Sur le blog, nous recevons des témoignages de femmes enceintes mises au placard ou ayant des soucis à leur travail au moment de leur grossesse. Amélie, avocate en droit du travail a donc souhaité faire un petit rappel des droits des femmes enceintes par rapport à leur employeur. Et on la remercie vivement pour toutes ces informations sur la grossesse au travail.
Maternité et travail : vos droits en tant que femme enceinte
Bonjour,
je m’appelle Amélie, j’ai 34 ans et je suis maman d’un petit garçon de 3 ans (le deuxième est prévu pour dans quelques jours). Mais avant de devenir maman, j’étais (et je suis toujours) avocate en droit du travail. Ayant lu de nombreux témoignages (sur ce blog ou ailleurs) de femmes dont l’annonce de la grossesse ou le retour de congé ne s’est pas bien passé, j’ai eu envie de vous faire quelques rappels rapides sur vos principaux droits lorsque vous êtes enceinte.
Vos droits pendant toute la durée de la grossesse
Si vous êtes en recherche d’emploi, vous n’avez aucune obligation de révéler votre grossesse à votre futur employeur. Un recruteur n’a d’ailleurs pas le droit de prendre en considération l’état de grossesse d’une femme pour refuser de l’embaucher ni même de l’interroger sur une grossesse actuelle ou à venir.
Si vous êtes déjà en poste, le fait d’être enceinte ne permet pas (sauf convention collective plus favorable que la loi), de disposer d’une réduction automatique du temps de travail. Mais vous avez malgré tout le droit à certains aménagements.
Vous avez, par exemple, le droit de vous absenter pour vous rendre aux examens médicaux obligatoires dans le cadre de la surveillance médicale de la grossesse et des suites de l’accouchement (article L.1225-16 du Code du travail). Ces absences ne doivent pas vous être décomptées.
Par ailleurs, n’hésitez pas si votre travail est pénible ou vous semble dangereux pour votre grossesse, à aller voir le médecin du travail.
Celui-ci pourrait, s’il l’estime nécessaire, imposer à votre employeur de vous affecter à un poste moins pénible (ex : moins de port de charges, moins de déplacements etc.) pendant la durée de la grossesse.
Vous pouvez également, si vous travaillez de nuit, demander à être affectée à un poste de jour pendant la durée de la grossesse et du congé postnatal.
Le changement d’affectation ne doit entraîner aucune diminution de la rémunération.
De façon générale, et même sans avis du médecin du travail, l’employeur a une obligation de sécurité envers ses salariés.
Il doit donc faire le nécessaire pour éviter toute atteinte à votre
santé (notamment si vous êtes sur un poste à risques), sans quoi il pourrait être considéré comme responsable et être condamner à des dommages et intérêts.
Bien entendu, l’employeur ne peut pas non plus utiliser la grossesse comme motif pour vous sanctionner, vous discriminer de quelque manière que ce soit ou vous harceler (ex : refuser une prime du fait du congé à venir, vous « placardiser », arrêter de vous parler etc.).
Si, depuis l’annonce de votre grossesse, le comportement de votre employeur a changé et que vous avez l’impression que celui-ci cherche à vous « punir » de cette grossesse (cela arrive malheureusement encore trop fréquemment), je vous recommande de consulter un avocat pour préserver vos droits.
La protection contre le licenciement pendant la grossesse
Avant le congé maternité et dès que l’employeur est averti de la grossesse : le licenciement n’est pas impossible mais très limité par les textes.
L’employeur pourra rompre le contrat mais seulement s’il peut justifier d’une faute grave, non liée à l’état de grossesse, ou d’une impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à la grossesse (ex : cessation d’activité de la société).
Si votre employeur n’est pas encore informé de votre grossesse et cherche à vous licencier, il peut alors être utile de l’en informer rapidement de façon officielle (idéalement en recommandé).
Cela pourrait peut-être vous permettre (selon le motif du licenciement) que ce licenciement soit annulé.
Pendant la durée du congé maternité la protection est absolue : la rupture du contrat de travail ne peut prendre effet ni même être notifiée pendant cette période. Il est impossible d’informer une femme en congé maternité que son contrat est rompu. La Cour de cassation va même plus loin puisqu’elle considère même qu’il est interdit à l’employeur de prendre des « mesures préparatoires » à une telle décision (ex : convocation à
entretien préalable, information de la salariée sur un licenciement à son retour etc.). Sauf faute grave ou impossibilité de maintenir le contrat de travail, la protection contre le licenciement se poursuit pendant les 10 semaines suivant le retour dans l’entreprise à l’issue du congé de maternité.
Si votre employeur vous licencie sans respecter ces règles, je vous recommande de vous rapprocher d’un avocat ou, a minima, de l’inspection du travail. Votre licenciement pourrait alors être considéré comme nul si le véritable motif de la rupture était votre état de grossesse.
Cela peut vous permettre d’obtenir une réintégration avec paiement des salaires qui étaient dus (si vous le souhaitez) ou, si vous n’entendez pas réintégrer votre entreprise, des dommages et intérêts.
A votre retour de congés maternité, le droit de retrouver un poste similaire
L’article L.1225-25 du code du travail énonce que « à l’issue du congé maternité, la salariée retrouve son précédent emploi ou un emploi similaire assorti d’une rémunération au moins équivalente. »
En principe, vous devez donc retrouver votre emploi précédent, dans les mêmes conditions. Il arrive parfois que le retour au même poste ne soit pas possible (ex : si l’organisation de la société a changé, si le poste a été supprimé ou autre).
Dans ce cas, votre réintégration doit se faire dans un emploi « similaire », qui n’entraîne aucune modification de votre contrat de travail (et notamment aucune baisse de rémunération).
Le fait d’avoir été enceinte ne peut justifier aucun retard d’évolution, aucune mise au placard… bref, votre employeur n’a pas à vous « faire payer » d’avoir eu un enfant.
Ainsi, si tous vos collègues ont bénéficié d’augmentations pendant votre congé, votre rémunération doit également être réévaluée.
Je vous recommande donc également de vous rapprocher d’un avocat si vous n’avez pas retrouvé une situation similaire à celle que vous aviez auparavant ou si vous avez l’impression que la société cherche à vous faire partir par tous les moyens.
Parfois, il peut sembler plus facile de laisser tomber et de chercher un nouveau travail plutôt que de se battre…mais se battre est aussi une façon de protéger toutes celles qui viendront après vous et de faire changer la façon de procéder de certains employeurs peu scrupuleux !
Amélie Najsztat
Avocate en droit du travail
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Emilia dit
Bonjour,
Je suis dans mon 3 ème de grossesse.
Mon employeur m’impose de lui donner la datation et le planning de grossesse, alors que je ne l’ai pas.
Et je dois les lui fournir assez rapidement.
En a t’il le droit de l’imposer?
merci
Anna dit
Bonjour,
Merci pour toutes ces précisions et de l’avoir verbalisé de telle sorte à ce que ce soit compréhensible pour tous.
Serait-il possible d’avoir plus de détails concernant les primes? En effet, nous avons un 13eme mois sous forme de prime (n’est pas spécifié dans le contrat de travail comme 13eme afin de le supprimer « si besoin »).
Étant en congé maternité depuis août, je sens qu’ils vont vouloir pro-ratiser cette prime me concernant. En ont-ils le droit?
Merci par avance pour votre retour,
Cordialement
Polita1212 dit
Bonjour,
Merci pour votre super article !
Serait il possible d’avoir le même retour pour la suisse ?
Bonne journée
Amélie dit
Bonjour, désolée mais je ne connais absolument pas le droit suisse et ne peut donc pas faire un article similaire sur un droit qui m’est inconnu
Marie dit
Bonjour,
Merci pour votre article qui se révèle très utile. Pouvez-vous juste y apporter un complément d’information sur l’allaitement à la reprise du travail, et nos droits. Pour celles qui souhaitent continuer d’allaiter en travaillant.
Merci beaucoup.
Amélie dit
Bonjour, j’essaye de vous faire un petit complément sur ce sujet en commentaire dans la semaine 🙂