En décembre dernier, Catherine avait laissé un commentaire sous le témoignage d’Audrey, concernant le nom de famille à donner à un bébé de parents non mariés. Sa fille est dans le même cas, elle va devenir maman et a décidé de donner le nom de famille du futur papa à son enfant, ce qui ne plaît pas du tout à la future mamie. Puis elle a réfléchi et en a discuté avec sa fille… voici son témoignage.
{Témoignage} Le nom de famille d’un bébé né de parents non mariés
Bonjour,
Je m’appelle Catherine et j’ai 53 ans.
Il y a quelques temps, j’ai évoqué la douleur que j’ai éprouvé lorsque j’ai appris que ma fille qui est enceinte allait donner uniquement le nom de famille de son conjoint à leur fille. Et je souhaite revenir sur le sujet car la situation dans mon esprit a évoluée.
Pourquoi je voulais que ma petite fille porte mon nom
J’ai élevé ma fille seule, elle porte mon nom. Elle n’a que très peu connu son père, j’ai dû fuir il y a 21 ans avec mes deux enfants pour nous protéger.
De mon côté, je suis issue de parents dysfonctionnels. Nous étions 6 frères et sœurs, mais notre famille a implosée après une plainte que j’ai déposée pour abus sexuel. Oui.. le tableau n’est pas réjouissant.
Toute ma vie j’ai eu le sentiment de devoir recoller les morceaux et de réunir au moins notre fratrie. Pour moi, nous devions surmonter cette épreuve pour nos enfants, qu’ils se connaissent et forment une nouvelle génération saine, aimante, et unie. Mais malgré tous mes efforts, rien n y a fait.
Mes enfants ont donc grandis sans famille, ou disons que notre famille se résumait à nous trois.
Lorsque ma fille a rencontré son compagnon, un homme aussi génial qu’elle, sa famille a lui, très unie, l’a accueillie les bras ouverts. Depuis deux ans nous passons Noël ensemble, mon fils et moi sommes accueillis également et cela fait vraiment chaud au cœur c’est joyeux, chaleureux. Et je leur suis tellement reconnaissante d’offrir à mes enfants ce que je n’ai jamais pu leur offrir !
Malgré cela, lorsque ma fille m’a appris qu’elle ne donnerait à la sienne que le nom de famille de son conjoint, cela m a déchiré le cœur. Comme je l’ai expliqué dans mon commentaire, j’ai eu l’impression d’être sale, que mon nom était sale. Aussi, d’être l’étrangère de la famille, et d’être reniée par ma propre fille.
C’est bien sûr totalement exagéré mais c’est réellement ce que j ai éprouvé.
Et puis il y avait aussi un aspect féministe
Une impression que ma fille s’effaçait pour son conjoint, pour un homme, et que c’était le message implicite qu’elle allait suggérer à la sienne. Bref. Des valeurs totalement opposées à ce que j’ai toujours essayé de lui inculquer.
Quelques jours sont passés après cette déflagration intérieure que j’ai vécue. J’ai hésité, mais cela a été plus fort que moi, j’en ai parlé à ma fille… qui l’a très mal pris Elle pensait que j’interférais dans sa vie, que je cherchais à la manipuler etc.. Mais pas du tout. Je m’étais seulement dit que je ne pouvais pas rester dans le non dit, que cela allait interférer négativement dans notre relation, et que peut-être elle n’avait pas réfléchi plus que cela. Enfin, je suis franche, je ne pouvais pas vivre dans un mensonge, être tout sourire avec ce poids sur le cœur.
Nous nous sommes un peu disputées puis nous avons discuté. Ma fille est franchement incroyable, presque (ou carrément) plus mature que moi ! Pour elle, il y a le nom, et il y a les valeurs. Ce sont deux choses différentes. Les valeurs et la force, me dit-elle, celles que je lui aurais transmit, elle les transmettra à son tour à sa fille. Mais son amour pour son conjoint et le fait qu’elle ait la chance de sentir le bébé valent qu’elle lui donne le nom de son compagnon. Certes… pour moi cela ne suffit pas.. ce n’est pas une raison pour effacer son propre nom. Alors j’ai réfléchi, encore et encore, autant au sens de ma douleur (tellement forte qu’elle en devenait physique) qu’au sens de son choix.
Les nuits portent conseil dit on… et c’est vrai. Il y a aussi le fait que j’ai pu en parler avec des amies, qui m’ont comprises.
Ce matin, lumière !!
Je me rends compte que oui… le choix de ma fille est parfaitement légitime, et même salvateur !
Car ce nom de famille est celui d’une famille aimante et unie ! Elle n’a pas de «capital» affectif avec ma famille ! Ceux qu’elle a connu nous ont tourné le dos. Alors… elle a fait le choix heureux d’un nom de famille aimante et secure pour sa fille.. Et non seulement c’est heureux pour sa fille et pour la vie de ma fille et de son conjoint, mais en plus cela m’a permis de lâcher prise avec ma famille et cette sorte de mission de sauvetage qui était ancrée en moi depuis si longtemps et qui agissait comme une emprise.
Aujourd’hui je suis sereine, heureuse, Heureuse !
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Bullinette dit
Merci pour ce beau témoignage. De notre côté, ça a été aussi une grande réflexion. Et la législation n’est pas la même: pas de double nom et en cas de mariage, possibilité de changer le nom pour l’ensemble de la famille. Mais voilà, la question du nom pose aussi la question du mariage. Si je ne suis pas à fond mariage, je ne suis pas contre non plus. Mais mon côté romantique a un peu de peine à choisir de se marier pour des raisons purement administratives. Alors nous sommes passés de deux à trois sans nous marier. Et la question du nom s’est posée alors que mon corps portait cette nouvelle vie, que je sentais en permanence avec moi. Et du coup, il m’était impossible de ne pas la lier à moi avec le nom. J’étais consciente qu’il y avait forcément un perdant mais à l’époque, ça ne pouvait pas être moi. Et puis cela faisait partie de mon combat pour plus d’égalité. Mon homme était très ouvert et a accepté sans aucun souci. Cela fût dur pour ses parents. Ma fille est née, ses cousines aussi, puis mon fils est né, et encore des cousines. Pour mes parents, qui ont élevé trois filles, ils ne sont pas plus fiers que cela que leur nom perdure. Au contraire, ils attendent un mariage. Pour les parents de mon compagnon, la question du mariage devient plus pressante. Car si nous nous marions, je prends son nom et les enfants aussi. Mais le temps presse, à 4 et 2,5 ans, ils vont bientôt intégrer leur nom dans leur personnalité. Et nous, eh bien nous hésitons. Cela n’est pas au programme pour le moment mais jusqu’à quand??? (Et ne parlez pas à mon compagnon de prendre mon nom en se mariant, cela tuerait ses parents!)
Emilie dit
En Belgique, quand un enfant naît alors que les parents ne sont pas mariés, il porte le nom de famille de sa mère jusqu’à ce que le papa reconnaisse l’enfant. Ma fille a donc porté mon nom, celui de son Papou et de son arrière-grand-père pendant quelques jours 💖 C’est important pour moi parce que ces deux hommes représentent beaucoup à mes yeux 💖
Et puis le papa de ma fille s’appellent Van Hazendonk, on s’est dit que c’était déjà bien assez compliqué à écrire 😂 Pas besoin de rajouter le mien 😅 Élise Van Hazendonk Mallien… C’est quand même lourd à écrire sur les documents administratifs, dans les marges à l’école,…
Mais ma famille et mon nom me tenait à coeur, donc c’est son 4e prénom 😊
Et avec ma maman, on partage la première lettre de nos prénoms : Evelyne, Émilie et Élise 😍 La boucle est bouclée 💝 Un vrai bébé d’amour et de compromis finalement 😜
Cline dit
Bonjour Catherine,
Pour ma part, comme c’est le cas (et finalement un peu pour les mêmes raisons) de Neskafee, c’est mon conjoint qui a souhaité que l’on donne mon nom de famille à nos enfants. En tant que féministe j’étais contente de ce choix, et surtout que ce soit lui qui le propose ; même si je lui ai demandé s’il ne souhaitait pas qu’on y accole son nom également, par soucis d’égalité, mais non. Ceci dit cela a interpellé autour de moi, on m’a demandé pourquoi on avait donné mon nom de famille et pas celui du papa, ma réponse était « et pourquoi pas? ».. merci société patriarcale ^^
Je trouve votre cheminement personnel sur cette question très intéressant, et je suis contente pour vous de cet aboutissement. Je pense que chaque parent fait comme il le souhaite, le principal étant qu’ils soient d’accord tous les deux.
Je vous souhaite, dans tous les cas, une belle relation avec votre petite fille.
Nesskafee dit
Article très intéressant pour comprendre le point de vue de l « autre ».
De mon côté, mon mari a décidé de donner à notre fils, mon nom de famille. Je pense que cela vient aussi du fait que sa famille est un peu décousue, bcp de prise de tête pour rien alors que de mon côté nous sommes très unis et il s est tjs senti le bienvenu.
Je me suis toujours demandé si son père le savait qu est ce qu il dirait. Je pense qu il aurait exactement la même réaction que vous!
Anne dit
Bonjour Catherine,
Votre témoignage est très touchant et on sent que vous avez poussé votre réflexion, que vous ne vous êtes pas légitimé à exprimer vos émotions sans chercher à les comprendre.
Clairement, le choix du nom de la descendance est une interférence dans le couple. Cela ne vous concernait pas dans votre rôle de grand-mère, sur ce point, je suis d’accord avec votre fille. Cette décision appartient au couple et fait partie des compromis (admis ou non) au sein du couple. Elle n’est pas fondamentalement un rejet de sa filiation même si elle peut concrétiser une mauvaise expérience mais dans la majorité des cas, elle est simplement et bêtement pratique.
Le point sur lequel je suis d’accord avec vous est que cette culture qui transmets le nom du père au détriment de celui de la mère est profondément patriarcale et fait mal à un côté féministe de la mère, qu’elle soit mariée ou non.
Mais c’est un acquis culturel des hommes. Ils n’ont pas envisagé la possibilité que leur enfant ne porte pas leur patronyme, ils n’ont pas évolué jusqu’à l’âge adulte avec cette idée. Pour eux, un enfant qui ne porte pas le nom de son père est un enfant qui n’a pas été reconnu par son père. C’est inexact mais c’est un raccourci psychologique ancré. Par conséquent, on demandera plus facilement au père de se justifier sur ce choix, on le chambrera et quelque part, il pourrait le prendre comme un rejet de sa paternité.
Il n’est donc pas évident pour une mère d’aborder une volonté de donner son nom de jeune fille à l’enfant, et cela appelle d’autres discussions au sein du couple : dans quel ordre placer les patronymes si on choisit de l’identifier par les deux (sachant pertinemment que le second se perdra soit dans les générations futures, soit dans l’usage régulier par soucis pratique…). Et la question se pose au final, est-ce un questionnement à ce point important pour la mère qu’elle soit prête à provoquer cette discussion houleuse au sein de son couple, ou est-ce un élément sur lequel elle puisse simplement laisser la tradition patriarcale se perpétuer sans intervenir. Ce choix ne revient pas du tout à la famille d’origine de l’un ou l’autre des concubins. L’importance pour la mère de voir son patronyme apparaitre chez son enfant lui est personnelle et le combat qu’elle estime justifiée pour ce faire, avec les risque de disputes ou de décalage au sein de son couple ou l’éloignement éventuel de sa famille d’accueil sont des éléments qu’elle seule peut décider de risquer ou non.
Cela ne vous concerne pas. C’est une tradition, relativement injuste mais personnelle et souvent adoptée par soucis pratique. En effet, en définitive, il faut bien choisir, soit l’un ou l’autre, soit l’ordre dans lequel apparait la filiation. Comment fera l’enfant fille, par la suite dans sa famille d’adoption si son nom est déjà composée. Prendra-t-elle son nom d’épouse, par soucis de cohérence afin d’eviter d’avoir un troisième patronyme à son actif? Donnera-t-elle à son tour à son enfant le nom du père pour éviter toujours les patronymes à rallonge puisque son nom à elle est déjà composé, l’argument du père pourrait être que par soucis pratique, son nom seul serait plus simple quotidiennement pour l’enfant à naître, dès lors, imposer à votre petite-fille un nom double pourrait l’amener à devoir y renoncer pour des arguments froidement pratique dans sa vie d’adulte et la priverait, elle d’une éventuelle part de liberté quand bien même elle accorderait plus d’importance que sa mère (et donc votre fille) à son nom de naissance qui finalement ne l’aurait fait que pour calmer les susceptibilités…
Comprenez que ce n’est pas un rejet, ce peut être aussi de la part de votre fille, le fruit de réflexions conscientes ou non sur ces éléments.
Je suis heureuse, en tout état de cause que vous ayez trouvé votre cohérence dans ce choix de votre fille, mais je voulais tout de même alimenter le débat sur les tenants et aboutissants si d’autres mamies passent par là, car vraiment, leur avis n’est à donner que s’il est demandé en guise d’éclairage. Si elles vivent mal ce point, elles peuvent en demander les raisons à leur enfant, mais ce n’est pas à leur enfant de s’occuper de réparer l’outrage. C’est leur problème à elles (ou eux si ce sont des papys qui interfèrent).
Zcomju dit
Quel beau témoignage! Et il n’y a pas grand chose de plus admirable à mes yeux que la capacité à se remettre en question, tempérer, savoir entendre un autre point de vue… une ouverture d’esprit apparemment héréditaire, puisqu’elle a permis la discussion! 😉
Pour ma part, j’ai été victime et soumise à mon ex-conjoint, par amour et par faiblesse, mais je lui pardonne, à près l’avoir quitté au bout de presque 17 ans, ses travers « d’enfant malade ». Je ne regrette donc pas de lui avoir accordé ce que la belle-mère de son aînée lui a volé en allant déclarer sa première fille: la reconnaissance de sa place de père. J’ai donc donné à notre fille nos deux noms, même s’il m’avait quittée pour la dernière fois quelques mois avant sa naissance. Je regrette juste d’avoir trop compromis sur le prénom, et de n’avoir pas mis mon nom de famille en premier… je l’ai portée seule, élevée seule, même s’il passe rarement une journée sans passer la voir, elle et moi le méritions. Mais je sais qu’il en est heureux… et pour m’avoir donné la plus beau cadeau du monde, il le mérite.
Anays dit
Bonjour
Il y avait une solution également pour vous rendre heureuse, il me semble qu’elle peut effectivement mettre les 2 noms.
Ce qui aurait pu être un bon compromis.
Catherine BIZET dit
Bonjour,
Cela m aurait évidemment beaucoup touchée.. mais ma fille n a pas pour rôle de me réparer .. ni de flatter mon égo, et je pense qu’il peut il y avoir des raisons multiples, conscientes ou inconscientes, qui nous conduisent à tel ou tel choix. J’ai décidé de respecter le sien et d ‘y trouver du sens.
Cab dit
Bonjour, je trouve votre témoignage très intéressant et pertinent. Je comprends le point de vue de votre fille et de son compagnon: une femme porte l’enfant, le sent grandir pendant 9 mois, est en connexion avec ce petit bout’chou alors que l’homme ne vit pas ces moments de la même manière. Je pense qu’elle a voulu, par le choix du nom de famille, inclure le papa tout autant qu’elle dans la vie de leur fille, et insister sur le fait que c’était leur fille à tous les deux. Je comprends également votre point de vue, votre ressenti et votre besoin. Personnellement, nous avons fait le choix d’assembler nos deux noms de famille pour former le sien. Parce que comme vous, je n’étais pas d’accord avec le fait que mon nom de famille s’efface par habitudes, parce qu’on a toujours fait comme ça. J’accorde une grande importance à mon nom de famille, à mes racines. C’est le compromis que nous avons trouvé 🙂 Je suis très heureuse de lire que vous avez pu dénouer la situation avec votre fille et que ça a pu débloquer des choses en vous. Déjà félicitations pour l’arrivée de ce petit trésor au sein de votre famille. La belle journée.
Catherine BIZET dit
Bonjour,
Un grand merci pour votre commentaire et compréhension.
Merci également à Nathalie d avoir eu la gentillesse de mettre en ligne mon témoignage.
Ce qui m est apparu intéressant avec le reçul c est qu’on ne pense pas au capital (dans le sens Bourdieusien..) que peut porter un nom et de son influence sur nos choix, lorsque nous pouvons en faire un.
Je dois dire que je suis également heureuse que ma fille ne se soit pas sentie en dette vis à vis de moi, ce qui lui a permis de faire un choix éclairé.. et de s y tenir. Cela démontre, malgré tout, une force de caractère propre je crois au sujets émancipés.. Elle vit donc déjà, d une certaine manière, le féminisme, sans y penser !
Numpa dit
Juste un petit point législation que les parents soient mariés ou non, l’enfant peut porter soit le nom du père, soit le nom de la mère, soit le nom du père + le nom de la mère, soit le nom de la mère + le nom du père.
Et les époux peuvent porter en nom d’usage soit le nom de l’époux, soit le nom de l’épouse, soit le nom de l’époux + le nom de l’épouse, soit le nom de l’épouse + le nom de l’époux. Grace à cela tous les membres d’une même famille peuvent porter le même nom, sans que cela soit obligatoirement le nom de Monsieur 🙂
Catherine BIZET dit
Bonjour, oui effectivement ! Merci du rappel des choix possibles !