R. souhaite faire suite au témoignage de Claire concernant la dualité d’aimer son enfant mais de regretter sa vie d’avant. Elle vit exactement la même chose et souhaite à son tour parler ouvertement du tabou de la maternité. Voici son témoignage.
Stop au tabou de la maternité et au bonheur forcé
Bonjour
Je trouve très courageux d’oser libérer la parole.
Le plus souvent, je le fais de vive voix autour de moi, parce que je regrette complètement ma vie d’avant *ET* j’aime mon enfant. Je souhaiterais que les autres mamans qui taisent leur état puisent un peu de réconfort dans le fait de ne pas être seules à ressentir cela.
Contrairement à vous, je ne ressens aucune satisfaction à cette succession de corvées et de sollicitations. Je fais pourtant de mon mieux chaque jour pour… aller de l’avant. Essayer d’être une bonne mère, lui expliquer que ce n’est pas de sa faute si je n’aime pas mon rôle de maman, lui donner des bons souvenirs… De l’amour, une éducation solide, de la stabilité, des rires, des moments complices.
Je ne suis pas devenue mère par hasard, ni trop jeune, ni sur un coup de tête… J’ai un mari, un travail, une maison.
Sur le papier, une vie de rêve. Dans la réalité, je me sens flouée.
La maternité m’à rendue amère, fatiguée, aigrie, entravée. J’ai horreur d’être devenue une machine à penser à l’Autre, tout le temps. Je me sens chosifiée, comme un objet qui aurait *UNE* fonction, un distributeur à bien être, câlin, nourriture, confort, histoires, jeux.
Je regarde devant moi, et je compte les années et serrant les dents… En souriant, en me disant que mon enfant n’y est pour rien.
Je sais que je ne pourrais pas vivre sans lui. Je sais aussi que je n’étais pas faite pour cette vie.
Mais je le sais trop tard…
Aurais-je pu le savoir avant ? Je ne crois pas.
Je me résigne à être la victime d’un choix dont je ne savais pas pleinement les conséquences, parce que ces conséquences ne sont jamais dites. Elles sont enjolivées, elles sont niées, elles semblent « normales » .
Les autres prétendent que c’est « magique »…
Est ce que tout le monde ment ? Cela me semblait irrationnel. Impossible.
Je me résigne donc a être la victime de mes choix et à ne pas devenir coupable de son mal être futur. Je ne veux pas que mon enfant subisse de dommages collatéraux de mon choix, lui qui n’a rien demandé.
Peut être que c’est cela aussi, l’Amour.
Accepter le sacrifice de soi. Accepter de ne pas pouvoir fuir. Accepter de répéter tous les jours une consigne simple.
Pourquoi en ferais-je un second enfant ? Pour me confirmer que je déteste mon rôle ?
On dit qu’on ne devrait faire que les enfants qu’on pense pouvoir aimer. Je n’ai plus aucun amour à donner à quiconque.
Je suis tellement vide.
Je me moque des critiques d’autrui. Les autres ne comprendront jamais ma dislocation.
Les autres n’ont pas été la dans les nuits infinies et moites, ou nous étions dans un tête à tête primordial au milieu de ses hurlements de nouveau-né.
Les autres ne savent pas la boule d’angoisse que je ressens quand je vois approcher les 16h30… La sortie de l’école.
Les autres sont des anonymes qui jugent, qui condamnent, qui feraient toujours mieux et qui ne font jamais rien.
Les autres ne me féliciteront jamais pour mon courage. Je ne déserterai pas, je me battrai, et je dirais à qui voudra l’entendre :
Vous êtes normale si vous ne vous sentez pas heureuse d’être parent. Je ne sais pas si vous finirez par l’être, mais si on n’a pas d’autre choix que d’avancer, autant le faire en souriant.
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Laura dit
Courage ! Je te comprends tellement ! Avec mon mari on a eu le même sentiment quasiment dès la naissance.
On nous a dit que c’était le baby blues ou la DPP ou juste un temps d’adaptation. Au final 6 ans plus tard, on est toujours d’accord. Si on pouvait refaire nos vies on ne ferait pas d’enfants !
Ce qui m’a beaucoup aidé c’est que ma psy m’a dit que j’étais une bonne mère car je m’occupais justement bien de mon enfant, qu’il était choyé et se sentait aimé et en sécurité. Elle m’a aussi expliqué que ce n’était pas une fatalité et que certains parents découvrent un amour de la parentalité plus tard (vers 6 ou 10 ans parfois). Et j’avoue qu’en effet, à 6ans, ca commence à être plus sympa (même si je regrette toujours).
Ma pay m’a aussi convaincu que je pouvais le faire garder le weekend ou certains soirs par la famille. Je n’osais pas trop demander car mon fils mon « devoir » et je ne voulais pas qu’il se sente abandonné ou mal aimé. Mais en fait non. Un weekend par mois, il profite de l’amour familial et moi je peux faire tout ce que je veux (et absolument aucun ménage, travail administratif…).
Par contre, avec mon mari on a aussi décidé d’en faire un deuxième.
Toujours dans cette idée de sacrifice (on lui doit le meilleur et pour nous le meilleur c’est une fraterie) et de foutu pour foutu… Et au final, c’est bien mieux. Juste parce qu’ils jouent ensemble et nous laissent souffler un peu plus et que quand c’est génial de voir le grand se mettre en 4 pour faire rire le petit et de voir le petit réconforter son frère.
Agnès dit
« Aurais-je pu le savoir avant ? Je ne crois pas. Je me résigne à être la victime d’un choix dont je ne savais pas pleinement les conséquences, parce que ces conséquences ne sont jamais dites. Elles sont enjolivées, elles sont niées, elles semblent « normales » . »
Je pense que même si une maman m’avait dit qu’elle détestait son rôle, qu’elle n’imaginait pas que c’était si dur et qu’elle avait si peu de satisfaction, je me serai dit que ce serait différent avec moi. On est toutes différentes, on réagit différemment à une même situation, on juge en se mettant à la place en imaginant. Mais on ne peut pas savoir comment on va se sentir, comment on va régir avant d’être dans la position de maman.
Je pense que certaines mères se révèlent et d’autre non. Néanmoins, sans vous juger, je pense que vous ne représentez pas non plus la plupart des mères qui certes ne vocalisent peut-être pas toutes les frustrations mais qui trouvent une satisfaction plus grande que la frustration à être maman.
Moi aussi je regrette la simplicité de ma vie d’avant, l’impulsivité, mais j’ai aussi l’impression que je me mets mes propres barrière, j’essaie de les reculer un peu plus avec mon enfant qui grandit, que je peux vivre ma maternité autrement.
Mon mari ne veut pas de 2ème car je pense qu’il est comme vous, la frustration est plus grande que la satisfaction. Moi je serai prête à « subir » les premières années pas drôles d’un 2ème juste pour créer une fratrie car je pense à l’avenir de mon enfant, pas à mon inconfort passager. Là j’ai l’impression de subir le point de vue de mon mari. Bref, c’est très ambivalent, mon mari me sert d’excuse car clairement jusqu’au 4 ans de mon enfant, c’était compliqué, mon fils me collait tout le temps et ça me fatiguait, et ça sera pareil avec le 2ème. Mais en même temps, j’ai peur de regretter, je pense à la solitude de l’enfant unique, qui est réel d’après les expériences autour de moi (et la mienne car plus jeune de 5 ans d’une fratrie de 4, je me suis sentie très seule toute mon enfance, par contre, j’ai une très bonne relation avec (presque tous) mes frères et c’est vraiment chouette.
Aeschbacher dit
On est plus nombreuse qu’on le croit, mais on se tait. Parce qu’il y a un jugement énorme entre femme. J’ai l’impression que la sororité s’arrête à la frontière de certains tabous.
Personnellement je ne m’en cache pas, je ne m’épanouis pas dans la maternité. Pourtant j’ai même pris mes mercredi pour être avec mon fils. Parce que lui n’a rien demandé et que je veux qu’il reste ce petit garçon joyeux et vif. Je veux qu’il s’épanouisse et qu’il ait confiance en lui. Il est aimé. C’est mon rôle de maman que je n’aime pas, lui ne doit jamais douter que je l’aime à en mourir.
Mais quand on me pose la question du deuxième, hors de question que je mente, même si ca provoque des silences gênés. Je commence à retrouver de l’espace pour moi dans ma vie, hors de question de recommencer cette enfer de l’enfant en bas-âge. Tout comme il est hors de question que je l’inscrive à 20 activités extra-scolaire. Je crois vraiment qu’être une bonne maman, ca commence par être une femme épanouie. Alors une fois que ses besoins sont assouvis, place à moi-même.
MmeAvenir dit
MERCI !!!
Vous n’êtes pas seule.