Lors de sa fausse-couche, L. s’est rendue compte que le corps médical n’était pas du tout à l’écoute de ce qui lui arrivait. Ballottée entre sage-femme et médecin traitant, elle s’est sentie seule pour traverser cette épreuve. Heureusement, tous vos témoignages sur la fausse-couche publiés sur le blog, l’ont aidée à comprendre ce qui lui arrivait et à être plus sereine. Elle voulait remercie toutes les femmes qui avaient fait l’effort de déposer leur récit sur l’arrêt d’une grossesse et raconter à son tour son histoire pour celles qui viendraient lire La mariée en Colère pour se sentir moins seules. Voici son témoignage.
{Témoignage} Vos récits sur la fausse-couche m’ont accompagnés lorsque cela m’est arrivé
Bonjour,
Moi c’est L. J’ai 32 ans bientôt 33.
Je suis en couple depuis 10 ans et ensemble nous avons un petit garçon.
Je réalise à peine que la seconde grossesse de ma vie vient de se solder par un échec…
Je souhaite témoigner ici car vos récits sur la fausse-couche m’ont accompagnés durant ces quelques jours hors normes. Grâce à vos textes, vos voix, j’ai mis des mots sur les miens. Alors à mon tour je viens poser les miens. Pour tourner la page et aussi pour que d’autres se sentent moins seules.
A chacune son histoire.
Le 16 août. Voilà plusieurs jours que j’attend mes règles. Moi qui suis réglée comme une horloge ça fait 1 semaine que je cogite et que je sais à peu près ce qui m’arrive. Quoique, mon côté pessimiste me dit que je peux aussi avoir un pépin de santé. Après tout j’ai eu une conisation du col de l’utérus en 2018. Alors ce n’est pas forcément un petit être qui se crée, à ce moment même.
Alors je patiente, seule, sans le partager avec mon homme. Je veux porter seule ce mélange de sentiments, cette attente, comme pour la première grossesse. A un moment je ferai un test. Et puis je lui ferai la surprise !
Et puis je change d’avis. Après tout on a eu un différend il y a quelques mois sur le mariage, je lui ai fait une surprise, en lui faisant ma demande et puis ça ne s’est pas passé comme prévu… Alors fini les surprises.
De but en blanc je lui annonce : « Je devais avoir mes règles. Et elles ne sont pas là. ». Choc de 10 secondes. Puis.. « Mais il faut que tu fasses un test de grossesse ! ». Ben oui, je sais. On se sourit. Il était prévu ce second bébé, pas tout de suite, mais il était dans nos plans. Alors pourquoi pas. On la prend cette surprise !!
Lendemain matin : test positif. Sans aucun doute je suis enceinte.
Sur lendemain : prise de sang. Je trépigne au travail… Vite je veux savoir ! Positif. J’appelle mon chéri. Ça y est on peut réellement se projeter.
Et plutôt deux fois qu’une ! Lui pense à la chambre d’ami qui va disparaître, parce que ça y est on sera au complet. Il pense à comment on va le dire à notre aîné. Moi je pense au travail… J’angoisse même. Je viens de le commencer il y a à peine 5 mois, comment vont ils le prendre. Et puis je kiffe ! C’est le bonheur. Moi qui ai toujours voulu d’une grossesse surprise. Où on doit pas calculer quand le faire, combien de fois, etc. C’est juste parfait. Un peu tôt mais parfait. Alors quand on part acheter les affaires de la rentrée pour notre petitou, on trouve 2 doudous pour celui qui est encore notre secret.
Je prévois une échographie de datation. Pas obligatoire mais je veux savoir à combien j’en suis. L’autotest disait entre 4 et 5 semaines. Je galère à trouver mais finis par avoir un rendez-vous le 10 septembre. J’appelle l’hôpital et je sais qu’ils sont surchargés donc on place tous les rendez vous jusque décembre. 1 visite par mois. « Date du premier jour de vos dernières règles ?« . « 12 juillet« .
Bon, j’en ai marre, j’essaie d’avancer le rendez-vous de la datation. La première vraie écho’ ne sera pas avant mi octobre donc Doctolib est mon meilleur ami. Ah ! Je trouve un créneau pour le 1er septembre et je connais la sage-femme. C’est le jour de la rentrée mais pas grave.
30 août. 2 semaines après le test de grossesse à la maison. Je fais une séance de sport à 5h45 du matin comme depuis 6 mois. Du vélo d’appartement, avec une coach étrangère en fond sonore. Je suis à fond. Je ne ferai pas comme ma première grossesse, je vais être le plus active possible. Et éviter de prendre tous les kilos que j’avais pris.
Je pars à la douche. Tout le monde dort. Et c’est la douche froide. « Spotting », marron foncé. Bon.
J’avais eu ça durant ma première grossesse. Pas de panique.
En fait si, panique à bord. je fais des recherches sur Google. « Saignements, 1er trimestre ». « Normal durant le premier trimestre », « Allez consulter », « Appeler votre gygy », « Marron normal », « Rouge vif et caillot, allez consulter ». Put***.
Ma vie m’appelle. 1h de route. Boulot. Pause déjeuner. Pause pipi. Ca devient rouge. Boulot. Message à ma sage-femme. « Normal durant le 1er trimestre, on peut attendre de se voir à notre rendez-vous du 1er septembre« . Boulot. 1h de route. Maison. Rouge vif et caillot.
On discute avec monsieur. Je ne la sens pas là cette histoire. Google. Lamarieeencolere.com (vos témoignages). Mercredi. On recommence à vivre sa vie. En pissant le sang.
Jeudi. 12h. « Alors nous nous voyons pour une échographie de datation ?« . « Non. Je ne pense pas. Je vous ai écrit mardi, je saigne depuis 2 jours et je pense que ça correspond à une fausse-couche. « Ah. D’accord. On va regarder ».
Commence l’examen redouté. Les mots « débris », « embryon », « trop bas », « va partir ». Sont lourds.
Intuition et avis Google se confirment. Ben oui Google parce que je l’ai pas dit mais mon médecin traitant et son remplaçant et leur foutu standard n’ont pas daigné me prendre au téléphone. Quand je le pouvais.
Mon corps va expulser cette fausse-couche
Le rendez-vous touche à sa fin. Il faut que j’attende que mon corps l’expulse naturellement. Et puis dans mon désarroi j’y pense « Ne faut-il pas un traitement là, parce que je suis rhésus négatif, pour pas que mon corps combatte le foetus et crée des anticorps ? » (je l’avais eu durant ma 1ère grossesse). « Ah si ! Oui, il le faut ! On le fait demain ? Prenez-le avant de venir à la pharmacie et on prend rendez-vous demain 12h20 ?« . « D’accord ».
Je vous passe les détails. De toute façon c’est simple : je le perds. Petit à petit.
Lendemain. Je tente de joindre mon médecin traitant. Standard. J’explique que je veux un contre avis pour le traitement par rapport au rhésus. C’est le bon moment pour le faire ? Elle veut les détails avant de dire au médecin de me rappeler. Je ne veux pas raconter ma fausse-couche à une inconnu. Elle insiste. Je m’énerve. Vous voulez les détails. Tenez ! La médecin prend le relais. « Madame L.. Dites moi tout.« . Je craque.
12h20. Je suis dans la salle d’attente des sages-femme. J’entends des voix. Des clés. La première sage-femme passe, c’est vrai que c’est la pause déjeuner. Ma sage-femme passe aussi. « Ah ! Mais oui c’est vrai, j’ai encore un rendez-vous. Heureusement que vous êtes là« . Ben oui… J’aurais préféré être ailleurs moi aussi.
Je suis au bout de ma vie. Une fausse-couche. Et un corps médical qui n’en a que foutre.
C’est le weekend et les caillots pleuvent. Je ne sais pas si je l’ai perdu ou pas encore. Mais je pense que si. J’analyse chaque passage aux toilettes.
La décision est prise : le lundi je vais aux urgences gynécologiques.
En attendant je me dis qu’on est bien seule dans tout ce merdier. Une rage de dent aurait été prise avec plus de compassion.
Lundi soir après le métro-boulot-dodo, les urgences. Nouvelles épreuves. Paperasse. Salle d’attente. Une autre femme, arrivée après moi, passe avant moi. J’ai entendu que ça lui tirait en bas du ventre, qu’elle est à 3 mois. Elle est prise en charge en 20 min. C’est plus important le vivant que le mort alors moi j’attends. 1h.
Soulagement : mon corps a fait son job. Tout est clean. Pas de curetage. Et on peut réessayer quand on veut.
Alléluia.
Bilan.
Le corps a ses raisons que la raison ne connaît pas
Fausse couche précoce c’est ce qui m’est arrivé et il n’y a pas d’explication. Implantation trop basse ? Anomalies de chromosome ? Ma soirée où j’ai fumé la chicha ? Ma séance de sport ? Finalement peu importe. Le corps a décidé. Et ainsi va la vie. Cette surprise nous a mis du baume au cœur, nous a remis le pied à l’étrier : c’est parti pour le projet bébé numéro 2 ! Cette fausse-couche a été un coup dur. Mais ce qui ne tue pas nous rend plus fort. Phrase bateau mais tellement vraie.
J’ai rejoins le club des femmes qui ont fait une ou plusieurs fausses couche. J’espère forcément que c’était une erreur de parcours pour nous, la première et la dernière. Je nous le souhaite. Je pense à toutes ces femmes que je connais de près ou de loin et aux inconnues qui l’on vécu et j’espère du fond de mon cœur qu’elles ont eu toute la bienveillance nécessaire pour traverser ce moment terrible. Et qu’elles n’étaient pas seule. Je me suis sentie seule mais j’étais prête à donner un coup de pied dans la fourmilière pour qu’on m’écoute et qu’on s’occupe de moi à la juste valeur de ce qui m’arrivait. Ma santé, ma bataille.
L.
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Esther Benevolo dit
Bonjour L.
Merci pour ton témoignage. Tout ce que tu as vécu est loin d’être « faux », on pourrait plutôt appeler ton parcours « arrêt naturel de grossesse ». Qu’en dis tu? J’ai aussi traversé ce chemin dans ma vie et je suis très touchée par tes mots et par la solitude que tu exprimes. Comme toi, j’ai vécu le manque d’empathie, le manque de prise en charge de tout l’aspect affectif et émotionnel de cette histoire. La banalisation est réelle, elle rassure ceux qui nous entourent. Mais la grossesse, même si elle s’arrête plus tôt que prévu, est bien réelle, avec toutes ses attentes, toutes ses projections, tous ses espoirs. Je te souhaite de sortir de la culpabilité maternelle. Qu’elles qu’en soient les causes, tu n’es pas coupable. Et je te souhaite de trouver la paix dans ton coeur. Mon expérience m’aura poussé à devenir doula, pour mieux accompagner les instants de vie, les joyeux et aussi les tristes. Je te souhaite beaucoup de douceur envers toi-même. Belle journée à toi !