L. vient de faire une fausse-couche. Et la douleur psychologique prend le pas sur la douleur physique. Pour se soulager, la jeune maman a souhaité écrire. Voici son témoignage.
{Témoignage} Fausse-couche : une douleur physique et psychologique
Bonjour à toutes et à tous !
Moi c’est L, je viens vous parler de mon babysharck ou autrement dit de ma fausse-couche intervenue à 13 semaines de grossesse, de cette descente aux enfers et de ce mal qui me brise.
Babysharck c’était le petit nom que je lui avais donné.
Je vais commencer par ces mots que j’ai écrit le soir à l’hôpital, puis je me permettrai de continuer par des mots plus actuels.
Cher baby sharck
Voilà seulement quelques heures que tu nous as quittés et tu me manques déjà terriblement. Quand j’ai su que tu étais là j’étais mitigée, perdue, pleine de peurs et de doutes
Mais très vite j’ai pris l’habitude de mettre ma main sur le ventre pour te rassurer, t’apaiser, te dire que je suis là.
Aux premières douleurs je t’ai supplié de t’accrocher.
Je t’ai expliqué que nous étions une équipe !
Ces derniers jours malgré les grosses douleurs et le sang je m’étais convaincue que nous serions forts à deux.
Mais voilà la vie en a décidé autrement.
Je n’oublierai jamais cette sensation à l’arrivée aux urgences quand j’ai senti que tu partais et que tout était fini.
Quelle affreuse sensation.
Ce matin à l’écho tout allait bien et ce soir tu n’es plus là.
Cette après-midi tu es tombé dans les toilettes.
Je t’aimais déjà si fort.
Je nous voyais déjà tous les trois.
Je nous imaginais à te choyer, à jouer, te câliner, te serrer tout contre moi.
Aujourd’hui je n’ai plus que ton souvenir et les échographies.
Ils disent qu’on n’y pouvait rien, que quelque chose ne devait pas aller mais tu es mon baby sharck.
Cette après-midi , allongée sur le sol te suppliant toi mon bébé de t’accrocher et suppliant toi mon mari de nous sauver, de faire quelque chose, de m’aider, de m’apaiser…
Je n’avais jamais connu une telle douleur, douleur physique, mais ce n’était rien comparé à cette douleur que je ressens aujourd’hui. Cette douleur de t’avoir laissé t’échapper, de t’avoir perdu, ne pas avoir su te retenir…
je me sens vide de toi mais je ne t’oublierai jamais mon baby sharck.
Tellement d’incompréhension…
Maintenant je sais. Je sais que ce liquide était ton liquide. Je sais que ces douleurs insoutenables étaient des contractions.
Dès le départ je savais que ce sang n’était pas normal.
Tout le monde nous dit que la prochaine fois ça ira mieux mais comment envisager déjà cette prochaine fois ?
Les entendre parler de contraception, de rapports … comment peuvent-ils alors que tu viens de partir…
Comment avancer sans toi, sans nos projets ?
Tout a débuté en mars lorsque j’arrête la pilule.
On ne réfléchit pas, on ne se met pas la pression : ça arrivera quand ça arrivera et de toute façon je n’étais pas pressé : je ne me sentais pas prête, trop égoïste et trop accro au sport ! et puis quelques temps plus tard : mes règles tardent… je finis par faire un test après une semaine. Nous étions persuadés que cela n’était pas possible que cela arrive aussi vite…
Je nous revois à 5 h du matin, devant le test de grossesse positif… un peu incrédules.
J’ai flippé, j’ai eu tellement peur et puis la panique a laissé place à la sérénité ! oui on va y arriver ! oui tout va bien se passer !
On décide de bien garder le secret mais je suis exténuée, j’ai des vertiges, je dois diminuer le sport.
J’ai quelques douleurs, j’ai peur d’une grossesse extra-utérine alors la gynéco nous reçoit tôt : l’écho est parfaite et on entend même son petit coeur. Quel bonheur. Je ne pensais pas être aussi émue. J’ai vu le bonheur dans les yeux de mon conjoint aussi ! Lui qui voulait tant fonder une famille : on y est.
S’enchaînent les rdv et l’écho du premier trimestre : bébé est en pleine forme et bouge dans tous les sens. On note sur mon dossier que le placenta est « antérieur », je n’y fais pas attention. J’ai hâte d’avoir les résultats du dépistage pour être rassurée.
Je continue ma vie en me reposant. Je dois l’annoncer à mes parents car ils s’inquiètent de me voir si fatiguée… ils sont tellement heureux.
J’ai hâte d’en parler à tout le monde… Puis un dimanche soir je perds un peu de sang. La gynécologue me donne un rendez-vous en urgence le lundi. Elle sait que je suis stressée. Elle me rassure tout va bien et me dit que c’est le placenta qui est bas et qui tire. Elle préconise du repos et je m’exécute. Le vendredi suivant : à nouveau du sang, pas beaucoup. Je suis en déplacement… ceci expliquant cela. Le week-end, les douleurs montent, le sang se fait fréquent… Lorsque je rentre le dimanche soir je suis exténuée, j’ai mal, je saigne… je pleure, je pleure beaucoup…
Lundi matin, direction la gynécologue qui n’était pas censée consulter mais qui me prend quand même. Le cœur du bébé va bien, le placenta aussi. Elle m’arrête et me dit de me reposer.
Je rentre à l’appartement rassurée… puis les heures passent, le cauchemar devient réalité. A 14h je perds les eaux.. mais je me persuade que je me suis fait pipi dessus et là une avalanche de douleur et de sang. Je ne comprends pas ce qu’il se passe… je fais un malaise dans les toilettes, supplie mon mari de m’aider… Égal à lui même il garde son sang froid, appelle la gynécologue et m’amène aux urgences… En descendant de la voiture je sens que quelque chose tombe, quelque chose se décroche.
Aux urgences on m’annonce 4h d’attente. Il est 16h02, on m’amène aux toilettes car j’ai ce « caillot de sang » que je dois évacuer… et là… la vison la plus horrible de ma vie, enfin je n’ai pas vraiment regardé, j’ai juste vu un petit morceau puis je me suis mise à hurler, hurler, pleurer… mon mari est arrivé en courant dans les toilettes où j’étais avec l’aide soignante… là tout s’est enchaîné… conduite en salle d’examen, échographie et j’ai vu mon ventre vide.. mais je continuais à perdre beaucoup de sang !
16h30 je pars au bloc…. 18h30 je me réveille vide et sans mon bébé…
Cela va faire deux mois, deux mois que je repasse dans ma tête toutes les étapes, à me demander comment j’aurais pu éviter ça !
Mon mari est parfait et compréhensif, il ne me brusque pas et je reconnais que dans toutes les épreuves il a été parfait : au début il m’a rassuré, durant les épreuves il a été calme et m’a soutenu et aujourd’hui il me soutient, me calme et me laisse le temps que je me sente prête.
Je suis mitigée entre l’envie d’avoir un enfant et cette peur
Peur de revivre tout ça, peur d’affronter toutes ces étapes, peur de pas être capable de donner la vie…
Je suis malheureuse et perdue. Je m’en veux. Je ne sais pas comment avancer.
Quand on me parle de contraception ou autre, j’ai envie de crier au monde entier qu’on ne peut pas oublier mon bébé comme ça. Certes il n’est pas né mais il était là !
Comment être sûre que j’ai vraiment envie d’avoir un bébé et que ce n’est pas juste combler un vide dans mon ventre. Surtout que je suis de celles qui revendiquent que je ne ressens pas cette envie viscérale de donner la vie…
Ce dont je suis sûre c’est que lors de la perte j’ai été sûre d’avoir envie de faire des enfants!.car au début de la grossesse je me suis posée 10000 questions dont celle-ci…
Bref tout ceci est un peu décousu mais c’est à l’image de mon esprit…
Vous souhaitez publier votre histoire sur le blog ? Déposez votre témoignage mariage ou témoignage maternité ici.
Emy dit
Ces mots me touche en plein cœur… Nous avons vecu cette épreuve de manière différente mais la douleur est tellement similaire. A mon sens rien n’est comparable à la douleur psychique que l’on peut vivre après une fausse couche.
J’ai perdu mon Petit-poids il y a 15 jours à 21 semaines de grossesse. Il n’y a plus d’activité cardiaque à dit le medecin. La douche froide puis le néant. Puis s’en est suivi tout un protocole medical pour permettre l’accouchement. 3 jours… puis les obsèques de notre petit ange, les demarches administratives en urgence pour sa reconnaissance, lui choisir un prénom…
Je crois que quelque chose s’est brisé en moi pour toujours. Je cherche toujours le mots à poser sur ce que je ressens… Mais je ne les ai pas. J’ai l’impression d’être dans le brouillard et que mes émotions sont anesthésiées.
J’ai bien conscience que ceux qui m’entourent se veulent bienveillants, qu’ils essaient de me consoler en m’invitant à voir un avenir meilleur, je reste imperméable à leurs mots. Comment se projeter dans l’avenir avec une telle douleur ? Alors je vis au jour le jour en espérant que demain le moral sera meilleur. Cela prendra le temps qu’il faut. Je me laisse le temps de vivre mes émotions et entrer dans mon deuil car je sais que je dois prendre soins de moi pour pourvoir avancer. J’ai déjà une fille pour qui je me dois d’être présente. Bien que cela soit difficile de me mobiliser toute la journée pour elle (reprise de l’école progressive post covid-19 oblige) elle reste mon rayon de soleil dans ce brouillard. Et notre Petit-poids, Emeric, notre fils, notre petit ange sera toujours nos cœurs.
Sandra dit
Je n’ai pas réussi à tout lire !! Je suis en larme à lire tes mots tellement ça me parle. CA va faire 1 an et demi que j’ai perdu mon 1er bébé comme toi, vers 13 sa fausse couche. Je pensais ne jamais m’en remettre j’avais tellement envie de se bébé. Les 1ers temps ont été très difficiles, les annonces autour de moi, les 1ers rapports en pleurs. Je suis pas chance retombée enceinte rapidement, j’étais hyper stressée de peur que sa recommence mais aujourd’hui avec ma fille dans les bras, je me dis que ce bébé a préparé mon corps, petit bébé n’était pas viable mais il a permis à sa petite sœur d’être en pleine santé, c’est notre petit ange. Je te souhaite de porter ton futur enfant dans les bras et de relativiser laisse toi le temps mamange
MissMEP dit
Bonjour,
Je n’ai pas de mots pour apaiser votre souffrance. Mais seulement un peu de soutien.
1 sur 4 c’est ce qu’on m’a dit il y a 6 mois. Ça apporte tellement de questions, aucun mot n’apaise « ce n’est pas ta faute » même si c’est vrai.
Cependant on finit par vivre avec, garder en tête qu’il a existé. Ma maman m’a dit qu’avoir été aimé même que quelques jours c’est le plus beau cadeau que les petits morceaux de maman que nous étions, pouvaient offrir à ces petits bébés.
Se laisser le droit de pleurer autant qu’on veut, autant que nécessaire, faire son deuil. Et puis un jour on accepte de prendre une douche et regarder notre corps qui a échoué sans se donner la nausée. On finit par ne plus pleurer tous les jours. On avance sans oublier.
Courage, un jour nous aussi on sera heureuse avec un enfant dans les bras…
Isy dit
Je lis votre témoignage et me revois il y a un an. J’ai perdu mon bébé comme vous à 13 semaines. J’ai eu beaucoup de mal à en parler et j ai mis plusieurs mois à accepter… Ma sage femme m’a beaucoup aidée. Elle m’a conseillé de ne pas parler de « fausse » couche, mon bébé était là, il a existé et je l’ai perdu… C’est un deuil à faire. Elle m’a encouragé à lui choisir un prénom car il a eu une existence et a (croyante ou non) lui allumer une bougie dans un lieu de culte ou un lieu symbolique pour moi afin de lui faire mes adieux sereinement. Et ça m’a fait beaucoup de bien. Que cette personne du monde médical me parle ainsi, qu’elle reconnaisse que j’avais perdu mon bébé et que ce n’était pas simplement la nature qui « réparaît » ses erreurs comme je l’ai entendu à l’hôpital…. Je suis maintenant en paix mais garde ce bébé dans mon cœur et ne l’oublierai jamais… Je vous souhaite de trouver cet apaisement et vous envoie tout mon courage pour traverser cette épreuve.
Laura dit
De tout cœur avec vous, L.
Je suis passée par là, moi aussi. Cette douleur, cette incompréhension, ces questions, cette injustice, ce vide immense…
Quand j’y repense, avec le recul, les larmes coulent toujours, mais alors je me dis que mon couple devait peut-être passer par là. Une étape atrocement difficile qui a permis à mon compagnon de se conforter dans l’idée qu’il voulait fonder une famille et qui nous a rapprochés un peu plus encore.
Entre les larmes, la peur, la colère, j’ai donc tenté d’être positive.
Jamais je n’oublierai ce petit bout qui a fait de moi la plus heureuse des mamans à la seconde où j’ai appris son existence.
Mais jamais non plus je ne changerais la vie que je mène aujourd’hui. Ce petit garçon de 9 mois qui partage désormais notre quotidien et que j’aime plus que tout est la plus belle chose qui nous soit arrivée (et nous avons eu la chance de le serrer dans nos bras 10 mois seulement après la perte de notre premier petit bébé).
Gardez espoir, prenez le temps de vous reconstruire. Mais dites vous que vous y avez droit, vous aussi, à ce bonheur, et que Baby sharck sera toujours là, dans vos cœurs.
Je vous envoie du courage et beaucoup d’ondes positives.
Prenez soin de vous surtout!
M dit
Bonjour L.
Je comprends parfaitement vos sentiments. Ici, fausse couche début août à presque 2 mois de grossesse. J’ai également eu beaucoup de mal avec les questions de contraception et la reprise des rapports. J’avais l’impression que ça voulait dire que je devais oublier mon bébé. Avec le temps c’est devenu plus facile, mais je ne l’oublie pas et son papa non plus. Nous avons recommencé les essais en janvier, et j’avais très peur de retomber enceinte, de ce que cela pourrait signifier, d’être capable de porter un nouveau bébé. Nous avons été chanceux et aujourd’hui je suis enceinte de 18 semaines d’un petit bébé qui se porte merveilleusement bien. Je l’aime de tout mon cœur et il ne remplace pas mon petit haricot partit trop vite. J’ai fait progressivement la paix avec cette perte et ce nouveau bébé m’y a beaucoup aidé. Alors oui j’ai eu très peur quand j’ai appris cette grossesse, l’euphorie de la précédente n’est pas revenue, mais je suis aussi plus sereine depuis que nous savons que tout va bien.
Vous êtes en train de traverser une phase très difficile, prenez votre temps, c’est essentiel et parlez en autour de vous. Vous trouverez des personnes qui sont passées par là et d’autres qui auront du mal à comprendre. Ce n’est pas un tabou, c’est une épreuve difficile et en parler vous fera du bien. Et quand vous vous sentirez un peu plus prête, vous pourrez réessayer sans oublier votre babyshark. La roue tourne et même si cela vous paraît difficile actuellement, vous retrouverez le sourire.
Emily dit
L. Comme je comprend votre esprit un peu fouilli. J’ai perdu mon bébé à 2 mois de grossesse il y a presque 1 an. Difficile anniversaire. Je n’ai jamais eu envie d’avoir des enfants, mais quand j’ai rencontré celui qui deviendra mon mari (bientôt), l’envie est devenue viscérale. Oui mais voilà, c’était à sens unique. Quand je suis tombée enceinte entre 2 changements de contraception, j’ai hésité à lui en parlé. Mais je l’ai fait, sa réaction a été…inattendu. Mauvaise. 2 mois plus tard, je le perdais aux toilettes, au travail. Cette vision de mon petit bébé était une horreur. J’ai eu du mal à poursuivre ma journée. Physiquement, il n’y avait rien, plus de symptôme, d’un coup. Psychologiquement, j’étais anéantie. 1 an plus tard je le suis toujours un peu, la mélancolie a pris le dessus. Vous n’oublierez jamais. Mais si vous laissez les choses venir, en occultant ses réflexions idiotes qui vous disent que vous n’avez qu’à recommencer, comme si vous étiez une poule à faire des œufs à la chaîne, vous aurez la surprise un jour d’être de nouveau enceinte. Une nouvelle grossesse, une seconde, pas une première. Ça ne vous oblige pas à en faire le deuil. Ce sera un autre bébé. Mais le temps doit faire son œuvre. Recentrez vous sur vous, faites ce qui vous soulage. Laissez la vie venir. Rien ne vous oblige. Je vous souhaite du courage.