Mathilde ne s’attendait pas à ce que son enfant vienne au monde dans l’urgence et la panique. Un accouchement catastrophe dont la jeune maman a eu beaucoup de mal à se remettre autant physiquement que psychologiquement. Elle souhaite aujourd’hui témoigner parce qu’elle aurait aimé qu’on la mette en garde avant, de ce qui pouvait se passer après. Voici son témoignage.
{Témoignage} Je n’ai pas été mère quand j’ai eu mon bébé dans les bras mais j’ai appris à le devenir
Février 2012, un retard de règle de 3 jours et pourtant je prenais la pilule. Le verdict tombe, les 2 petites bandes se colorent sur le test de grossesse. C’est les jambes tremblantes que je sors de la salle de bain. Je savais que notre vie allait changer. Nous étions dans notre 22eme année, et ma dernière année d’école mais nous étions toutefois sereins et remplis d’émotion à l’idée de devenir parents. Certes nous habitions a Nancy, étions loin de nos familles respectives mais cela ne nous faisait pas peur.
Une grossesse de rêve, aucun souci à l’horizon. Les mois défilèrent à grandes vitesses, nous étions prêts à accueillir notre petit garçon.
A quelques semaines du terme, la maternité m’a fortement conseillée de participer aux cours de préparation à l’accouchement. Surtout pour le 1er enfant… Nous avions évoqué quelques sujets sur les différents positionnements du bébé, toute la procédure et les différentes étapes de l’accouchement, les possibilités d’épisiotomie, la respiration durant la poussée… En bref j’étais sûre de moi et je savais comment tout cela aller se dérouler…
A 15 jours du terme, un samedi après-midi en pleine balade au centre commercial, un coup de fatigue énorme s’abat sur moi. J’aurais voulu m’allonger n’ importe où pour pouvoir dormir. Nous rentrons donc à la maison et les contractions ont commencées. Irrégulières, je passe la soirée et la nuit à la maison avec ses contractions toutes les 10 minutes et après un coup de fil à la maternité, cela ne servait à rien que je vienne si les contractions n’étaient pas toutes les 2 minutes. Nous patientons donc et je passe mon dimanche entier avec les contractions toutes les 10 min jusqu’au moment où …. 2 minutes enfin !!!!!
Cela fait 29 heures que j’ai des contractions : il est temps d’aller à la maternité
Nous arrivons donc dans la nuit, tout se prépare pour le mieux, cela fait 35 h que le travail avait commencé et j’ai pu enfin souffler avec la péridurale qui m’a complètement endormi le bas du corps, je vous avoue que je me suis même assoupie …
Le jour se lève, la sage-femme me perce la poche des eaux, bébé n’était pas très motivé à sortir donc il a fallu donner un petit coup de pousse en prenant différentes positions pour le faire descendre.
« Mettez-vous en papillon » ou « tournez-vous vers la droite », « non maintenant par la gauche » SSSTTOOPPPPPP !!! Ne bougez plus et appelez le médecin vite !!
Ces quelques mots qui on suffit à me plonger dans une peur indescriptible… Un 1er médecin m’examine, puis un second et chuchote dans le coin de la chambre pendant ce temps, une sage-femme me place un masque a oxygène sur le nez.
« Madame il faut partir en césarienne d’urgence »
En l’espace de 2 minutes chrono, j’ai entendu un brouhaha de personnes qui venaient me chercher, une sage-femme est montée au-dessus de moi avec sa main pour repousser la sortie du bébé…
Je suis au bloc, toujours avec cette sage-femme sur moi, l’anesthésiste me pose le masque et essuie les larmes qui coulaient le long de mes joues, je m’endors en sentant sa main sur mon front qui essaie de me rassurer.
4 Heures plus tard… Je me réveille et face à moi cette horloge qui me glace le sang à l’idée que j’ai été absente pendant 4 heures.
Je me réveille le ventre vide, plat, avec une sage-femme qui m’appuie sur le ventre pour faire partir je ne sais quoi, surement le reste de sang. Une telle douleur que j’aimerais crier mais je suis aphone, encore sous les coups de l’anesthésie. J’entends une voix qui me dit : « ne vous n’inquiétez pas, votre fils est sous la couveuse et il va bien« .
1 heure plus tard, on me remonte enfin dans ma chambre, j’essaie de rester un maximum éveillée.
Je me retrouve seule dans cette chambre, sans bébé, sans mon conjoint, sans mes affaires, sans téléphone pour chercher après le papa…
C’est 30 minutes plus tard qu’une sage-femme arrive la bouche en cœur « Voici votre petit garçon »
Je la regarde entrer dans la chambre avec ce landau à roulette ou se trouvait Hugo notre bébé. J’ai encore peine à le dire mais j’ai eu le sentiment qu’on me rapportait un plateau repas. Je ne savais pas ce qu’il s’était passé et je ne réalisait rien.
J’ai eu le sentiment qu’on me donnait un enfant et non que j’avais mis au monde mon enfant.
A ce moment-là on aurait pu me déposer dans les bras n’importe quel bébé, j’aurais été incapable de savoir s’il s’agissait réellement du mien ou non.
Nous apprenons à faire connaissance, tout était désormais derrière nous, il était là, en bonne santé. Plus rien d’autre n’avait d’importance. Le lendemain le chirurgien qui a du faire la césarienne d’urgence est venu me voir afin de m’expliquer ce qu’il s’était passé durant l’accouchement. Il y a eu une procidence du cordon (descente du cordon ombilical avant le fœtus qui fait que le bébé peut décéder par manque d’oxygène). Autant vous dire que sur le moment je n’ai pas vraiment compris ce que cela voulait dire mais qu’on avait eu énormément de chance qu’il soit en vie et que l’équipe médicale à vraiment assuré ! Tout allait bien, mais lors du 3e jour à l’hôpital, je commençais à pleurer à cause d’une soit disant chute d’hormone.
Le début de la dépression post-partum
Nous rentrons à la maison, et nous prenons nos marques, le papa a été d’un vrai soutien car la césarienne me faisait vraiment souffrir. Nous avons eu un bébé très facile à vivre, manger et dormer très bien. Mais cela ne changeait pas, je pleurais régulièrement sans vraiment de raison apparente… surement la fatigue.
Cependant quelques semaines après, nous avions décidé de rentrer dans notre région afin de faire les présentations à nos familles. C’est très vite que je me suis aperçue que j’étais incapable de laisser notre bébé sous la surveillance de quelqu’un autre que nous et même le fait de voir une personne donner un biberon et changer une couche m’était insupportable. Donc je ne bougeais pas, ni pour faire les courses, ni pour prendre l’air, nous étions en plein mois de Novembre et je commençais à m’isoler.
Pendant longtemps je m’en suis voulue de ne pas avoir mis au monde mon enfant, j’avais ce sentiment d’avoir mal fait, d’avoir risqué sa vie et j’avais de la rancœur de ne pas avoir pu lui donner son premier biberon ou son premier bain, je savais au fond que le papa aussi n’avait pas eu son rôle après l’accouchement, couper le cordon, le peau a peau et des biberons…
C’est quelques années plus tard que je suis capable de mettre des mots sur ce qui m’est arrivée. Nous savons toutes qu’un accouchement est de loin une partie de plaisir mais je ne savais pas ce que j’allais endurer après émotionnellement et physiquement. Je me suis jamais mis en tête une seule seconde que cela aurait pu partir en césarienne, encore en anesthésie générale. Je ne me suis jamais demandée à quoi ressemblait la douleur d’une césarienne et j’étais encore moins au courant que je devrai mettre des couches après l’accouchement et que mon conjoint devrait m’aider à prendre une douche et à me laver.
Et on en parle du chamalow à la place du ventre ?
Nous savons toutes qu’il est impossible de sortir de la maternité le ventre plat mais encore une chose à laquelle je ne m’attendais pas. A voir ce corps qui avait tant souffert, rempli de vergeture de haut en bas tout dégonflé, une cage thoracique complément avancée. Et une nouvelle cicatrice qui se fond dans la masse. A 22 ans, l’angoisse…
Je n’étais plus la même physiquement, j’étais complément perdue émotionnellement
Un sentiment de faire un trait sur mon ancienne vie avec une culpabilité d’avoir loupé quelques choses. Une pression familiale sur mes épaules. J’étais jeune, il fallait que je fasse les choses correctement, il faut faire comme-ci comme cela. Je n’étais plus moi, je ne trouvais pas ma place car j’avais le sentiment d’avoir encore des comptes à rendre à la terre entière.
Au fond de moi je n’étais peut-être pas aussi prête que je le pensais et je n’ai pas peur de le dire, je n’ai pas été mère quand j’ai eu mon bébé dans les bras mais j’ai appris à le devenir.
Je sais que je n’ai pas le droit de me plaindre car j’ai eu mon bébé en pleine santé mais là n’est pas le sujet. Nous sommes en 2021, il est temps d’informer et de soutenir les futures nouvelles mamans. J’encourage vivement de parler, d’échanger sur la maternité. Nous devons être informées sur le post partum bien avant et non pendant car il est bien trop tard quand le mal est déjà installé. J’aurais aimé ne pas subir les conseils que Pierre Paul Jacques me donnaient constamment, cela ne faisait que me tirer vers le bas et je perdais confiance. Vous seule savez ce qu’il y a de mieux pour votre enfant.
Vous vous sentirez à nouveau femme, à nouveau vivante, cela est juste une question de temps et de trouver les repères nécessaire et il ne faut pas culpabiliser. Nous ne pouvons pas tout maîtriser.
Maintenant Hugo à 8 ans et il a un petit frère de 1 an avec qui j’ai eu un accouchement complètement différent et qui m’a permis d’avancer et ne pas rester sur ce traumatisme. Pas de césarienne, accouchement en express en 3 heures sans péridurale !
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clairedoulanaissanceClaire dit
Les futures mères ne sont pas suffisamment préparées à l’idée de vivre une césarienne. J’encourage toujours les femmes que j’accompagne et aborder cette option dans leur projet de naissance, et je les prépare à cette éventualité durant nos rendez-vous prénataux. Récemment j’ai également entendu parler de la césarienne extrapéritonéale, qui semble être une excellente option pour certaines femmes! La plupart me disent qu’elles ont vraiment eu la sensation d’accoucher grâce à cette méthode.
Curtelin dit
Bonjour Mathile
Césarienne aussi pour moi pour un accouchement difficile. Et quand on m’a présenté ma fille quelques secondes sur la table d’opération j’aurais pu voir un chat c’était pareil.
Elle a deux ans et je commence seulement à avoir l’impression d’être sa maman
Aurélie Prillieux dit
C’est un témoignage courageux. Je suis heureuse de voir que tu as pu dépasser tout cela et avoir un autre enfant.
Ce vécu dépend aussi sans doute de la maternité dans laquelle on accouche et de sa préparation. J’ai accouché en 2014 et 2018. Dans la préparation, on a parlé travail, mais aussi césarienne d’urgence, procidence du cordon, qu’il fallait garder en tête que seuls comptait au final la santé de la mère et du bébé et qu’il fallait s’attendre à sortir de la maternité avec un enfant mais que l’accouchement avait sa part de surprise et d’imprévu. Les couches, le sentiment de se sentir diminuée, utiliser de l’eau pour apaiser les douleurs quand on urine en cas d’accouchement par voie basse, les difficultés à se déplacer en cas de césarienne, tout ça aussi on en a parlé. Du coup on se préparait psychologiquement un peu à tout. J’espère que tu as pu ensuite faire part de ton ressenti, pour que les choses évoluent …
Et oui, plus il y a de témoignages, mieux c’est…