Après un long parcours PMA, Lilly était enfin enceinte. Mais elle a vécu sa grossesse avec beaucoup d’angoisse, à cause de la perte de l’un de ses bébés. Et puis son accouchement ne s’est pas du tout bien déroulé à comme d’un hématome rétroplacentaire qui lui a causé une très forte hémorragie.
{Témoignage} Notre parcours pour devenir parents
Bonjour,
Moi c’est Lilly. J’ai témoigné ici déjà deux fois à propos de notre parcours pour avoir un enfant. Il m’a fallu plus d’un an pour reprendre la plume ou du moins sauter le pas pour écrire notre histoire. Pourtant notre histoire est heureuse car nous sommes depuis des parents comblés ! Oui ! Après presque trois ans de traitements, 6 inséminations et une FIV nous avons vu naître en novembre 2018 l’amour de notre vie : notre fille adorée.
Je me disais que peut-être notre parcours pourrait aider certaines personnes et donner du courage et de l’espoir à d’autres.
La dernière fois, j’avais écrit à la Mariée en Colère une semaine avant la ponction ovarienne en vue de notre première FIV.
La ponction s’est bien passée, accueil à la clinique top et professionnel, petit dodo et réveil plus ou moins brumeux. La sage-femme vient dans ma chambre deux heures après et m’annonce : « Super ponction ! Le biologiste va vous appeler d’ici trois jours pour vous donner des nouvelles et enfin le matin du 5ème jour il vous dira combien de blastocytes on pourra transférer. Reposez-vous on est sur la bonne voie ! ».
Je me souviens encore de ce que j’ai ressenti quand elle m’a dit ça : une implosion de joie sitôt retenue pas un rappel à l’ordre mental : « calme toi, calme-toi stp ! Essaie de ne pas te faire trop d’espoirs mais surtout ne te dis pas que ça ne va pas marcher non plus sinon, c’est sûr, ça va foirer ! ». En gros une lutte intérieure sur comment appréhender cette phase terriblement longue d’attente qui commence.
L’attente après le transfert
Au matin du 5ème jour (celui du transfert) on m’annonce qu’il y a trois blastocytes. On prend la décision d’en transférer deux et de voir comment évolue le troisième qui était un peu à la traîne et de le congeler si tout va bien. Avec mon mari nous étions je pense un peu déconnectés. Comme si nous vivions un peu hors du temps. On décide d’être positifs, de nous accorder du temps à nous et de penser au jour le jour.
Facile à dire, mais beaucoup moins à faire ! Presque pas une minute ne passait sans que je me demande si les petits pois s’accrochaient bien, si je ne faisais pas des choses qui pourraient leur nuire. Ces deux semaines avant la prise de sang furent tellement longues ! Et là vient le jour fatidique, je vais au labo dès l’ouverture, je ne tiens plus, je check mon téléphone toutes les minutes pour voir si les résultats ne sont pas dispos et d’un coup ils sont là ! Je suis tellement stressée mais j’ai tellement envie de savoir, j’ouvre, je regarde le chiffre, je vois 146. Quoi 146 ?! Je fonds en larmes : je suis enceinte. Je l’annonce dans la foulée à mon mari. Pas le temps de prévoir une mise en scène, un cadeau, une idée originale… non je me précipite, il faut qu’il sache aussi le plus rapidement possible ! Il pleure, nous sommes tellement heureux. On rationnalise quand même, « il faut voir comment ça évolue », on croise les doigts après chaque prise de sang pour contrôler l’évolution et tout va bien !
Vient enfin le moment de la première écho, on ne voit pas grand-chose c’est très tôt. Deuxième écho, la gynéco nous annonce qu’il y a deux bébés !
Des jumeaux ?!
Mais elle n’est pas aussi enthousiaste que nous. Elle nous dit qu’un des embryons ne s’est pas autant développé qu’il aurait dû. Qu’il ne faut pas se faire trop d’espoirs, il n’est pas viable. Il va cesser de se développer. L’autre embryon quant à lui est parfait et il faut qu’on se concentre sur lui.
Je suis un peu abasourdie, j’avais, je pense, au fond de moi l’espoir inconscient d’avoir des jumeaux. J’étais tellement heureuse pendant quelques secondes mais ce bonheur m’a été repris aussitôt. Au fond de moi j’espère quand même qu’il s’accrochera. Je leur parle chaque jour des trois semaines qui nous séparent de la prochaine écho.
J’entre alors dans une spirale d’angoisses : « et si je faisais quelque chose qui leur ferait du mal ou qui mettrait à terme à la grossesse ? », « Et si il y avait un problème, une malformation ? ». J’avais déjà ces peurs en moi mais elles sont devenues plus importantes au fur et à mesure de la grossesse.
A l’écho suivante, on voit que ce petit embryon en retard avait continué à évoluer mais que le petit cœur avait cessé de battre.
J’ai perdu un de mes bébés
Je suis bouleversée mais j’essaie de m’accorder du bonheur pour ce petit être qui, lui, continue de grandir en moi. Je me sens coupable même si je sais pertinemment que je n’y suis pour rien.
Je m’enfonce alors encore plus dans mes obsessions liées aux bactéries / maladies / à la propreté et mes angoisses prennent de plus en plus de place.
Tellement de place que bien que la grossesse se soit finalement passée sans réelle complication notre couple, lui, a été au bord de la rupture. Alors que nous avions traversé toutes ces épreuves ensemble en restant unis et forts (l’annonce de sa stérilité, l’appel au don de sperme, les échecs des inséminations) nous nous sommes déchirés. Car mes angoisses contrôlaient nos vies et mon mari n’arrivait plus à le supporter et ne comprenait pas. J’essayais de lutter mais c’était tellement difficile. Nous avons fait des efforts, j’ai vu une psy, je me suis fait violence mais j’avais tellement peur de faire du mal à ce bébé que j’aimais déjà du plus profond de mon âme.
Vient alors le jour du terme, visite de contrôle le matin : RAS même si l’échographe me fait horriblement mal.
Rdv dans 48h pour voir comment ça évolue.
Dans l’après-midi je perds un peu de sang, du « vieux sang ». Je me rappelle alors des cours de préparation à l’accouchement : « après un examen il peut arriver de saigner un peu comme ça mais il n’y a pas lieu de s’alarmer ». OK, je me dis que c’est normal. Puis le soir j’ai mal, très mal mais pas de contractions. D’un coup je sens un plop. Je me lève et se déverse un flot de sang rouge vif ; tellement mais tellement de sang !
Je fais une hémorragie
Je demande à mon mari d’appeler le SAMU, il ne réalise pas ce qui se passe et est un peu dépassé, je prends le téléphone et leur dit qu’il y a un souci, un gros souci. La régulatrice me dit que j’ai perdu les eaux. Je lui rétorque que non, ce n’est pas une rupture de la poche, que non elles ne sont pas teintées, que non ce n’est pas qu’un peu de sang, je suis certaine de moi : il faut faire vite. Je m’allonge dans mon sang, relève les jambes pendant que le médecin que j’ai enfin au téléphone me dit qu’il m’envoie les secours. Il se veut rassurant mais je sais qu’il le fait pour que je ne me laisse pas aller et que je m’accroche. Je dis à mon mari, qui ne réalise toujours pas, d’aller accueillir les pompiers pour gagner du temps. Ils arrivent, me prennent en charge et me conduisent en toute hâte à la maternité. Ils sont silencieux : je sais ce que ça veut dire, c’est grave. Arrivée à la maternité 6 personnes m’attendent, on me déshabille, me pique, me fait une écho, un doppler, on me pose plein de questions en même temps et je réponds en essayant de garder autant que je le peux la tête froide :
Césarienne d’urgence pas de temps à perdre
Mon mari a eu à peine le temps d’arriver avant que je ne sois emmenée au bloc. Les gens sont tendus, l’anesthésiste pas agréable. Elle me pique 5 fois pour une rachianesthésie, en me criant dessus que si ça ne passe pas cette fois on m’endort complètement, elle réussi enfin. Quatre personnes je jettent sur moi, elles ne parlent pas, je sens qu’on met au monde ma petite fille, on me la montre quelques secondes en baissant le champs opératoire et elle est emmenée. Elle ne pleure pas, je demande comment elle va on me dit que ça va aller de me détendre mais impossible. Après quelques minutes je l’entends alors pleurer au loin, je tourne la tête et vois que mon mari est à côté d’elle et enfin je m’autorise à me laisser aller, je pleure, j’ai peur, j’angoisse et je tremble, je tremble tellement.
J’apprends après par l’obstétricien que j’ai fait un hématome rétroplacentaire. Une complication très grave et que ma fille et moi avons eu beaucoup de chance de ne pas y succomber.
Ma fille est emmenée en réanimation, elle a inhalé des liquides et a besoin d’oxygène pour l’aider à respirer. Nous serons séparées pendant trois jours, je n’ai pu la toucher qu’au deuxième jour.
Mauvaise expérience avec les puéricultrices qui sont froides et débordées. Les sages-femmes débordées aussi sont quant à elles plus attentionnées et disponibles. On découvre cette nouvelle vie à trois et on se laisse emportés par l’amour de ce petit être. Tout n’est pas oublié en un instant, il faut du temps pour arriver à appréhender, digérer et avoir du recul sur les évènements.
Il nous a fallu plusieurs mois pour que notre couple retrouve une certaine stabilité mais que quelques minutes pour que l’on soit une famille.
Mais tout cela fait maintenant partie de notre histoire, de souvenirs qui remontent de temps en temps mais qui font de moins en moins mal. L’important est que nous allons bien, que notre fille vient de souffler sa première bougie (même si techniquement c’est nous qui avons soufflé :p), qu’elle soit en bonne santé. Elle est drôle, espiègle, parfaite en toute objectivité bien entendu et elle nous comble de bonheur. Elle a fait de nous des parents, ses parents.
Maintenant que je suis redevenue moi après des années de traitements et une grossesse, je me rends compte que tout cela en valait le coup et qu’au final ce que l’on retient c’est l’amour.
Je ne sais pas si il y a une morale à tirer de notre parcours, probablement pas, mais je tiens à dire à toutes et à tous que ce qui importe c’est de : parler, croire, s’accorder du temps, se pardonner, se mettre à la place de l’autre, être forts quand c’est nécessaire et savoir se laisser aller quand il le faut également.
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Wendy Fizanne dit
J’ai vécu deux expériences comme la tienne. La première a été la flaque de sang, je me suis juste levée pour aller me faire du thé et splatch flaque de sang. J’ai eu très très peur. Pareil que toi, pompier, maternité et… et m’a laissé repartir chez moi… oui, oui, on m’a dit que c’était le col qui travaillait. Grace à je ne sais pas quel dieu, mon fils n’a rien eu parce qu’au final c’était un HRP, j’ai accouché le lendemain et le placenta est sorti juste derrière mon fils. Le gynéco a juste dit « oh, il y avait un décollement du placenta. » Voilà, rien de plus, aurevoir.
Sauf qu’à ma troisième grossesse c’est parti en cacahuète complet. Douleur à m’en tordre, comme des contractions. Ma belle mère m’amène à la maternité, le rythme cardiaque de bébé qui décélère dangereusement, on me prépare pour la césarienne puis finalement non il reprend. On me prépare pour un déclenchement, ils posent la péridurale (je suis sure qu’à ce moment-là ils savaient déjà ce qui allait se passer) et d’un coup ploc la poche des eaux qui se romps et le méconium qui vient avec. Le cœur de bébé qui remonte pas. Code rouge, césarienne immédiate. On ne me dit rien, absolument rien de ce qui se passe. Au point où je suis restée 1h30 sur la table d’opération, sans voir mon bébé, sans savoir qu’il était parti en réa parce qu’il ne respirait pas, sans savoir que j’étais en train de faire une hémorragie et à me faire engueuler parce que j’avais des caillots dans l’utérus et que j’étais grosse.
C’est dans un compte rendu de l’hôpital où mon fils a été transféré en réa que j’ai appris le mot « hématome récto placentaire. » C’est mon médecin traitant qui m’a appris la gravité de ce qui c’était passé. Mon fils a failli y passé, il n’a pas respiré pendant cinq minutes avant de réussir à le réanimer. Et moi je me vidais de mon sang, et personne ne m’a transfusé malgré de taux catastrophique d’hémoglobine.
C’est ce même médecin traitant qui m’a fait des analyses qui a aidé à trouvé le cause du probléme (qui au final est un probléme de coagulation). Et c’est avec ce même médecin traitant que j’ai compris que ce qui c’était passé à mon deuxième accouchement n’était pas juste un « décollement » mais un autre hématome qui aurait pu être catastrophique !
Je sais combien c’est compliqué de se remettre de cet événement. J’ai eu un « syndrome du survivant » après la naissance de mon fils. Et quand j’ai voulu un autre enfant, j’ai déclenché une crise de peur à l’accouchement car tout est revenu d’un coup (évidemment, j’ai été suivi pendant la grossesse pour ne pas refaire un hématome et j’ai été déclenché avant le stade où j’ai fait le dernier HRP). Encore aujourd’hui, l’anniversaire de mon fils est compliqué car c’est aussi l’anniversaire où j’ai failli le perdre.
N’hésite pas à en parler à une bonne psychologue ça m’a personnellement fait énormément de bien.