Agathe est en pleine dépression post-partum. Epuisée, elle est à bout de nerf. Son témoignage est très dur, mais il est aussi essentiel, car il brise un tabou, celui du mal-être maternel. L’énervement, la culpabilité… qui touche énormément de mamans. Voici son témoignage.
{Témoignage} Comment peut-on aimer un petit être si fort et regretter autant sa présence ?
Bonjour,
Drôle de titre, et pourtant c’est exactement ce que je me suis dit tout à l’heure en me rendant à l’évidence : ça ne va plus, c’est le retour du boomerang.
Il y a maintenant 1 an, à quelques jours près que je suis tombée enceinte. C’est un petit garçon. Je me réjouis du lien mère-fils que je vais créer avec lui.
Ma grossesse est merveilleuse.
En partie confinée suite au COVID-19, mais je profite quand même. J’ai la chance d’être écartée de mon emploi, j’ai tout mon temps pour moi et mon bébé. Je n’ai pas d’inconvénients hormis la fatigue au début, mais je peux me reposer comme je le souhaite. Je n’ai pas eu de douleurs ou trop d’inconfort. Bref tout se passe à merveilles.
Je suis relativement sereine. Mon accouchement a dû être déclenché et s’est terminé en césarienne. Je suis un peu dans les vapes pendant l’intervention et j’en oublie que je suis là pour accoucher. J’entends un bébé crier au loin et je me rappelle « ha mais oui c’est mon bébé, on vient de me faire une césarienne ! » J’avais oublié.
Ce n’était pas du tout ce que j’avais imaginé mais j’en garde malgré tout un bon souvenir et je suis contente de la façon dont se sont déroulées les choses.
Si je garde un bon souvenir de mon passage en salle de travail, ce n’est pas le cas pour mon séjour à la maternité
J’avais toujours entendu que c’était une bulle, que les mamans étaient tristes de quitter l’hôpital. Moi je n’avais qu’une envie, c’est de rentrer chez moi.
J’ai accouché en début de soirée. La première nuit s’est plutôt bien passée, j’ai pu dormir avec mon bébé sur moi, il se réveille environ toutes les 3h et dort beaucoup.
La journée se passe normalement. Le papa est là pour m’aider. La nuit arrive. Je l’allaite et je me sens maladroite. Personne ne m’a appris comment tenir mon bébé, le faire passer d’un sein à l’autre. J’essaie de réveiller le papa, mais il lui faut du temps pour émerger alors je culpabilise un peu de le réveiller pour 2 minutes. Bébé pleure un peu et là je me sens perdue. Je ne sais pas ce qu’il veut.
Il est 2h du matin. Je pleure pour la première fois.
Dans mon ventre, les organes se remettent en place. Je ressens les mouvements d’un bébé dans mon ventre pourtant vide. J’étais enceinte et je ne le suis plus. Je regrette déjà cette période sans soucis ni contrainte. Je me surprends à caresser mon ventre lorsque je marche, comme si mon bébé était toujours dedans.
J’essaie de regarder une photo de moi enceinte mais je n’y arrive pas.
Le lendemain matin je fais un malaise. En tombant j’ai le réflexe de protéger mon ventre et mon bébé. Tout en réalisant en me réveillant quelque secondes plus tard que je ne suis plus enceinte.
La matinée se passe comme tous les matins, avec beaucoup de vas et vient. Comme j’ai changé de service, on repèse mon bébé : il n’a pas pris beaucoup de poids depuis sa naissance, on me dit que s’il ne prend pas de poids d’ici la fin de journée il faudra donner un complément en biberon. Ça me fait peur car je sais que ce n’est pas l’idéal quand on allaite, en tout cas pas si tôt et que ça risque de compromettre mon allaitement.
J’ai proposé au papa de ne pas rester l’après-midi. J’essaie de me reposer mais je n’y arrive pas. Je pleure beaucoup.
Une infirmière me rassure concernant le poids de mon bébé « les balances des services ne sont pas toutes les mêmes, c’est normal qu’on ait l’impression qu’il n’a pas pris beaucoup de poids, ne vous tracassez pas ».
J’attends avec impatience le retour du papa le soir. Je me sens angoissée lorsque la nuit arrive. Il dort avec moi, mais comme j’allaite je ne veux pas le réveiller inutilement. Il est là et je me sens si seule.
Le lendemain, je pleure encore beaucoup. Aucune infirmière ne s’en est tracassée. Cela m’étonne qu’on ne nous demande pas comment nous allons, si ce n’est pas trop difficile. Et en même temps ça me convient comme ça car je n’ai du coup pas envie de montrer que je suis perdue. J’ai l’impression que ce n’est pas normal. Je voudrais tellement être chez moi.
Le soir, je propose au papa de rentrer à la maison car de toute façon la nuit je n’ai pas envie de le réveiller. Il sait que je me sens mal le soir donc il reste avec moi jusqu’à 23h environ.
Le lendemain c’est le jour où nous rentrons à la maison. Je me réjouis. J’en ai assez des va-et-vient du matin. J’en ai assez de cacher mes larmes.
A la maison, je vais pleurer tous les jours pendant les 3 premières semaines.
Je me sens triste. Ma vie est pleine de sentiments contradictoires : comment peut-on aimer un petit être si fort et regretter autant sa présence ? Je n’arrive pas à dormir en même temps que lui la journée. J’attends simplement qu’il se réveille pour la prochaine tétée, 2 ou 3 h plus tard. Je suis épuisée. C’est la canicule et pourtant j’ai froid le soir. Je n’ai plus faim.
Pour couronner le tout, j’ai un réflexe d’éjection dysphorique : lorsque j’allaite j’ai des émotions négatives.
Le temps passe et je me sens de mieux en mieux. Je pleure de moins en moins. Notre petit garçon est très calme, très vite, il ne se réveille plus vers minuit donc je peux souffler un peu et je ne redoute plus autant le soir. Il ne pleure pas beaucoup.
L’allaitement se passe relativement bien, bien que je sois constamment en questionnement. Je guette le moindre signe d’un problème.
Vers 3 mois, peu avant la date anniversaire, il a commencé à moins bien prendre le sein (ça lui était déjà arrivé mais après 2 ou 3 jours ça va mieux). Il se retire et pleure. La pédiatre a suggéré que c’était le pic de croissance. Sauf que ça dure environ 15 jours.
Il ne dort pas très bien la journée, il n’a jamais vraiment bien dormi mais là je n’en peux plus. J’en ai assez de m’en occuper toute la journée sans avoir le temps de faire autre chose. Lorsqu’il dort enfin, j’en profite pour faire une tâche ou l’autre. Je n’ai plus de temps pour moi.
J’en ai marre de « devoir » jouer avec lui.
Et je m’en veux d’écrire ça. Je guette le moindre signe de fatigue pour le mettre au lit pour avoir du temps pour moi. Sauf qu’il ne dort pas bien sûr. Et parfois il est fatigué mais pleure et n’arrive pas à s’endormir. Il pleure beaucoup plus souvent aussi lorsqu’il tête. J’ai l’impression qu’il a faim mais qu’il est aussi fatigué et du coup n’arrive pas à téter et c’est un cercle sans fin.
Ces jours-ci je regrette le temps de ma grossesse où il était là mais j’avais du temps pour moi. J’en ai marre de lui, puis quand je le vois sourire alors que je viens de lui dire « tu m’emmerdes à ne pas dormir » je culpabilise. Je culpabilise de perdre patience, de ne pas m’être occupée de lui correctement pendant la journée.
Son papa me rassure dans mon rôle de maman. Si ça continue je crois que je me ferai aider afin d’avoir un espace de parole. Ça fait déjà du bien de pouvoir venir mettre des mots ici sur ce que je vis, merci pour votre écoute.
Vous souhaitez publier votre histoire sur le blog ? Déposez votre témoignage mariage ou témoignage maternité ici.
Claire dit
Encore un sujet auquel les mamans sont trop peu préparées. Du jour au lendemain elles ont le sentiment d’être lâchées en pleine nature, et la solitude n’aide pas. De plus en plus de personnes travaillent dans le but de diffuser de l’information sur le post-partum et notamment la dépression, et j’espère sincèrement que ça fera vite son effet!
Leati dit
Coucou je te suggère d en parler à une puer de pmi (peut etre plus accessible dans un premier temps qu un psychologue ou un psychiatre). Elles ont l h abitude de ce genre de situation. J ai moi moi-même ete puer en pmi durant qq années et si ca peut te rassurer c est quelque chose que j entendais souvent…. les mamans culpabilisaient bcp d en parler ou plutot, de s entendre dire certaines choses à voix haute. Souvent elles avaient tout gardé pour elle de peur d etre jugé par leur conjoint ou famille et du coup elles craquaient avec nous ,c etait liberateur et ca enclanchait le début d une prise en charge pour aller mieux. Apres il faut aussi dire que les debuts ne sont pas simple et qu il est normal les.premiers mois voire la premiere annee d etre tres fatiguée,de ne pas avoir de temps pour soi et que le bebe dorme peu et de façon anarchique. Il faut du temps pour trouver un rythme de croisière. Bon courage !
Soweit dit
Bonjour Agathe, vos journées semblent très chargées, je comprends que vous ayez envie de temps pour vous, avec tout ce que vous faites pour votre bébé. Avez-vous quelqu’un pour prendre le relai ? Votre conjoint qui pose un congé, une amie, un parent, bref quelqu’un qui vous permette de vous échappez 2-3 heures pour prendre l’air, seule. Pour faire quelque chose pour vous.
Vous pouvez également vous renseigner, si cela vous parle, sur les dispositifs de portage (écharpe, manduca…). Cela apporte au bébé une proximité avec la maman et ça apaise certains bébés qui dorment lorsqu’ils sont portés. Et ça libère les mains de la maman qui peut faire autre chose pendant ce temps !
En parallèle je rejoins les personnes qui vous recommandent de trouver quelqu’un pour en parler : une sage-femme, un psy, un médecin, une association, peut-être tout simplement la PMI ? En tout cas quelqu’un avec qui vous vous sentiez en confiance, quelqu’un de bienveillant et qui ne sera pas dans le jugement. Le plus dur c’est de faire le premier pas, vous en avez fait un en écrivant sur ce forum : faites le suivant !
Agnès dit
Je suis totalement d’accord avec Emily. Il est normal en temps de jeune parent d’avoir des doutes, de la frustration, des moments de découragement. Mais ça ne doit pas être tous les jours, ce n’est pas normal de pleurer tous les jours, dêtre sans arrêt découragée. Un enfant ne peut pas aller bien si ses parents ne sont pas bien, j’en suis convaincue. Ca peut expliquer les problèmes de sommeil et d’allaitement. Votre état d’esprit joue beaucoup sur votre enfant. Une grosse part de la solution pour moi est que vous parveniez à changer d’état d’esprit et ça ne peut se faire qu’avec une aide extérieure.
Je n’ai pas fait de dépression post-partum mais quand j’étais plus jeune (14 et 18 ans) ma mère a su détecter que je n’allais pas bien et m’a fait prendre un rdv chez un psy. Il ne résout pas les problèmes de la vie quotidienne, ce ne sont pas des méthodes pour mieux s’organiser ou mieux gérer son stress mais ça permet un changement de point de vue, un recul, qui est salvateur.
Je vais faire un parallèle avec une situation très différente mais qui me semble parlante. Quelques mois après mes rdv psy à 18 ans, ma meilleure amie qui était en prépa comme moi mais d’un niveau supérieur a fait une tentative de suicide qui heureusement a été prise en charge à temps. Quand je lui ai dit que j’avais été voir un psy car je n’allais pas très bien non plus, elle m’a demandé pourquoi je ne lui en avais pas parlé et qu’elle en aurait sûrement vu un aussi si elle l’avait su. Pour elle voir un psy voulait dire être folle. Si elle l’avait fait, elle n’aurait peut-être pas fait un geste aussi extrême. Finalement Il lui a fallu près d’une année de thérapie. Maintenant c’est une heureuse femme mariée avec 2 enfants.
Cette anecdote pour vous dire de ne pas attendre, d’oser franchir ce pas qui sera un réel soulagement et qui vous permettra, je n’en doute pas, de recréer ce lien d’amour pur entre votre enfant et vous. Ca peut prendre du temps mais plus tôt vous le ferez, plus vite ça s’arrangera.
Bon courage à vous Agathe.
Soline dit
Le premier pas est fait tu as posé des mots sur des maux ce que tout le monde n est pas capable de faire. C est ma sage femme qui a diagnostiqué ma dépression post partum parce que je lui ai dis au fur et à mesure ce que je ressentais pendant nos séances de rééducation… parce que c était un moment pour moi avec une adulte et non pas un moment avec un adulte une petite fille et un bébé et la gestion du quotidien. Il existe des associations maman blues… il existe des équipes de psychiatre spécialisé dans la périnatalité ( ça a été mon suivi). Le second pas est de commencer à en parler à une professionnel de santé. Il n y a pas de honte à penser ça… à regretter d être devenue maman… nous sommes toutes des personnes avec nos propres façon de voir les choses… dans la dépression post partum il y a beaucoup de culpabilité et le travail sera à faire là dessus… courage, soyez forte… ça ira mieux c est sur. Parole d une maman qui est passé par la 🙂
Charlotte dit
Bonjour,
Je me reconnais tellement dans votre témoignage, je comprends tellement ce que vous traversez. Vers les 3 mois de mon bébé, ma gynécologue, qui a su détecter mon mal-être, m’a orientée vers une psychologue qui travaille avec l’hypnose. Au bout de 4-5 séances, ça allait déjà beaucoup mieux, et ça a également permis de « faire sortir » d’autres choses. Aujourd’hui, mon bébé a presque un an (déjà !), dire que tous les jours sont roses serait mentir, mais mon état d’esprit par rapport aux journées (ou nuits !) difficiles est différent. Je sais aussi qu’au besoin, je peux recontacter cette psychologue, je sais vers qui me tourner. Et c’est rassurant 🙂
Vous êtes la meilleure maman que votre enfant puisse avoir, peu importe que vous fassiez comme la voisine, la cousine ou votre propre maman. Il a énormément de chance de vous avoir ! Beaucoup de courage à vous !
Morgane dit
Bonjour,
Je n’ai vécu aucune dépression post partum en 3 grossesse donc je ne peux pas t’aider la dessus à part en parler rapidement à ta sage femme qui sera t’aider.
Pour l’allaitement le plus rapide est de prendre rdv avec une conseillere en lactation ibcl qui sera te donner toute l’aide nécessaire pour que ton bébé se sente mieux et toi aussi. Ton réflexe d’éjection dysphorique n’aide pas non plus ta dépression post partum donc il faut au plus vite te faire aider. Tu peux utiliser un receuil lait en silicone ou tirer un peu de lait pour le donner en complément à ton bébé après la tétée. La seule chose à faire est de trouver l’aide dont tu as besoin et ça ira sûrement mieux pour ton fils qui ressent tes émotions malgré lui et ne doit pas comprendre ce qui se passe.
Tu as fait la 1ere étape mais continue et dans quelques temps vous irez mieux avec de l’aide. On est pas des super woman et il ne faut pas avoir honte de demander de l’aide si besoin. Courage
Emily dit
Bonjour,
Si je peux me permettre, pourquoi attendre d’être au point de non retour pour demander de l’aide? Vous allez finir par le détester et le retour à la normale sera plus difficile encore. N’attendez pas et demandez de l’aide à votre sage-femme, spécialiste en lactation, pédiatre ou gynéco. Il y a bon nombre de spécialistes pour vous aider.
Votre première action, vous venez de la faire, la machine est lancée. Jetez vous à l’eau. Il n’y a rien de mal à se faire aider, c’est faire preuve d’une grande humilité.
Vous êtes sur la bonne voie. Et n’oubliez-pas, PERSONNE n’est parfait(e)!
Bon courage.
Anne Philippe dit
Je suis actuellement enceinte et je suis infirmière. Lors de mon stage à la maternité nous avons eu une maman qui a commencé une dépression post-partum…contrairement à vous nous l’avons aidé… aller voir une psychologue et/ou une sage-femme…vous serez sur Strasbourg je vous conseillerai la mienne elle prends le temps d’écouter de rassurer et elle fait en même temps des consultations de lactation…
Ce que je peux vous dire de suite ce n’est pas de vous en vouloir… la chute des hormones peut-être très violente pour les femmes…Dans mon cas la maman avait totalement arrêté son allaitement au sein et était passer au biberon de suite… je vous souhaite plein de courage prenez soin de vous…
Emily dit
Je ne sais pas pourquoi vous vous adressez à moi, je ne suis pas la personne concernée par ce post.
Soda dit
Bonjour,
Tout d’abord tu es une bonne maman. T’es sentiments contradictoires sont normaux. Pleurer tous les jours par contre non. Tu as besoin et tu as le droit d’être aidée.
Comme conseillé, vois avec ta sage-femme.
Discutes en avec le papa. Demande à un proche de garder qq heures ton bébé pour faire un truc rien que pour toi sans te stresser.
Tu as mis au monde un bébé que tu as fait grandir en toi. Tu es une warrior ! Entre la fatigue, les difficultés pour allaiter, les hormones… Tu as le droit d’aller moins bien. Tu n’es pas obligée de garder tout pour toi. Avoir écrit ton mal être est un grand premier pas. Fais lire ce texte à ton mari, a ta mère, ta meilleure amie. Tu n’es pas seule. Concentre toi sur les réussites et les progrès (être douchée habillée avant midi, avoir pris des nouvelles d’un ami, avoir regardé un épisode d’une série, commande toi un bon repas, gazouillis et sourires de ton bébé, une musique qu’il apprécie…
Souffle. Tant pis si le salon est pas nickel, si llinge déborde…
Fais toi aider, fais toi confiance