bon, finalement, je t’aime déjà, et si jamais, je te prendrai avec moi au Guatemala !
Bonne chance pour ta vie mon petit lapin,
Ta maman
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Carole dit
Tu m’as juste fait pleurer de rire et pleurer d’émotions ! Ton petit loulou ne va pas s’ennuyer, je lui souhaite de te lire (peut-être le jour où il t’annoncera qu’à son tour il s’est reproduit), bref BEAUCOUP DE BONHEUUUUR !
Et merci 🙂
Caro dit
Bonjour, je suis en début de grossesse également, situation stable aussi avec diplome, boulot, maison, nombreux voyages et un mari que j’aime. J’ai peur aussi de perdre, non pas ma liberté, mais cette capacité à faire les choses sur un coup de tête. J’ai l’intention de voyager avec bébé (ça demandera plus d’organisation et certains sacrifices mais cela semble faisable) mais fini par contre le ciné ou la sortie improvisés. Bébé peut également changer les plans parce qu’il est malade ou en inconfort. Mais je ne paniquais pas autant jusqu’à lecture de cette lettre lol
Je me rassure en étant persuadée (oui c’est peut-être l’égo, ou l’instinct j’espère 😉 ) que je serai une bonne mère. Alors ça ne veut pas dire que je ne ferai pas d’erreur mais je sais, au fond de moi, que je serai cette mère suffisamment bonne de Winnicott (je suis psy alors bon) soutenue par un futur papa, certe impatient et colérique, mais merveilleux!
Pour vous, c’est pareil! Si aujourd’hui, malgré votre panique, vous êtes capable de prendre ces « 5minutes de recul par jour », vous êtes déjà en train de devenir cette mère suffisamment bonne, celle qui répondra aux besoins de son enfant même si cela demandera un petit ajustement. Votre liberté sera différente car un petit être dépendant de vous sera là! Mais vous verrez, vous serez créatifs et trouverez le bon équilibre! Pleins de bonnes choses pour vous dans cette stressante et magnifique aventure, celle bien plus forte que tous les diplomes et tous les voyages à ce qu’on dit 😉