Marie-Elodie a accouché le 17 mars. Comme elle le dit, son bébé a déconfiné le jour du confinement. Une histoire dont ce bébé va entendre parler longtemps. Voici le témoignage de la jeune maman.
{Témoignage} Accoucher le jour du confinement
Bonjour à toutes les lectrices du blog,
Je suis Marie-Elodie, en couple depuis 12 ans, mariée depuis 2 ans et depuis 4 mois, maman d’un merveilleux petit Paul.
Avec mon mari, nous avions pris la décision 10 ans après notre rencontre, de nous lancer dans la parentalité. Il était temps ! Et en même temps, nous avions notre routine, parfaitement égoïste, d’un vieux couple qui ne pense qu’à lui.
Il a fallu 5 mois pour que je tombe enceinte. J’ai appris ma grossesse au travail. J’avais acheté un test un midi et alors qu’une réunion s’éternisait, je m’étais rendue aux WC faire ce test avant que je rejoigne des amies en ville. Je m’étais dit : « je ne peux pas faire la fête si je suis enceinte ». Pas de doute : deux barres sur l’écran ! J’ai quand même appelé mon mari pour lui annoncer la nouvelle : il devait être le premier (après moi, bien sûr) à savoir. Je m’en serai beaucoup voulu que mes amies l’apprennent avant lui.
Fin de grossesse et prémices du Covid
Ma grossesse n’a pas été un état de grâce, je n’ai pas forcément apprécié cet état, mais je ne l’ai pas détesté non plus. Je suis quand même partie en Afrique du Sud 3 semaines, j’ai maintenu le sport presque jusqu’au terme, j’ai fait une belle chute dans mes escaliers à 6 mois, j’ai animé une réunion jusqu’à mon dernier jour de travail précédant mon congé maternité et bien sûr … j’ai fait un after ! J’ai accouché à J+4 de mon terme. Bébé devait arriver le vendredi 13 mars mais il est arrivé le 17 mars, premier jour du confinement !
Alors que l’épidémie progressait, nous en rigolions encore un peu avant mon congé maternité avec mes collègues. Ma remplaçante avait même blagué « non mais en plus ils appellent ça le Coronavirus » et on avait tous ri. Mais, rapidement, dès février, je sentais qu’il se passait quelque chose d’inédit dont on ne mesurait pas la gravité. En effet, mon mari travaille sur un site industriel et a énormément de liens avec la Chine. Très tôt, ils ont reçu beaucoup d’informations de la Chine sur ce qu’il se passait et leur entreprise a mis en place des mesures et l’application des gestes barrières, bien avant que l’Etat n’en parle d’ailleurs.. On en parlait le soir et s’il se voulait rassurant, moi je commençais à avoir peur. Je me souviens que j’allais encore nager et me demandais « est-ce que ce virus peut survivre dans l’eau chlorée ? ».
Les jours passent et l’angoisse progresse, le gouvernement s’exprime de plus en plus souvent sur le sujet, on évoque la tenue ou pas des municipales, un possible confinement.. Ma famille vivant en Bretagne alors que nous vivons en région Centre Val de Loire, je me souviens que ma maman m’avait dit « je ne suis pas sure qu’on sera autorisés à venir te voir ». Si, elle avait su.
Toujours est-il que pendant que l’épidémie progresse, moi, je n’accouche toujours pas !
Arrivée au terme et toujours pas bébé
On m’avait prévenue « un premier arrive rarement beaucoup en avance ». J’entends bien mais bon, en moyenne, 1 semaine avant c’est un bon deal..
N’ayant pas accouché 15 jours avant mon terme, ma gynécologue m’a prescrit 1 monitoring chaque semaine jusqu’au terme. A chaque RDV, tout va bien. Le jour de mon terme, le 13 mars, arrive. Nouveau monitoring, et échographie pour vérifier s’il me reste suffisamment de liquide. Tout est parfait. Bon, Bébé se plaît où il est. La sage-femme me demande de revenir le dimanche 15 au matin pour un nouveau monitoring et une auscultation par l’équipe de garde. De retour à la maternité, le 15 mars, avec mon mari. Tout va toujours bien et apparemment, je suis ENFIN, à 1 centimètre de dilatation ! Elle m’annonce que ça peut arriver à tout moment (tu m’étonnes, je suis déjà à J+2..) mais que désormais, si ça n’arrive pas avant le 17 mars, je devrais me présenter ce jour-là, à 8h00 au même endroit dans lequel je me trouve actuellement.
Elle m’annonce aussi que je dois refaire une prise de sang pour la péridurale dès lundi pour que je puisse avoir les résultats pour le mardi ; mes anciens examens ne seraient plus à jour (et oui avec un bébé né après terme, les résultats sont dépassés..). J’ai déjà l’intime conviction que Paul naîtra avec un petit coup de pouce. En fait je l’ai toujours su. Une de mes amies m’a même rappelé que lors d’une soirée en février dernier, j’avais dit en blaguant « il peut arriver après terme.. ».
Dimanche 15 mars, les élections municipales ont lieu dans un contexte sanitaire exceptionnel. Je ne sors pas et demande à mon mari de ne pas aller voter car j’ai trop peur. Le lundi 16 mars, je vais au laboratoire refaire mes analyses en vue de la péridurale. Le personnel désinfectait déjà le TPV des CB et tout ce que les patients touchaient. On évoque avec une infirmière le confinement qui nous pend au nez. Je lui dis que je serai déclenchée le lendemain et que j’ai besoin des résultats demain matin dès 7h00 et qu’il faut les scanner à la clinique également. Et ce 16 mars, au soir, Emmanuel Macron annonce ainsi le confinement .. Je ne pense même pas aux conséquences : la solitude des prochains mois. J’ai juste super peur. Pour mon bébé, mon mari, ma famille..
Jour J : confinement et naissance de Paul
Finalement, le 17 mars, j’avais RDV avec mon accouchement. En partant vers la maternité, nous nous arrêtons au laboratoire vers 7h30 Pour récupérer mes fameux résultats. Et, alors que le confinement débutait à 12h, le laboratoire était déjà fermé .. Tant pis, go to la maternité quand même ! Les résultats avaient finalement été scannés (ouf !!).
Nous arrivons. Drôle d’impression. Une clinique complètement désertée. Personne. Même plus de secrétaire dans les services. Le vide, partout. On nous demande si nous avons des symptômes. Réponse négative. On ne nous donne pas de masque. On m’annonce qu’on va me poser un gel et qu’ensuite je devrais marcher pour faire commencer le travail. A 9h00, la sage-femme m’ausculte mais comme le dimanche lors du dernier monitoring, elle ne trouve pas mon col de l’utérus qui est placé sur le côté (?).
Bref, à 9h15, elle me pose le gel. Je reste 2 heures sous monito. A 11h, feu vert pour aller marcher. Elle nous dit qu’on peut aller marcher, faire des tours de parking mais c’est tout. Alors, on va marcher. Et je prends peur. Devant les urgences, une tente militaire et La Croix Rouge sont installées. Après 1h30 de marche et des minis contractions, nous retournons à la chambre. Il est 13h. On nous apporte à manger. La sage femme revient m’ausculter, et n’y parvient toujours pas. Le travail n’avance pas. Elle me dit « qu’est-ce que vous avez comme eau ! Dommage que vous ne rompiez pas.. ». Puis, ma gynécologue passe me voir. Super bienveillante, elle prend de mes nouvelles mais dès que je l’ai vue, j’ai su : « elle, elle va pas me lâcher ! ». Autant la sage femme qui n’arrivait pas à m’ausculter, me laissait tranquille, autant mon médecin n’aurait pas la même patience. Et, elle ne me lâche pas ! Moi qui ne suis pas douillette, je pleure à l’auscultation car ce foutu col est toujours sur le côté. Elle me caresse la cuisse en me disant « c’est super ce que vous faites, allez allez.. ». La sage femme passe sa tête par la porte : « tout va bien ? » et ma gynécologue lui répond « amène moi les pinces s’il te plaît ».
Plus tard, mon mari me dira « je t’entendais hurler et je vois la sage-femme passer avec des pinces ENOOOOORMES, j’ai juste demandé si tout allait bien et elle m’a dit « ne vous inquiétez pas! ».
Ma gynécologue me rompt alors la poche des eaux
J’avais l’impression de ne plus être enceinte. Elle me dit que maintenant, ça va s’accélérer. Je pleure encore, comme une enfant qui sanglote. Mon mari arrive et me réconforte. Très vite, la sage-femme revient et me dit « on va passer en salle de naissance maintenant ». Elle nous annonce que le CHU ne permet plus aux papas de rester mais qu’ici, en clinique, ils n’ont pas pu encore prévenir les familles. Alors, aujourd’hui, exceptionnellement, et avant que demain, tout ne change, les papas sont autorisés. Mon mari m’a donc accompagnée en salle de travail, et de naissance : quelle chance par rapport à tous celles qui ont été seules juste après ! On nous donne des masques à ce moment-là. Je n’ai toujours pas la péridurale et la sage-femme ne parvient pas à m’ausculter : encore et toujours ce col de côté ! Elle demande alors à l’anesthésiste de venir car les contractions sont bien arrivées, je commence à déballer des chapelets de grossièretés !
L’anesthésiste arrive, je le remercie à peu près 5 fois ! Et, oh bonheur, tout va mieux ! La péridurale fait son effet. La sage femme peut m’ausculter sans douleur. Les contractions sont là mais le travail n’avance pas, ou pas très vite, si bien qu’elle me dit « vous allez peut-être accoucher le 18.. ». Sauf que je tenais absolument à ce que ma gynécologue m’accouche !! Et elle accouche jusqu’à 22 heures ! Impossible donc d’accoucher après cette heure. Je mandate mon mari pour qu’il me fasse bouger, un coup à droite, un coup à gauche, il me soulève et maintient la jambe, puis l’autre.. La sage femme revient et miracle : je suis passée de 3 à plus de 7 ! Elle me dit alors « je ne vais pas vous accoucher car c’est ma collègue qui me relèvera pour la nuit qui s’en chargera, mais je vous annonce que c’est votre médecin qui vous accouchera, c’est une certitude maintenant ». Soulagement. A ce moment-là, dans ce tourbillon de l’accouchement, j’oublie le Covid. A 18h30, après 1h d’attente, on me repose une péridurale car la première (posée un peu tôt..) ne faisait plus d’effet. A 20h, ma nouvelle sage-femme vient voir comment ça se présente et me demande de commencer à pousser afin qu’elle puisse annoncer au médecin comment se présente l’accouchement.
Elle m’autorise à retirer mon masque.
A 20h30, ma gynécologue entre dans la salle de naissance : c’est parti ! J’ai l’impression de pousser mais que rien ne se passe malgré leurs encouragements. Je reprends mon souffle et ma gynécologue sort alors les spatules. Je pousse à nouveau et je l’entends dire « il va me faire mentir ce bébé, le voilà qui repart au galop ! ». Elle retire alors les spatules. Une petite déchirure plus tard, et je tenais contre moi, à 21h05, notre adorable petit Paul. Il a hurlé (déjà !) longtemps avant de trouver mon sein pour la tétée d’accueil. Ma gynécologue a alors dit « il a de la voix.. ».
Mon petit qui avait déjà compris le principe du confinement avait été déconfiné.
J’ai eu un merveilleux accouchement ! Alors que les couples qui ont suivi les jours d’après n’ont pas eu notre chance, mon mari m’a accompagnée et a découvert son fils normalement dans ce contexte extraordinaire ! Il n’a pas pu rester à dormir avec nous, mais il a pu venir nous vois tous les joues sauf le dernier jour où on nous a annoncé que les papas ne pouvaient plus rester la journée. J’ai pleuré sur le coup mais finalement, ce n’était tellement rien par rapport à l’immense chance que nous avons eue d’être ensemble pour le travail, la naissance et les 2 jours suivants !
En rentrant à la maison, je ne reconnaissais plus ma vie
J’étais partie sans bébé dans une ville vivante, je revenais avec un bébé dans une ville désertée. Finalement, on avait déconfiné Paul mais il fallait continuer à vivre confinés. Nous sommes donc restés collés-serrés jusqu’au 11 mai. J’avoue que le papa ayant repris le travail sur site, la solitude du congé maternité m’a parfois pesé, ne pas pouvoir présenter notre fils, ne pas pouvoir partager… Je ne sais pas si c’est lié à l’histoire de Paul, mais jusqu’à ma reprise, il n’a pas aimé dormir, pour ses siestes, ailleurs que sur son papa ou sur moi.. Nous voyons le positif de cette épidémie : nous avons pu avoir du temps tous les 3, seulement tous les 3. Le télétravail nous a permis de profiter encore un peu de notre bébé, et il a pu avoir une place en crèche plus vite que prévu « grâce » à ce Covid !
Bref, si cette épidémie a des points positifs, ce sont les conditions qu’elle a crées pour la naissance et les premiers mois de vie de Paul.
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Claire Cabréra dit
J’ai accouché 9 jours après la fin du confinement. Jusqu’à 2 jours avant je ne savais toujours pas si le papa pourrait être avec nous pendant le séjour et au final on a été confinés tous les 3 dans la chambre de la maternité pendant 5 jours. La sortie a été vraiment bizarre. Par contre pour la place en crèche, c’est le contraire pour nous. Le covid a réduit le nombre de place et j’ai dû prendre un congés parental à l’issue de mon congés maternité car on a toujours pas de place en crèche
Lefevre dit
J’ai pleuré en lisant cet article… effectivement on a eu de la chance par rapport aux autres, on me le répète sans arrêt… Mais le coronavirus nous a volé des moments aussi…
Mon bébé est né quelques jours avant le confinement, le jour où les visites on été interdites à la maternité pour nous. J’ai eu un accouchement facile et en journée je voyais déjà mes parents m’amener mon aîné en fin d’après midi… 5 min après la naissance on m’a annoncé « au fait on vous a pas dit les visites sont interdites depuis ce midi »… j’ai failli pleurer.
Mon aîné a découvert son frère quelques jours plus tard.
Puis on nous a annoncé la fermeture des crèches, écoles… j’ai pleuré j’allais devoir gérer mon « grand » de 18 mois en plus…
mes parents ont eux pu voir mon bébé (et m’aider) pendant 7 jours et c’est tout. Tous les autres l’ont découvert plus tard ou pas encore…
on a eu de la chance par rapport à d’autres mais oui immense regret, mon aîné n’est pas venu à la maternité, personne ne l’a vu, je n’ai pas eu ces moment où les gens d’émerveillent devant ce tout petit a demander si l’accouchement s’est bien passé..
Agnès dit
Mon bébé est né fin janvier. Le papa est retourné au travail très vite me laissant certains jours avec une profonde fatigue et frustration. Et lui ne voyait son fils plus qu’1h par jour alors qu’il était si petit !
Le confinement a vraiment était une chance pour nous 2 (3) avec le télétravail.