Je suis le travail de Cécile depuis mes débuts de blogueuse. Fan de sa manière d’appréhender la photographie de mariage, je lui ai même laissé une petite place dans mon second livre. Il m’a donc semblé tout naturel de me tourner vers elle pour lui demander comment elle traversait cette crise. Voici ses réponses à mes questions.
Prénom / Nom : Cécile Creiche
Profession : Photographe
Site Internet : www.cecilecreiche.com
Date de création : 2008
Combien de mariages annulés pour vous en 2020 ?
Face à la crise sanitaire il y a 2 catégories de mariages:
– annulés totalement : pour ma part j’en au eu 3 ce qui représente une perte d’environ 10 000 €
– décalés en 2021 : 9 mariages soit environ 30 000 €
Je ne compte pas les ventes additionnelles totalement perdues (tirages, albums, etc.).
Comment s’est passée cette année ?
L’année a été compliquée en terme de stress. Je n’ai, pour le moment, personne de mon entourage proche touché par le virus, je mesure donc ma chance.
Néanmoins le premier confinement a été très éprouvant : 2020 s’annonçait être une très grosse année – chiffre rond oblige, début de décennie, etc. Je m’étais préparée tant physiquement que matériellement à dévorer cette année et peut-être prendre ma retraite 🙂
J’ai changé mon matériel en janvier et investi dans plusieurs équipements. Brillante idée…
Les annonces de mars m’ont scié.
Je voyais ma saison s’effondrer jour après jour.
Je passe les litiges à régler avec certains clients et les échanges avec mon avocat…
Fin juin, les mariages qui n’avaient pas été repoussés ont pu être célébrés.
J’ai vu de tout : des gens masqués tout le temps, des gens masqués uniquement s’ils étaient debout, des gens qui s’en foutaient, des protocoles différents d’une mairie à l’autre, des mariés avec l’autorisation d’être « découverts » pour l’échange des vœux, des mariés « 100% couverts » où personne n’a pu entendre le « Oui ».
Je me suis vue flipper, râler, puis comprendre et accepter.
Je me suis entendue pester sous mon masque car certains invités n’étaient pas masqués lors du cocktail et se collaient à moi puis être sur la piste de danse et me dire que je les comprenais tellement. Quand tu vas au mariage de ton meilleur pote, de ta cousine, de ton fils, t’as juste envie de profiter du moment et oublier toutes ces contraintes.
J’ai toujours travaillé masquée, même si c’est ultra chiant et que je voyais ça comme une barrière dans les échanges que j’ai avec les clients . Un jour, au retour d’un mariage, j’ai reçu ce message d’une invitée « encore une fois bravo pour ton travail et ton smile qui se voit même derrière un masque. Tu as été super. Les photos seront forcément à ton image ».
Ça m’a fait un bien fou et ça a été le déclic : bosser avec un masque n’était finalement pas un frein. L’énergie que tu mets dans ton travail reste la même et les gens la ressentent.
En parallèle j’ai aussi été témoin de formation de clusters dûs clairement à la connerie humaine – des invités cas contact +++ qui viennent quand même le jour J …
Je ne digère pas très bien le fait de mettre en danger la santé des autres (et la mienne au passage), de surcroît la santé de ta famille sous prétexte de vouloir t’amuser.
Je ne m’étendrai pas sur le sujet mais pour moi il était sûr que la deuxième vague serait catastrophique.
L’année a été faite de hauts et de bas. De contradictions avec moi-même, d’envie de pleurer nerveusement partagée avec le désir de faire la fête avec mes mariés. La vie m’a appris a relativiser, à savourer mon confort, à apprécier les bonheurs simples qu’on ne perçoit plus dans nos quotidiens délirants. Je prends les nouvelles comme elles viennent et me prépare à de nouvelles annonces plus strictes.
Avez-vous eu des aides, si oui combien, quelles démarches avez-vous du faire ?
Je vis dans la métropole de Lyon et j’ai pu bénéficier quelques mois de l’aide territoriale. 1000€ pendant 3 mois. J’ai aussi bénéficié des aides de l’état plafonnées à 1500€/mois.
Comme j’ai continué de me battre pour travailler je ne l’ai pas beaucoup touché.
Je préférai travailler et toucher moins d’aides, ma santé mentale en dépendait.
Les plus grosses aides sont venues de mes clients : des mails sympas de réconfort et de soutient, des clients qui ont du décaler leur mariage mais qui ont souhaité payer le solde à la date prévue, d’anciens clients qui ont fait appel à moi pour des séances familles ou du corporate. Je leur en suis sincèrement reconnaissante car c’est grâce à eux que ma petite société survit.
Comment s’annonce votre saison 2021 ?
Pour ma part 2021 est quasi complète – entre les reports 2020 et les « vrais 2021 » je suis assez optimiste.
Côté couples je pense qu’ils sont inquiets, certains sont dépités car ils ont déjà du repousser la date 2 fois (voire plus).
Je sais ce qu’ils traversent et reste en contact avec eux pour leur remonter le moral s’ils en ont besoin. Ces mariages là auront une saveur différente, un goût de bonheur et de victoire. Il me tarde d’y être.
Comment est l’état d’esprit des autres prestataires mariage que vous connaissez ?
Il y a des gens comme moi, sur qui les infos coulent, qui attendent que ça passe, tapent dans leur trésorerie et qui n’ont même plus mal.
Il y a ceux qui ont réussi à sortir du 1er confinement fortement blessés mais pas morts qui voient 2021 comme un coma : ça passe ou ça casse.
Et il y a ceux qui déposent le bilan, qui perdent tout.
Tout dépend des structures. On ne peut pas comparer un traiteur avec un loyer énorme et 30 salariés face à un photographe indépendant comme moi qui n’a que lui à gérer.
J’ai très peur pour les traiteurs et les salles. Ils ont des frais fixes qui peuvent les faire rapidement plonger.
Pendant cette période de pause obligatoire, que faîtes-vous ?
J’ai eu besoin de faire un break face à toutes ces infos anxiogènes lors du 1er confinement. J’ai un cadre de vie magnifique et j’avais du boulot en retard dans le jardin. J’avoue, j’ai passé mes nerfs sur les bambous qui envahissaient le terrain 🙂
Pour ma com’ je n’ai pas fait grand chose, Instagram et son algorithme ont fini de m’achever.
Quitte à faire une coupure avec ce système fou autant ne pas me prendre la tête avec internet.
J’ai fabriqué plein de masques en mars et avril. J’avais l’impression d’être utile et ça m’a fait du bien.
J’ai d’autres activités professionnelles à coté de la photo qui m’ont aussi pris pas mal de temps et d’énergie.
Je suis un peu hyperactive, je continue de l’être mais de façon plus raisonnée.
Depuis juin j’ai repris les prises de vues, je fais des portraits de famille et pour les entreprises ce qui m’a permis de passer l’année en limitant la casse.
Ma grande nouvelle de 2020 c’est que je me prépare un joli studio dans un endroit fou et décalé. Je peaufine ça, je prends le temps qu’il faut sans me mettre de pression.
Quels conseils donneriez-vous aux autres pros de votre secteur d’activité en attendant de pouvoir recommencer à travailler ?
Variez vos clients et vos activités, ne misez pas tout sur le mariage.
Je l’ai toujours dit et l’actualité me donne malheureusement raison.
Prenez l’air pendant 1h et coupez ces foutus réseaux qui nous rendent fous.
Vous êtes prestataire de mariage et souhaitez nous parler de votre situation, n’hésitez pas à laisser un commentaire.
Babouch dit
Ahhhh que c’est bon de te lire Sainte Cec😍😘 je me suis tellement reconnue dans tes mots( ici aussi le jardin fut salvateur). On continue, on reste debout et on apprécie ce que l’on a encore. #positivattitude