Ce n’est pas le premier témoignage que Claudia partage avec nous. Fidèle lectrice du blog La mariée en Colère, elle nous a déjà parlé de l’organisation d’un mariage en tant non-voyante (ici), ainsi que de son jour J plus en détails (ici). Aujourd’hui c’est une toute autre aventure qu’elle vient nous conter : celle de la maternité. Claudia est maman d’une adorable Mona. Mais tout n’a pas été tout rose. Voici son témoignage.
NDLR : merci d’être aussi fidèles au blog les filles <3 vous êtes si précieuses w3
{Témoignage} Devenir maman et vivre la dépression post-partum quand on est non-veoyante
Bonjour à toutes ! Il y a quelques temps je vous parlais de mon mariage qui s’est superbement passé, aujourd’hui, je viens vous parler maternité. En effet, après 13 mois d’essais bébé dont une fausse couche, je suis tombée enceinte de notre petite merveille Mona, qui est née le 3 juillet. Aujourd’hui toute la famille se porte très bien et notre fille fait notre bonheur. Mais pour en arriver là je suis passée par plusieurs étapes pas très sympathiques. Comme dirait l’autre, j’en ai bavé ! Je vais tenter de vous raconter tout cela en quelques lignes, ce qui n’est pas gagné, me connaissant !
Une grossesse en apparence idéale
C’est le 27 octobre 2021 que nous avons appris la merveilleuse nouvelle de ma grossesse. Malgré notre bonheur, nous avons gardé la tête froide. Ma fausse-couche précoce datait de 5 mois plus tôt, et alors, l’euphorie de la nouvelle nous a fait faire des erreurs, comme l’annoncer aux familles dès le lendemain. Nous ne voulions pas reproduire cela, et j’avoue avoir pris mes distances avec ce petit être qui grandissait en moi. Physiquement je me sentais au top ! Très peu de nausées, une fatigue importante mais gérable en l’absence d’activité professionnelle, un ventre que j’ai fini par accepter et adorer. Moralement c’était autre chose. La grossesse a été pour moi une succession de privations, de frustrations et d’incompréhensions. Je ne comprenais pas pourquoi je n’avais pas le droit de boire un verre au nouvel an, alors que je connais quelqu’un qui connait quelqu’un qui l’a fait et dont l’enfant se porte très bien. A tout ça se sont rajoutés des problèmes de familles et malgré le bonheur des échographies, de sentir le bébé qui bougeait de plus en plus, et de se projeter en famille, je me suis sentie très seule et incomprise. J’avais, et j’ai toujours l’impression que, selon beaucoup, une femme doit s’estimer heureuse de porter la vie et que c’est capricieux de se plaindre du reste. La vérité est que, certaines femmes auront beau trouver cette étape géniale et je les respecte, pour ma part, 9 mois de grossesse, c’est beaucoup trop long ! Puis au 8ème mois j’ai commencé à avoir des angoisses, à réaliser que ma vie allait changer pour toujours. Mon mari réussissait à me rassurer, et j’étais trop impatiente de terminer la grossesse pour me focaliser sur elle. Et parmi les petits bonheurs de la grossesse, il y a eu l’équipe médicale. J’ai eu des sages-femmes incroyables, je me souviendrai toujours de l’échographe qui me décrivait tout ce qu’elle voyait dans les moindres détails, prenant tout son temps pour que j’ai accès à toutes les informations. En tant que future maman non voyante c’était extrêmement précieux.
L’accouchement et le début du post-partum
Malgré une péridurale qui n’a pas fonctionné, mon accouchement a été parfait. Pas de déchirure, pas d’instruments utilisés, une douleur que j’ai su gérer, et un travail qui n’a duré que 5h30. D’autre part j’ai eu la chance d’être encadrée par une équipe formidable et à l’écoute. Tout était réuni pour que ce soit un moment magique. Seulement, passer d’une énorme douleur à plus rien a eu des conséquences. Entre la dernière poussée et le moment où on a mis ma fille sur mon ventre, il y a eu comme un moment de flottement, une déconnexion. Je n’ai donc jamais fait le lien entre le bébé que j’avais dans mon ventre, et celui que je tenais dans mes bras. Pour autant je me souviendrai toujours du peau à peau et de la tétée de bienvenue comme des moments extraordinaires, j’étais euphorique, même si je n’en menais pas très large avec cette petite chose si fragile que je devais maintenant protéger.
C’est pendant le séjour à la maternité que tout s’est dégradé. Je ne saurais dire quand exactement, mais le poids des responsabilités m’est tombé dessus d’un coup. Cette fois, personne ne pouvait calmer mes angoisses, j’ai eu l’impression d’avoir fais la plus grosse bêtise de ma vie, que j’allais perdre ma vie de couple qui me rendait si heureuse. Je pensais que c’était en partie du au fait d’être confinée dans une chambre de maternité, sans mes repères, sans mon chat, et que ça irait mieux en rentrant. C’est le contraire qui s’est produit. Moi qui adorais ma maison, je ne m’y sentais plus chez moi, je ne savais plus où était ma place, je voulais retrouver ma vie d’avant. Puis être confrontée au monde extérieur était insupportable. J’ai eu beaucoup de bienveillance autour de moi, mais moi qui suis quelqu’un de très hormonale, je n’ai pas du tout bien vécu la chute des hormones : j’ai fait une dépression post-partum. Je pouvais pleurer n’importe quand, pour n’importe quoi, j’ai accouché en plein été, nous avons donc dû gérer quelques jours comme au temps du confinement, contraints à ne pas bouger de chez nous. A cela se sont ajoutées la fatigue, l’adaptation à cette nouvelle vie dont je ne connaissais rien. Nous avons traversé l’enfer avec mon mari, qui malgré toute sa patience, ne réussissait plus à trouver les mots pour me rassurer. A ce moment-là, je n’acceptais pas ce nouveau rôle et toutes les responsabilités qu’il engendrait, j’étais au fond du trou et je ne voulais pas croire ni entendre que j’allais en sortir, je m’en sentais incapable, voulant abandonner mon bébé. Les remarques de certaines personnes n’ont pas aidées. J’ai eu droit au classique « Bah tu l’as voulu pourtant ! », et à « Je t’avais prévenue ». Je crois que celle qui m’a le plus touchée a été « fais gaffe parce qu’elle va le ressentir », car cette remarque venait d’un membre, certes éloigné mais membre quand même, de ma famille. Heureusement, mes parents et ma belle-maman se sont relayés pour nous soutenir par rapport aux nuits, mais aussi pour que mon mari et moi puissions nous ressourcer, à la plage la plupart du temps. D’autre part j’ai décidé de me faire aider, par la psychologue de la maternité où j’ai accouché et par un antidépresseur prescrit par mon médecin traitant. Je tenais énormément à m’occuper de ma fille, car je savais que le lien ne se créerait pas tout seul, mais également pour me prouver que je le pouvais, et surtout pour ne pas avoir de regrets plus tard. J’ai eu raison.
Le déclic
Mes soucis familiaux ont fini par me rattraper, l’image qui me reste en tête est moi, mon mari et Mona, sur la table de la terrasse de mes parents, seuls. J’avais mon bébé dans les bras, tout contre moi. Alors je me suis dis qu’à partir de maintenant, c’est eux qui me feront avancer. Je serai leur pilier autant qu’ils seront mon équilibre, et puis merde ! Je suis Claudia, la battante, pétillante, qui s’est toujours surpassée, et qui a su mener sa barque malgré son handicap ! Il fallait que je me bouge, il était hors de question que ma fille aie l’image d’une maman qui subit sa vie. Le retour de mon mari au travail a définitivement achevé de me transformer en une maman qui déchire. Aujourd’hui je dis non, je tourne des dos quand il le faut, je mets les points sur les I, et je suis celle que j’ai toujours voulu être, retrouvant le goût de cuisiner que j’avais perdu, et ayant repris des activités sportives ! J’ai évacué la plupart de la colère que j’avais en moi, mais j’en garde un peu et je la transforme en force quand il le faut. Et pendant cette période j’ai également décidé de ne rien cacher à ma fille. Que ce soit pendant le change, quand je la berçais dans la journée ou le peu de fois ou je me réveillais la nuit, je lui disais que c’était difficile pour maman, mais qu’elle serait toujours là et qu’elle faisait tout pour s’en sortir. Aujourd’hui encore je lui parle beaucoup de ce qu’on a traversé, car c’est aussi son histoire, mais j’insiste sur l’amour infini que je lui porte.
Je lui parle également souvent de mon handicap
Quand elle balance sa tétine à l’autre bout de son lit, je n’hésite pas à lui dire avec humour que c’est pas cool de faire tourner sa mère bigleuse en bourrique ! Je ne veux pas tomber dans le cliché du parent qui considère le handicap comme un sujet tabou, au contraire, sans le lui faire subir, je tiens à ce qu’elle le comprenne pour l’accepter. Nous sommes la famille dont nous avions rêvé. Même si c’est loin d’être tous les jours facile, nous communiquons comme avant, nous surmontons les étapes comme nous l’avons toujours fait, et je sais que mon bébé et moi nous serons complices. J’adore lui faire découvrir des choses, me promener avec elle dans son porte-bébé, l’initier à la musique, et j’ai du mal à la laisser, même si ces moments font du bien à notre couple. Je ne le disais jamais avant, mais cette fois la psychologue m’a appris à être fière de moi. Je suis fière quand j’entends Mona rire, fière de la voir grandir, fière quand je sais que j’ai réussi à l’endormir ou à la calmer.
Alors, à tous les jeunes parents qui souffrent de dépression, je ne vous dirai pas la phrase bateau que j’ai détesté entendre, à savoir que ça finit par passer. Je vous dirai plus tôt qu’il faut se faire aider, ne pas avoir peur des thérapeutes et des médicaments, car ces outils sont à notre disposition, justement pour nous guider vers le bout du tunnel ! Ils aident à retrouver les warriors en nous que les hormones ont, pour un temps, enterrés. Sachez donc que vous avez droit à des entretiens postnataux avec une sage-femme, mais aussi à des visites régulières chez la psychologue de la maternité. Ces visites sont entièrement prises en charge financièrement jusqu’au 1 an du bébé !!! Nous ne sommes pas au courant de tout tout de suite, mais le post-partum est un sujet de moins en moins tabou, et les aides et accompagnements sont de plus en plus nombreux.
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