ThreeBirds est venue nous raconter son histoire, leur histoire, celle de son avortement. Elle a, au début, eu l’impression qu’elle n’avait pas le choix, que son mari était seul à décider, puis elle a réfléchi pour prendre, ce qui lui paraissait être la meilleure décision. Voici son témoignage. Merci d’avoir eu le courage de le partager avec nous, il aidera de nombreuses femmes <3
{Témoignage} Avortement : Mon corps, son choix
Bonjour à toutes et à tous,
Comme beaucoup, j’ai hésité. J’ai lancé le blog pour écrire puis l’ai refermé cent fois. Je me suis mainte fois promis que le lendemain était le bon jour : le jour où les mots allaient enfin être posés et mon histoire vivante pour toujours à travers vos yeux.
Le but est de montrer une autre facette de l’IVG…
Petite présentation : j’ai 32 ans, je suis en couple depuis 12 ans, j’ai deux enfants de 6 et 4 ans, une maison de quatre chambres avec jardin et un métier prenant mais qui me plaît.
Été 2020, nous sommes déconfinés et nous partons en vacances à la montagne. C’est idyllique. Tout va bien dans le meilleur des mondes. Et puis au retour, surprise, pas de règles. Une confirmation que mon stérilet s’est fait la malle et un test de grossesse plus tard, le couperet tombe : je suis enceinte.
Un peu sonnée mais déterminée à transformer cette surprise en bonne nouvelle, je l’annonce à Monsieur. Bon ben forcément si je témoigne c’est que ce n’était pas perçu de la même façon par lui.
Il a très vite paniqué : nous n’allions pas nous en sortir financièrement, nous allions nous replonger dans des années galères alors que les enfants étaient enfin autonomes, il allait devoir transformer son bureau en chambre, nous allions devoir dire adieu à notre confort de vie… Tout un tas d’arguments irrecevables pour moi puisqu’un chouïa exagéré par la mauvaise conseillère qu’est la peur.
Puis le mot a été lâché. « IVG y as tu pensé ? «
Non, la réponse est non.
Je n’y avais jamais pensé. Puisque je suis dans un couple stable empli d’amour et de respect, puisque j’ai 4 chambres, puisque nous travaillons tous les deux, puisque c’est un futur mini nous, je ne l’avais même pas envisagé.
Il faut savoir que dans mon couple je suis l’optimiste et lui le pessimiste. Nous avons pour habitude d’être complémentaires mais là il n’y avait pas de solution intermédiaire, pas de solution grise face à ma réponse blanche et sa réponse noire.
Je voulais poursuivre la grossesse. Lui non.
Deux lignes parallèles qui ne se rejoignent jamais. Nous avons passés des soirées entières à pleurer ensemble, à discuter, à expliquer nos arguments, à débattre. Nous ne voulions pas nous faire du mal mais chacun restait campé sur ses positions. Nous avons vu une sage-femme, une conseillère conjugale, et pour finir la psychologue. Les professionnels étaient pris au dépourvu face à nos mal êtres respectifs. Ils semblaient se noyer autant que nous.
On a fini par me dire de fixer une date d’interruption de grossesse pour que notre torture psychologique ait une date de fin. Soit je prenais le cachet soit on poursuivait la grossesse mais au moins c’était décidé. Dans cette phase d’attente, Monsieur, me sentant de plus en plus réticente, a commencé à avoir des mots cruels pour me faire réagir, à appuyer là où ça fait mal pour que je me rallie à son avis devant sa détresse.
Les semaines avant la date se sont transformées en jours puis en heures.
Je me suis retrouvée sur le parking, coincée dans ma voiture, paralysée par le choix qui devait être fait, que JE devais faire.
« Mon corps, mon choix »
C’est ce que je scandais avant parce que c’est tellement important. Mais comment cela pouvait il être MON choix puisque cela allait impacter toute ma famille ? Soit je gardais la grossesse et ma famille implosait avec pertes et fracas soit je l’interrompais et j’implosais avec pertes et fracas.
Et puis j’ai appelé le centre hospitalier depuis ma voiture parce que je ne voulais pas paraître malpolie à être en retard alors que j’étais là (merci maman de mon éducation !). Et puis je suis tombée sur un ange : je vais l’appeler Céleste pour la préserver.
Elle m’a écoutée elle est venue me chercher dans la voiture pour discuter. Céleste m’a tenue la main et enlacée quand je lui ai raconté mon histoire.
Elle a bravé la Covid pour littéralement que je ne sois pas seule (Monsieur était en route pour l’école). Elle a eu une phrase qui a tout changé : « Un enfant c’est un engagement d’une vie« . Et là, la révélation. Je ne devais pas choisir pour moi mais pour sa vie future à lui.
Qui étais-je pour imposer à un enfant un père qui ne veut pas de lui ?
Ce n’est pas le début d’une histoire avec de bonnes bases. Un enfant se décide à deux. Bien sûr on peut grandir sans père, mais comment faire pour qu’il ne pense pas être responsable de l’éclatement de sa propre famille par sa seule existence ?
J’ai pensé à lui, uniquement à lui.
Et je me suis dit qu’aussi courte que son existence ait été elle aura été emplie de mon amour pour lui.
Et je les ai laissés me l’enlever.
J’en crève rien que de l’écrire, je m’en veux tous les jours mais je ne regrette pas. C’était un acte d’amour d’une mère envers son futur enfant. J’ai voulu le protéger et je pense l’avoir fait.
J’ai et j’aurai toujours 3 enfants, qui depuis sont tatoués sur mon corps.
Alors oui avoir 32 ans, une vie stable et une maison assez grande ne fait pas tout et ne protège pas de devoir un jour faire une IVG.
Ne me jugez pas, je le fais déjà chaque jour. Je le vis véritablement comme un deuil et je crois que c’en est un.
Cette histoire m’a changée à jamais et je fais tout pour que cela soit en mieux, que cela ait servi à quelque chose comme on dit.
Et si au moins cela aide une d’entre vous à se sentir plus en paix avec sa décision quelle qu’elle soit, alors ce sera un peu le cas…
Vous souhaitez publier votre histoire sur le blog ? Déposez votre témoignage mariage ou témoignage maternité ici.
Gwen dit
J’ai venu plus ou moins la même chose, on venait d’acheter la maison, marié depuis un an, en couple depuis 4, je me suis rendu compte que nous avions oublié la contraception un moment à risque, j’en fais part à mon mari qui ne s’inquiète pas. Puis au final 10jours plus tard le verdict tombe. Il ne me laisse pas le choix on ne le garde pas. Mais moi, ça fait déjà 2 ans et demi que je lui parle de mon envie d’avoir un enfant, il sait qu’étant jeune j’ai dû faire une ivg car à 18 ans je ne me sentais pas capable d’être mère mais que j’en souffre toujours aujourd’hui. Pourtant les discussions passent mais rien n’évolue, il reste campé sur ces positions … et moi j’en souffre. J’ai eu un père absent, j’ai peur que mon enfant est également à vivre ça. A ce moment là je vois également qu’il fait des recherches pour connaître ces recours si je décide de garder l’enfant pour m’obliger à ne pas le garder justement. Et là c’est la goutte de trop. C’est décidé je ne me garderai pas. Mais j’ai l’impression que je ne pourrais jamais me le pardonnera ça fait un an et demi maintenant et là douleur est toujours la même si je sais que c’était la meilleure décision pour mon enfant.
Louise dit
Merci pour avoir écrit votre histoire qui pourrait être mienne.
Tout comme vous, je suis mariée et j’ai deux beaux enfants, une fille de quatre et une autre de deux ans. Une grande maison de 4 chambres également et un travail qui me plait.
J’ai maintenant 43 ans et mon mari 64, eh oui 20 ans d’écart. Je suis tombée enceinte tout comme vous à l’aube de mes 43 ans en aout 2020. Je m’en suis aperçue début septembre et vu l’âge de mon mari, il en voulait pas. Moi aussi, j’ai vu la psy, mon médecin traitant. Je ne voulais pas avorter mais mon mari a insisté très lourdement pour cette ivg. En début de grossesse, on est très fragile psychologiquement et du coup on se laisse influencer sur nos choix qu’étaient les nôtres au départ.
Moi aussi le jour J je n’arrivais pas à prendre ces cachets qui stoppe la grossesse. J’en ai pleuré très longuement dans la voiture sur le parking.
J’ai pensé à mon mari et pas assez à ce petit être.
Je m’en veux, j’ai beaucoup de tristesse en moi et maintenant j’en veux à mon mari. Les hommes ne comprennent pas notre douleur. Eux ne souffrent pas comme nous et nous subissons ce traumatisme de la perte de notre enfant sur le long terme.
Mon mari m’a dit tu vas voir, la vie va reprendre son cours comme avant mais tout cela est faux. Rien n’est plus comme avant puisque je n’ai plus envie de rien. Tout me parait fade. Juste mes deux enfants sont là et me permettent d’avoir la tête hors de l’eau.
Je vous souhaite beaucoup de courage pour que traverser cette épreuve.
ThreeBirds dit
Le temps apaise mais ne guérit pas » chaque anniversaire » d’un élément du parcours est compliqué.
Il faut rebondir et ce qui m’aide c’est de faire des choses que je n’aurais jamais fait sans la présence même fugace de ce petit être pour me pousser à me dépasser.
Merci d’avoir écrit je me sens encore moins seule dans ce tourment.❤️
Dede dit
Bonjour , il m’arrive également la même chose mais je suis à 11 sa et j’ai rdv jeudi prochain pour un ivg .
Mais au fond de moi je le veut ce bébé mon mari non et il ne veut même pas m’accompagner.
Je suis perdu et ce petit bébé je l’aime déjà, je pence ne pas pouvoir lui pardonner et me le pardonner derrière, j’ai 28 ans et j’ai perdu mes 2 parents il ne me reste plus que ma petite sœur.
Je pence que si je me fait avorter ce sera un deuil peut être insurmontable pour moi .
On me dit que je suis égoïste, je me sens incomprise puis on me dit plus tard tu en aura un 3 ème mais pas la .mais il ne comprennent pas que si jhote la vie aujourd’hui ce n’est pas pour en refaire un dans 3 ans .
mariegerman2 dit
Bonjour et merci !
Merci pour ce témoignage qui a du vous demander beaucoup de courage à écrire. En effet, on ne pense pas à ce genre de situation quand on parle d’IVG mais cela peut malheureusement arriver. Bravo à cette dame de l’Hôpital pour avoir été douce et à l’écoute avec vous.
Courage et prenez soin de vous.
Amélie dit
Quel témoignage…on a pas l’habitude de le lire avec cet angle…
Comment cela s’est il passé par la suite avec votre conjoint ? Avez vous réussi à surmonter ça ?
Hanna dit
Whouah…je n’avais jamais envisagé qu’on puisse prendre cette décision sous cet angle là mais c’est tellement mûr,tellement réfléchi et tellement beau pour ce bébé qui aurait peut-être souffert d’arriver dans ce contexte.
Vous n’avez pas seulement pensé à votre couple,vous avez pensé à tout le monde au final:ce bébé qui n’a pas eu à porter le poids d’une arrivée lourde de conséquences,votre mari qui a dû se sentir entendu en tant que père de famille et mari et indirectement vos deux autres enfants qui n’ont pas eu à subir ce chamboulement,car clairement ça aurait été un chamboulement pour eux aussi
J’admire tellement ce témoignage!
Charlotte Le Tortorec dit
Merci de nous avoir partagé votre histoire.
Tu es une femme forte er personne ne doit te juger de tes choix.
Bon courage pour cette année à venir. J’espère que malgré vos différences sur ce sujet ton epoux est bien présent pour taider à vivre ton deuil.
Bon courage et merci encore
Charlotte.
Meloo dit
Merci pour ce témoignage qui résonne en moi et me fait verser quelques larmes. Notre histoire n’est pas la même mais nos ressentis ce rejoignent. J’ai eu recours à une IVG il y a 2 mois. Ce bébé car malgré ce que les gens disent oui c’est un bébé, un petit être en devenir à qui on donne tant d’amour en si peu de temps, j’aurais adoré l’avoir mais mon souhait n’était pas partagé. Et comme vous le dites si bien, ce n’est pas le début d’une histoire avec de bonnes bases. Un enfant se décide à deux. Au début, j’ai pensé avoir sauvé mon couple plutôt que ce bébé mais au final je me rend compte que j’ai choisi les deux. J’ai préservé mon couple et j’ai épargné à ce bébé une vie avec un père qui ne l’aurait pas désiré de tout son être ce qui aurait sans doute sonné la fin d’une vie de famille rêvé. Prenez soin de vous et n’ayez pas peur de parler de votre ressenti avec votre mari.