Laure fait partie des cas très rares de femmes qui font plusieurs grossesses molaires à la suite. Elle en a eu 3 en tout, avant que les médecins ne se rendent compte qu’un soucis génétique provoquait ces tumeurs. Heureusement, grâce à un don d’ovocytes elle a pu devenir maman. Voici son témoignage.
{Témoignage} 3 grossesses molaires : être enceinte d’une tumeur
Bonjour à toutes et à tous,
En couple depuis 2005, notre mariage a eu lieu lorsque nous avions 21 ans en 2009. Forcément l’idée d’agrandir notre famille est bien présente, d’autant plus que l’envie de devenir maman était là depuis quelques années déjà. Après le mariage n’est-ce pas le bon moment ? #tradition
Je tombe enceinte en février, des douleurs incompréhensibles envahissent mon utérus.
Aux échographies de contrôle, ils attendaient de voir si le sac évoluait, les beta HCG (hormones de grossesse ) évoluaient toujours mais lentement, j’ai été hospitalisée pour ces douleurs pendant trois jours, je n’ai jamais su ce qui se passait. Est-ce mon corps qui me donnait une alarme comme quoi cette grossesse allait aboutir à une fausse-couche ? Toujours est-il que la grossesse s’est soldée malheureusement par un échec, j’ai eu le droit à l’aspiration avec curetage ; résultat : c’était un œuf clair, c’est à dire un sac n’évoluant pas et puisqu’il était sans embryon.
On essaie de relativiser, cela arrive à beaucoup de femmes de faire une première fausse-couche, même si cela est difficile à accepter. C’est aussi que nous l’entendons en boucle cette phrase, donc nous sommes obligées d’accepter, comme si on te forçait à penser cela. On se relève ! De plus, beaucoup de personnes ont cette gentille attention de nous répondre : “vous avez le temps, vous êtes jeunes !” Même certains professionnels nous demandent si nous ne sommes pas “des consanguins”. Bref On en a entendu ! Certes à cet âge-là nous sommes jeunes, mais cette envie d’avoir un enfant, y a-t-il obligatoirement une limite d’âge ?
Juillet, je suis de nouveau enceinte, les symptômes de grossesse sont bien présents même trop à mon gout. Des nausées ++ (écœurée par les tomates, en plein été, un comble !) mon ventre s’arrondissait, douleur à la poitrine, des signes qui auraient pu me rassurer pour la grossesse mais je sentais quelque chose qui n’allait pas. Mes beta HCG n’évoluaient pas correctement, ils ne doublaient pas comme ils devraient, comme lors d’une grossesse évolutive. Et pourtant j’avais tous les symptômes de la “parfaite femme enceinte” voire peut être même avec un ton exagéré.
L’échographie montre un sac irrégulier avec un semblant d’embryon non pulsatile.
Ils me laissent en me disant : ”peut-être une grossesse trop jeune par rapport à ce que nous voyons à l’échographie”.
On me dit: « vous le perdrez naturellement »
On me laisse attendre avec un espoir envolé dans mon ventre, quelque chose en moi de mort : 15 jours, c’est ce que j’ai attendu pour attendre la seconde échographie. En attendant, je continuais les dosages de beta HCG qui, plus ça allait, plus ils augmentaient pour atteindre un taux au-dessus des 100 000. Seconde échographie, le diagnostic est posé : môle hydatiforme, direction les urgences gynécologiques.
Le professionnel à qui j’ai montré les résultat de l’échographie et qui me pratiquera l’aspiration par la suite, me dit de façon très décontractée : « c’est rien ça peut devenir un cancer mais qui se soigne très bien« . Et là, descente, ça vous plombe. Le mot « cancer » celui que tout le monde redoute, est lâché ! Avec pas plus d’explications, je repars la mine déconfite de son bureau. Deux jours après, je subissais cette aspiration. Pendant ces deux jours, je porte dans mon ventre cette boule qui devait être une enfant et ce n’est qu’une boule !!! une tumeur…!!! oui oui, les deux jours d’attente avant l’aspiration m’ont parus interminables, je ressasse, je regarde sur le net pour avoir des informations sur cette môle, ce que c’est….
L’aspiration se passe, je repars de cette chambre d’hôpital avec dans la main, une ordonnance pour surveiller mes beta HCG à faire toutes les semaines jusqu’à ce qu’ils redeviennent négatifs et après une fois par mois pendant six mois. Avec toutes les données que j’ai recensé sur le net, j’informe le gynécologue lors de la consultation de contrôle, qu’il doit se mettre en relation avec le centre de référence de Lyon. Il semblait connaitre légèrement les démarches à suivre lors de grossesse molaire, je lui donne toutes les informations nécessaires. Il me répond que de toute façon j’en sais beaucoup plus que lui sur la maladie. Euh, C’est rassurant ! Chose faite, je contacte ce centre où j’ai eu plein d’infos et de conseils, ils ont suivi tous les contrôles de beta HCG et c’est eux qui m’ont donné le feu vert pour recommencer les essais bébé au bout de six mois, après que mon taux d’hormones soit redevenu normal.
8 mois qui se sont écoulés. On n’oublie pas, on vit avec, on pense à autre chose, il y avait plein de travaux dans la maison à faire, on a pas mal bricolé, ça nous a permis d’évacuer la douleur, le mal-être et d’avancer. En se disant, la prochaine fois c’est la bonne car une môle c’est tellement rare !
En mai suivant, je retombe enceinte
Et là, j’ai les mêmes symptômes, je le sens, c’est encore une môle c’est sûr ! Les beta HCG qui s’enflamment à plus de 270 000, échographie qui montre cette boule ! La revoilà, la mauvaise !
Dans ma tête, le film est déjà fait : rebelote, retour sur le billard. Contrôle des beta-hcg / un état d’esprit au plus bas ! Ce n’était pas le moment, car le jour de l’échographie c’était l’enterrement de mon oncle. Un vrai cauchemar ! Et, toujours cette boule dans le ventre pendant plusieurs jours avant l’aspiration …
Je porte toujours une tumeur en moi, je ne porte plus la vie désirée mais la mort !
Même si cette boule ne ressemble pas à un bébé, je le considérais comme tel, car quand on est enceinte, on devrait avoir un bébé non ? Donc c’est comme si, on me laissait là avec un bébé mort dans mon ventre.
Résultat de l’anapath : môle hydatiforme, pour la seconde fois !
C’est rare mais cela arrive d’en faire une seconde. Six mois après cet enfer, j’ai de nouveau le feu vert du centre pour reprendre les essais bébé. Mais cette fois-ci, on attendra vraiment 1 an avant de retenter une nouvelle grossesse. On s’occupe, on bricole, on rêve !
Mai de l’année suivante, je suis de nouveau enceinte, j’ai toujours cette force qui me dit cette fois-ci : c’est la bonne, ça y est j’ai eu deux môles, à mon tour d’avoir ce bonheur. Aux prises de sang, les beta HCG ont du mal à monter, je le sens mais je veux y croire cette fois, je me raconte des histoires pour me protéger, du genre : il y avait peut-être un jumeau et je l’ai perdu donc c’est pour cela que les beta HCG n’évoluent pas bien… Le jour de l’échographie arrive, la praticienne ne dit rien, elle n’a pas besoin, c’est moi qui lui dis : c’est encore une môle, elle me répond que malheureusement oui. Elle était vraiment désemparée par la situation, elle ne parlait plus pendant la consultation, me dit « je vous laisse revoir le gynécologue, vous n’avez rien à régler » ; au bout de la 3 ème môle une consultation gratuite ! youpi ! c’est les promos ! quelle dérision ! Non vraiment, je la sentais mal à l’aise vraiment, un petit geste qui en dit long certainement.
Donc là, j’étais au plus bas de chez plus bas, je crois n’avoir jamais été aussi mal, j’hurlais de douleurs, les larmes ne faisaient que couler : pourquoi ? encore moi ? qu’est-ce que j’ai fait pour mériter ça ??? J’avais beaucoup de rage, contre je ne sais qui, car c’est la faute à pas de chance : une phrase qui fait rougir ! Je crois que c’est la première fois que mon mari me voyait dans un tel état de détresse.
Est-ce qu’un jour j’aurai le droit à ce bonheur, celui de serrer son enfant ? de porter la vie et non la mort ? J’ai continué, je me suis relevée, je me suis apaisée, j’ai relativisé.
OUI j’ai eu trois môles, 4 fausses couches.
Mais d’autres femmes ont des môles et font de la chimiothérapie car cette tumeur les envahit. Moi dans ma mal chance, je n’ai pas eu recours au protocole de chimio.
Je sais que chacune est différente, et qu’il y a toujours pire !
Après les suivis hebdomadaires de prise de sang … Le centre décide de me contacter et de me mettre en relation avec un professeur du CECOS d’Amiens. Ils m’ont bien expliqué que je fais partie de ces quelques femmes 3 ou 4 en France qui ont eu plusieurs môles et que j’ai très peu de chance d’avoir une grossesse qui aboutisse à un enfant, moins de 5%.
Grâce à eux, j’ai eu le test sanguin au niveau génétique pour définir s’il y a mutation du gène, et ce fut le cas j’ai deux mutations dont celui : NLRP7. C’est bien ce gène qui occasionne les fausses couches et les môles hydatiformes. Donc ils m’ont orienté vers un parcours de procréation médicalement assisté avec don d’ovocytes, car mes ovocytes ont mes gènes donc si je faisais une fécondation in vitro avec mes propres ovules, j’aurais de nouveau un échec à cause de cette mutation. Mais avec les ovocytes d’une tierce personne en bonne santé, il y a possibilité que j’aie un enfant en pleine santé. Une grande première pour l’établissement et pour la recherche, si cela aboutit.
Grâce au don d’ovocytes, le miracle !
Ce miracle de la vie, cet espoir infini est arrivé pour nous le 22 Aout 2016 et s’appelle Augustine.
Nous ne remercierons jamais assez ces femmes qui font cet acte d’altruisme, ce don de soi, pour nous donner cette joie enfin d’être parents.
J’ai refait une grossesse molaire en 2018, par accident, oui, car la mutation entraine les échecs, et à chaque fois, je dois passer par une aspiration, nous nous en voulons car nous n’avons pas fait assez attention. Le pire n’était pas la grossesse molaire mais le jugement de certains professionnels du genre « le préservatif ça existe… Vous le saurez pour la prochaine fois »
Le problème d’être trop fertile et infertile à la fois, je crois.
Mon conseil pour les femmes à qui cela pourrait arriver.
Pendant cette attente de PMA, ces déceptions à répétition, ces deuils, faites-vous du bien, pensez à vous, faites-vous cocooner, faites de choses que vous aimez et qui vous apporte du positif.
Gardez espoir ! Ce parcours du combattant ne nous semblait pas destiné et pourtant nous devons y faire face. Gardez en tête qu’au bout du chemin, même s’il est semé d’embûches, la lumière brillera et que ce bonheur sera bientôt là et par n’importe quel moyen. Force et courage !
Même si cela prendra plus de temps que prévu, sachez que vous réussirez.
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Emily dit
Très beau message ❤