Vous connaissez peut-être les bijouteries Franck Gef, vous connaissez à coup sûr (si vous êtes lectrice régulière du blog) le salon de l’alliance, alors aujourd’hui je vous propose de découvrir la créatrice et PDG de ces deux entités : Hanna MECHALY. Parce que c’est une femme inspirante, autant de par son parcours que de par ses idées novatrices, parce que j’ai eu la chance de pouvoir la rencontrer et que j’ai été touchée par sa manière humaine de manager et parce qu’une femme dirigeante et maman est un modèle de réussite, tout simplement.
Pouvez-vous nous parler de votre parcours, de fille de bijoutier à gérante de start-up ?
Mon père et mon grand-père étaient tous les deux bijoutiers, et parmi les 5 enfants à avoir eu envie de reprendre leur affaire, j’ai été la seule à en exprimer le souhait. Cependant mon papa ne voulait pas que je devienne bijoutière, il a tout fait pour que je change d’avis, car c’est un métier vraiment dangereux. J’ai vécu mon premier braquage alors que je n’avais que 19 ans ! Mais sa réticence venait aussi du fait que c’est un métier d’hommes. Je ne me suis quand même pas laissée décourager, j’ai fait toutes les études qu’il fallait faire et j’ai acheté ma première bijouterie à mes 28 ans. Rien n’a été facile, on m’a mis beaucoup de bâtons dans les roues. Les commerciaux (en grande majorité des hommes) ne me prenaient pas au sérieux, les autres bijoutiers ont essayé de me boycotter en menaçant mes fournisseurs pour ne pas qu’ils m’approvisionnent, je subissais des remarques sexistes du style « où est votre directeur ? les femmes ne savent pas calculer »… il a fallu montrer les crocs (et des lettres d’avocats) plus d’une fois mais je n’ai rien lâché, j’ai cru en moi et 5 ans plus tard, les affaires de ma première bijouterie étant florissantes, je rachetais également les différents commerces de mes parents.
Comment vous est venue l’idée de créer le salon de l’alliance ?
Le business fonctionnait très bien et puis au bout d’une dizaine d’années, il y a eu la crise boursière. L’industrie du luxe a très sévèrement été touchée, il a donc fallut repenser notre business model. En 2015, j’ai créé mon premier « mini salon de l’alliance », au sein même de l’une de mes bijouterie avec cette offre qui est restée : 1 alliance achetée = 1 alliance offerte. A l’inverse d’une bijouterie classique, on rognait sur notre marge pour jouer sur la quantité. Ça a très bien fonctionné et j’ai décidé de louer ma première salle pour organiser mon premier « vrai » salon très peu de temps après. Mais encore une fois il a fallu se faire une place. On ne me prenait pas au sérieux, beaucoup d’organisateurs de salons pensaient que ça ne fonctionnerai pas et j’ai rapidement fait un grand tri dans mes partenaires pour ne garder que ceux qui me respectaient.
Notre positionnement est vraiment différent, nous n’avons rien à voir avec les bijoutiers classiques, commerçants des villes. Il y a 480 000 alliances vendues en France chaque année et notre but est d’avoir une stratégie marketing et de communication unique. On ne prend pas les clients des bijoutiers joailliers, au contraire, on ramène du monde en ville grâce à nos évènements. L’an dernier nous avons organisé 45 salons en France et Belgique et 25 000 mariés nous ont fait confiance. Je suis heureuse de voir nos couples aussi heureux grâce à un concept que j’ai imaginé. J’ai vraiment le souhait de leur proposer des bijoux de mariage de qualité avec un vrai SAV, c’est ce qui fait toute la différence.
En quoi le challenge de devenir PDG est-il différent pour une femme que pour une homme ?
Je ne suis jamais allée demander de crédits aux banques car je savais que ce serait très compliqué. Je me suis auto-financée avec mes salons, tout simplement. Dans les mentalités, une femme qui plus est maman ne peut pas être à 100% dans le lancement de son entreprise, hors c’est totalement faux. J’ai tout fait moi-même, heureusement que mon mari à été présent pour assumer les taches quotidiennes et l’éducation des enfants, c’est ça qui est important : la répartition des tâches. Mais à aucun moment une femme est moins compétente qu’un homme, il ne faut pas se laisser décrédibiliser par ces pensées populaires qui sont un vrai frein à l’entrepreneuriat féminin.
En tant que femme on nous discrédite souvent, on nous prend pour des faibles parce qu’on n’est pas toujours dans l’autorité. Combien de fois n’ai-je pas été prise au sérieux car je suis gentille ? Mais je fais partie de celles qui ne confondent pas gentillesse et faiblesse, je sais rappeler à l’ordre quand je ne me sens pas respectée. Il ne faut surtout pas se laisser marcher sur les pieds, mais on n’a pas besoin non plus d’être cassante ou agressive pour être crédible. Le comportement des interlocuteurs s’adapte énormément en fonction du sexe de la personne à laquelle ils s’adressent. Quand c’est un homme on fait des courbettes, on respecte, alors que quand c’est une femme, on prend les choses moins au sérieux. J’ai beaucoup subi cette discrimination quand j’étais jeune, mais aujourd’hui cela ne m’atteint plus, même quand cela arrive malheureusement encore. J’ai appris à m’imposer et à recadrer lorsque c’est nécessaire.
Êtes-vous engagée pour les femmes ?
Je me rends compte des années après que je l’ai toujours été, même inconsciemment. Sur une vingtaine d’employé·e·s, notre entreprise est composée d’une quinzaine de femmes pour 5 hommes. Je le fais « naturellement » sans pour autant le revendiquer. Je préfère choisir mes collaborateur·ice·s pour leur ouverture d’esprit et leurs compétences que par rapport à leur sexe. Mais il est certain que dans l’avenir je souhaite aider les femmes à oser l’entrepreneuriat. Les aider voire les accompagner pour aller négocier avec les banques et puis les soutenir, pour qu’elles croient en elles et réalisent leurs rêves.
Mais aujourd’hui l’urgence est de gérer un fléau qui touche tous les dirigeants d’entreprise : celui des faux commentaires sur Internet. Je suis en train de créer une association de défense des commerçants car le business des faux avis est très florissant, c’est affreux ! On a eu affaire il n’y a pas longtemps à une jeune femme qui laissait de faux avis pour ensuite demander des réductions. En contrepartie elle proposait d’enlever son mauvais commentaire… sans compter toutes les entreprises qui « vendent » leurs services. Ces gens là ne se rendent pas compte que des retours négatifs et injustes peuvent vraiment être durs à encaisser et surtout avoir un réel impact sur notre business. Alors pour l’instant je vais me pencher sur cette injustice en priorité, car nous sommes très nombreux à en faire les frais.
Quels conseils donneriez-vous aux femmes qui souhaitent créer et lancer leur entreprise ?
Ne vous laissez pas intimider. Vous pouvez échouer parce que le marché n’est pas prêt, parce que votre idée n’est pas aboutie ou pour plein de raisons différentes mais JAMAIS vous ne devez laisser les autres vous dicter ce que vous avez à faire. Ne pas oser car des personnes externes vous en ont dissuadé serait le plus gros échec.
Et puis restez positive. Dans l’adversité, prenez le temps de réfléchir aux meilleurs choix stratégiques, soyez sûre de vous. Positionnez-vous comme une femme forte et surtout ne vous laissez pas décrédibiliser par ceux qui un jour vous jalouseront ou viendront vous tourner autour pour pouvoir s’associer à votre business.
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