Le don de spermatozoïdes reste mal connu et parfois tabou en France. En 2019, seulement 317 hommes ont donné leurs gamètes, ce qui est bien trop peu pour les 2017 nouveaux couples inscrits pour bénéficier d’un don de spermatozoïdes cette année-là. Stéphanie et son mari ont découvert l’azoospermie (sperme dépourvu de spermatozoïdes) de ce dernier lorsqu’ils se sont lancés dans les essais bébé. Le verdict a été sans appel : pour devenir parents ils devraient faire une insémination avec donneur. Un proche de la famille s’est montré solidaire et a fait un don de spermatozoïdes dans leur centre de don, ce qui a permis de diminuer les temps d’attente des couples de ce centre et donc, à Stéphanie et son mari de réaliser leur rêve d’avoir un enfant plus rapidement . Si vous aussi vous souhaitez faire ce merveilleux cadeau à des personnes en attente d’un don de gamètes, je vous invite à aller vous renseigner sur les sites dondovocytes.fr et dondespermatozoides.fr de l’Agence de la biomédecine. Voici le témoignage de Stéphanie.
{Témoignage} Insémination avec donneur : notre parcours pour devenir parents
En 2012, mon mari et moi avons décidé d’avoir un enfant. Je ne sais pas pourquoi mais au fond de moi j’ai toujours su que ce serait compliqué. Nous avons vécu un parcours peu conventionnel, étant certains à 100% que nous n’y arriverions pas, j’ai demandé à mon mari de faire des tests de fertilité, en parallèle des miens, afin de gagner du temps.
Son médecin de l’époque lui a prescrit un spermogramme.
Le soir, 19h, son médecin rappelle en lui indiquant qu’il doit le refaire, que le résultat est faussé.
Le lendemain, nouveau rendez-vous avec une biologiste qui nous annonce de but en blanc que monsieur est stérile, que les seules alternatives sont le don de gamètes ou l’adoption. Mon mari refait le spermogramme, même résultat … zéro spermatozoïde…
Mes craintes se confirment mais on essaie d’y croire.
Au fil du temps, les rendez-vous médicaux s’enchaînent, les examens invasifs, les traitements, et cette attente interminable qui a été bien plus difficile que les examens !
Psychologiquement c’est très compliqué à vivre.
Au-delà de savoir que nous avons des difficultés pour avoir un enfant, on commence à avoir des réflexions de proches qui nous blessent « des tas de gens n’ont pas d’enfants et ils s’en portent bien », « c’est bon t’as pas le cancer » ou « t’inquiètes dans 2 ans, on en rigolera », etc. Ces gens ne se rendent pas compte de la douleur émotionnelle, de tout ce que nous endurons.
Les annonces de grossesse autour de nous sont de plus en plus difficiles à encaisser, mais c’est comme ça, nous y sommes confrontés.
En 2014, l’urologue propose à mon mari de faire une biopsie testiculaire.
On sait qu’il a moins de 10% de chance de trouver quelque chose. Je suis contre, lui veut aller jusqu’au bout, être sûr qu’il a tout tenté ! Je le trouve très courageux ! En septembre 2014, après l’examen ultime, le couperet tombe, c’est ferme et définitif, nous n’aurons pas d’enfant biologique !
Mon mari est atteint d’azoospermie, il n’a aucune possibilité de produire des spermatozoïdes, c’est une anomalie fonctionnelle dont nous ne connaissons pas l’origine. Pour lui, c’est compliqué, ça touche sa virilité. Pour la suite ce sera sa décision, je ne veux rien lui imposer.
Que fait-on ? L’adoption ? Il ne veut pas en entendre parler !
Le don de sperme, il y était préparé et est d’accord.
C’est parti !
Un autre parcours nous attend, nous prenons rendez-vous au CECOS (centre d’étude et de conservation des œufs et du sperme humains) afin de discuter de notre
« projet », nous sommes reçus par un médecin en génétique qui nous explique l’intégralité du protocole, des examens cette fois-ci pour moi, des traitements hormonaux à prendre, un psy à consulter pour discuter de l’avenir de cet enfant à venir (si toutefois on y arrive) mais aussi les délais d’attente. Au CECOS on n’est pas aux Etats-Unis, on ne choisit pas notre donneur sur catalogue, le généticien prend en considération la taille de mon mari, sa corpulence, la couleur de ses cheveux, de ses yeux et le groupe sanguin et c’est tout !
D’autre part, on nous explique aussi que nous n’aurons jamais accès aux informations relatives au donneur, sauf en cas de maladie chez l’enfant, le CECOS se chargera de le contacter.
Ensuite, vient le moment de la rencontre avec le psy, certainement le moment le plus difficile. Nous devons évoquer nos difficultés, nos états d’âme, cette peur d’être jugés de notre état émotionnel catastrophique … on a surtout peur qu’on nous dise, « ah mais ils sont dépressifs, on n’accepte pas leur candidature ». Sauf que ce qui les intéresse, c’est uniquement de savoir si l’enfant sera mis au courant ou non de cette démarche. De savoir comment l’enfant sera accompagné. Nous ne sommes pas là pour être jugés, ils veulent juste voir si nous sommes prêts, ce qui est rassurant.
Pour contribuer à diminuer le temps d’attente de tous, le centre de conservation nous informe qu’il est possible de solliciter un don de gamètes autour de soi. Évidement, qu’on amène 1 ou 10 personnes, le délai reste le même, mais cela permet de réduire l’attente pour d’autres couples qui se retrouvent dans cette situation.
C’est peut-être la solution à cette attente interminable, on pose la question autour de nous lors d’un apéro entre ami, chez nous il n’y a pas de tabou, tout notre entourage sait ce qu’il nous arrive.
Un proche de la famille se propose. C’est un cadeau inestimable !!! Il ira donc faire 6 prélèvements au CECOS.
En mars, nous avons le feu vert du CECOS et du gynécologue, j’attaque la stimulation, je n’ai aucun problème, ce sera donc une insémination avec donneur (IAD). La première en avril échoue.
A ce moment-là, je veux tout arrêter … Mon mari me pousse à recommencer, mon gynécologue aussi … Je recommence le cycle suivant, piqûres, médicaments, suivi régulier, et 2ème insémination, je vis normalement, je n’y crois plus, à vrai dire j’ai lâché l’affaire …
Pourtant au bout de 12 jours, la prise de sang est positive, très faiblement mais positive quand même ! Rendez-vous chez le gynécologue qui me dit directement que soit c’est une grossesse extra-utérine, soit un œuf clair, mais qu’une grossesse viable serait un miracle !
Le coup de massue … Tous les 2 jours, je vais faire des prises de sang pour contrôler le taux de Béta HCG, et échographies pour vérifier l’évolution et surtout voir si le sac embryonnaire n’est pas logé hors de l’utérus.
Je me rappellerai toute ma vie de cette date, je ressors de chez le gynécologue qui me dit qu’on programme le dernier examen le 1er juillet 2015, il me parle des procédures de curetage … bref ce n’est pas engageant !
Le 1er juillet 2015, mon mari m’accompagne, lui y croit toujours (cette facilité à se voiler la face en toute circonstance), le gynécologue me fait l’échographie, me regarde et me dit « il est là votre miracle »
On n’y croyait pas, il était là, le cœur battait, c’était juste incroyable … on avait réussi !!!
Le suivi standard a pu démarrer, j’étais heureuse, mais au fond, quelque chose ne tournait pas rond
… jusqu’ici je ne m’étais jamais posée la question de savoir à quoi ressemblerait notre enfant. Est-ce -que le CECOS a fait ce qu’il fallait pour que le donneur ressemble à son père ? Est-ce que notre enfant va nous en vouloir ? Comment va-t-on l’accompagner ? Et ça va durer … 9 mois …
Les fêtes de fin d’année approchent et les copines ont déjà accouché, et évidement les enfants ressemblent à leur père … Je focalise.
Et si mon enfant ne ressemblait pas à son père ?
Plus la date fatidique approche, plus c’est difficile psychologiquement, de se demander si notre choix n’est pas égoïste. De regarder cette photo de mon mari, enfant, avec ses cheveux blonds bouclés, d’avoir idéalisé cet enfant et me dire que jamais il ne sera ce petit garçon sur la photo. Peur que mon mari n’arrive pas à l’aimer … que je n’arrive pas à l’aimer… Autant de questions qu’on ne s’était jamais posées durant le protocole.
Le 12 février à 4h du matin je perds les eaux, je suis hyper excitée à l’idée d’accoucher !!! Mon mari, lui, est plus angoissé.
Nous nous préparons et partons à l’hôpital, arrivée à 6h, plus de contraction … Mais c’est pour aujourd’hui.
A 10h, le gynécologue passe me voir et me dit que le travail a commencé. Ce sont des moments incroyables, j’ai la chance de bien supporter les contractions.
A 15h33, Gabriel est là ! Et les questions il n’y en a plus. On l’aime et puis c’est tout.
Gabriel va avoir 6 ans, c’est un enfant curieux, plein de vie (il est même épuisant parfois !), il connaît son histoire, notre parcours, il sait ce qu’est un géniteur, il sait ce qu’est un père.
Et son père l’aime plus que tout. Nous remercions toutes les femmes et tous les hommes qui aident les personnes en attente de devenir parents à réaliser leur rêve.
Si vous aussi vous désirez contribuer à la création de ces petits miracles, n’oubliez pas d’aller pour renseigner sur les sites dondovocytes.fr et dondespermatozoides.fr de l’Agence de la biomédecine.
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Agnès dit
Je suis issue d’un don de sperme mais je ne l’ai appris qu’à 22 ans. Dès petite je me suis toujours dit que je ne ressemblais pas à mon père au point que quand j’ai découvert qu’on avait un groupe sanguin B pour une opération à 11 ans, je me suis dit que j’avais enfin un point commun avec lui. Comme quoi même petit, ça travaille dans la tête.
Il faut savoir que j’ai 3 frères plus âgés et qu’il sont tous issu d’un donneur différent. Pourtant, il est difficile d’imaginer qu’on est génétiquement que demi-frère et soeur. La génétique c’est complexe et apparemment ma mère a des gènes très forts^^Il ne faut pas trop s’inquiéter des différences.
Le plus dur pour moi à accepter, c’était le secret. Je ne l’ai su que bien après mes frères car on a une différence d’âge importante. Je suis contente que vous ayez partagé avec votre enfant le miracle de son existence.
Juju dit
C’est juste magnifique comme témoignage ! Merci de l’avoir partager. Je vous souhaite plein de bonheur en famille