Syndrome du jumeau perdu : lettre à ma fille si unique

Emilie était enceinte de jumeaux, mais l’un d’eux s’en est allé pendant la grossesse. Comment expliquer le deuil périnatal à sa fille qui n’aurait pas du naître unique ? C’est la question que la jeune maman se pose et pour y répondre, elle a souhaité écrire une magnifique lettre à sa fille, si unique. la voici.

{Témoignage} Le décès périnatal d’un jumeau, lettre à ma fille

Bonjour,

J’ai écrit une lettre à ma fille que je voulais vous copier.
Elle a 3 ans, et nous ne voulons rien lui cacher.
Elle était jumelle, mais elle est née seule.

À ma fille, mon amour, mon ange, mon rayon de soleil…

Quand tu seras plus grande, je t’expliquerai que tu es arrivée dans nos vies comme apparaît l’arc-en-ciel après la pluie.
Je te raconterai que tu as grandi en moi, sans que nous t’attendions, mais que nous étions prêts à tout chambouler pour toi.
Tes frères te diront qu’ils t’appelaient « Pioupiou » et qu’ils n’avaient qu’une hâte : découvrir leur petite sœur.

Je te conterai qu’à l’intérieur de moi, vous étiez deux. Deux petits êtres très semblables, avec deux cœurs qui battaient à l’unisson, ou presque, et qui faisaient chavirer mon cœur. Tu sauras tout de ton histoire, de votre histoire, de notre histoire.

Quand j’ai su que j’étais enceinte, j’ai su que cette grossesse serait particulière. J’ai senti que vous étiez deux, et j’ai eu peur. J’avais peur de voir ma vie changer du tout au tout, peur de ne pas réussir à m’occuper convenablement de vous… Passer de deux à quatre enfants susciterait de l’appréhension chez beaucoup, je pense.
Mais après t’avoir vu à l’échographie avec ton frère, Papa et moi voulions plus que tout vous garder auprès de nous, coûte que coûte. Pourquoi ça n’a pas été le cas ? Je ne sais pas. Nous n’avons pas eu d’explication. Mais peu de temps après, la nouvelle tombait : il s’était éteint, et tu étais en mauvaise posture. Il ne te restait pas assez de placenta pour te développer à cause d’un gros décollement.
Alors j’ai pleuré, beaucoup. J’ai pleuré pour ton frère qui ne vivait plus, et j’ai pleuré parce que je voulais te garder. J’ai pleuré parce que c’était injuste, et parce que je ne comprenais pas ce que j’avais pu faire de mal.

Les vomissements, les nausées, les vertiges… Tout s’est envolé en même temps que ton petit frère.
Le médecin a dit que tu suivrais probablement le même chemin. Pire encore, il a dit qu’il faudrait sûrement renoncer à toi d’ici quelques mois car ton cœur devrait s’arrêter quelques mois plus tard.
Alors j’ai suivi scrupuleusement ses conseils, je n’ai plus bougé. Je n’ai plus fait aucun effort physique. J’ai prié le ciel. Et je t’ai supplié de te battre et de tenir le coup. Je t’ai promis de prendre soin de toi, comme de tes grands frères. Je me suis promis de ne plus jamais rien demander, si seulement mon vœu pouvait être exaucé.
Et contre toute attente, toi, notre jolie petite guerrière tu as poussé ton 1er cri un 24 septembre. Cette journée était mémorable. Nous t’avions tellement attendue, nous avions tellement espéré que la souffrance serait derrière nous.

Tu étais, tu es, tellement parfaite.

Ta naissance a soulevé des questions… Ressentiras-tu un manque, malgré tout l’amour qu’on te portera ? Penseras-tu, comme moi à chacun de tes anniversaires, que vous auriez dû être deux ?
Et de façon bien plus sombre, culpabiliseras-tu d’être là alors que lui n’est plus ?

Mon amour, je voudrais te dire que tu n’es coupable de rien, si ce n’est d’avoir apaisé nos cœurs et d’avoir inondé notre vie de bonheur. Tu étais jumelle, et tu es née seule. Mais tu es unique. Tu ne fais rien comme tout le monde. Tu as une fossette que personne n’a. Tu fais tout différemment des autres. Tu es intelligente, belle, malicieuse, forte et fragile à la fois.
Tu ressembles à une magnifique poupée avec tes longs cheveux bouclés. Ton rire envoie des millions de papillons dans mon cœur.

Ton frère n’est plus là où nous sommes, mais il veille sur nous et fera toujours partie de notre famille.

Tu es le miracle de nos vies, et nous ne remercierons jamais assez le Ciel de nous avoir permis de t’avoir auprès de nous. ❤️

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